Véhicules de fonction et de service : différences et obligations pour l’employeur

Une entreprise peut être amenée à mettre à disposition un véhicule pour ses salariés. Ce véhicule peut être uniquement destiné à une utilité professionnelle (dans ce cas, il s’agit d’un véhicule de service ou de société) ou destiné à usage personnel ou mixte (il s’agit alors d’un véhicule de fonction).
Les différences résident notamment dans les finalités de ces véhicules (I), aux fiscalités différentes (II), aux frais engagés par l’employeur (III), à la responsabilité en cas d’infractions (IV), mais aussi aux conséquences liées à leur retrait par l’employeur (V).

 

I – Quelles sont les finalités du véhicule de fonction et du véhicule de service ?

Quelle est la finalité du véhicule de fonction ?

L’octroi du véhicule de fonction au salarié est analysé comme un avantage en nature dont il bénéficie et fait partie intégrante de la rémunération du salarié. L’employeur doit donc la déclarer pour qu’il apparaisse sur le bulletin de paie du salarié. Le véhicule est mis à disposition de manière permanente au salarié, ce qui implique d’une part que le salarié puisse utiliser ce véhicule à titre privé, en dehors de son temps de travail et d’autre part, que le salarié n’est pas tenu de le restituer en dehors de ses périodes de travail, à savoir en fin de journée, en week-end ou encore lors de ses périodes de congés payés – (Circ. DSS, n° 2003-07, 7 janvier 2003).

 

Quelle est la finalité du véhicule de service ?

Concernant le véhicule de service, l’employeur peut autoriser le salarié à utiliser le véhicule de service pour rentrer à son domicile, après le travail ou pour se rendre au travail à partir de son domicile. Si tel est le cas, cette autorisation devra figurer dans le contrat de travail ou dans un avenant du contrat de travail. Par ailleurs, le véhicule de service peut être retiré à tout moment et unilatéralement par l’employeur. Aucun accord avec le salarié n’est nécessaire. Cela s’explique par le fait qu’un tel véhicule n’est pas un élément du salaire.

Une clause de mise à disposition de véhicule de service doit par ailleurs être incluse dans le contrat de travail, qui permet de préciser les conditions d’utilisation du véhicule et rappelle notamment que l’usage du véhicule dans un cadre privé est strictement interdit. La clause est valide dès lors l’employeur n’applique pas de sanctions pécuniaires au salarié concerné.

 

 

II – Quelles sont les différences de régime fiscal entre le véhicule de fonction et le véhicule de service ?

 

Le véhicule de fonction soumis à l’impôt sur le revenu

L’octroi d’une voiture de fonction étant analysé comme un avantage en nature faisant partie de la rémunération du salarié, il est soumis à l’impôt sur le revenu.

 

Le véhicule de service soumis à la taxe sur les véhicules de société (TVS)

L’utilisation d’un véhicule de service par un salarié est soumise à une taxe annuelle que l’employeur se doit de payer. Il s’agit de la « taxe sur les véhicules de sociétés » – (Article 1010 du Code général des impôts). Cette taxe est applicable à toutes les sociétés, et concerne également les véhicules de tourisme utilisé à l’étranger, dès lors qu’elles sont immatriculées en France.

Depuis le 1er janvier 2018, la période d’imposition des véhicules de service est fixée du 1er janvier au 31 décembre – (Article 1010, II, alinéa 1 du Code général des impôts). Concernant les sociétés louant leur véhicule de service, la taxe n’est due seulement si la location excède 30 jours consécutifs ou 1 mois civil. Si la location n’excède pas 3 mois consécutifs, la taxe n’est due qu’au titre d’un seul trimestre.

Il convient de noter par ailleurs que, dans certains cas, cette taxe peut être exonérée, notamment dans les cas où :

  • Les entreprises ont pour activité la location de véhicules et qui mettent à disposition un véhicule de service à ses salariés – (Article 1010, I, alinéa 2 du Code général des impôts),
  • Les véhicules sont exclusivement destinés soit à la vente, soit à la location de courte durée, soit à l’exécution d’un service de transport à la disposition du public, lorsque ces opérations correspondent à l’activité normale de la société propriétaire, soit à un usage agricole,
  • Les véhicules sont non-polluants.

 

III – Quels sont les frais engagés par l’employeur pour un véhicule de fonction et un véhicule de service ?

 

Les frais liés au véhicule de fonction

Lorsque le salarié dispose d’une voiture de fonction, les frais de péages sont à la charge de l’employeur, ou plus précisément, celui-ci doit rembourser les frais de péage que le salarié a déboursé. La Cour d’appel d’Aix-en-Provence l’a rappelé dans son arrêt du 9 mars 2017, n° 14/19126.

Tous les autres frais d’utilisation sont également à la charge de l’employeur, dès lors que le salarié en donne la preuve (par des justificatifs notamment). L’assurance est également aux frais de l’employeur puisque celui-ci est propriétaire de la voiture. Si la voiture est louée, alors l’assurance sera prise en charge par la société propriétaire.

 

Les frais liés au véhicule de service

Tous les frais liés à l’utilisation du véhicule (carburant, péages, parking, etc.) sont à la charge de l’employeur, à condition que le salarié en donne les justificatifs. L’employeur doit également prendre en charge l’assurance du véhicule, car celle-ci est attachée à la voiture et non au conducteur.

L’obligation d’équiper tous les véhicules de pneus de neige

Véhicules légers, utilitaires, bus et poids-lourds sont concernés par l’obligation. Seuls sont dispensés les voitures aux pneus à clous. Quant aux poids lourds avec remorque ou semi-remorque, ils devront avoir à disposition des chaînes à neige pour équiper au moins deux roues motrices, même s’ils sont équipés de pneus hiver. Par conséquent, les véhicules de fonction et de service, peu importe leur catégorie d’appartenance, doivent être équipés en conséquence dans les départements concernés par la mesure. Cette obligation incombe à l’employeur qui doit équiper ses véhicules (de fonction ou de service). La mesure s’applique potentiellement aux 48 départements montagneux métropolitains. Parmi eux, les départements alpins (Hautes-Alpes, Alpes-Maritimes), pyrénéens (Pyrénées-Atlantiques, Hautes-Pyrénées et Pyrénées-Orientales), ou encore les Vosges. La mesure s’applique partiellement ou totalement en fonction des zones. Dans ces secteurs balisés, l’employeur a le choix entre équiper ses véhicules avec des pneus spécifiques, ou des dispositifs antidérapants amovibles qui peuvent se greffer sur au moins deux roues motrices, à conserver en permanence dans le coffre et à utiliser en cas de neige (chaînes métalliques). Dans ces départements montagneux, les véhicules non équipés pour emprunter des routes enneigées ou verglacées encourent une amende de 135 euros dès le 1er novembre 2022. Une carte consultable sur le site de la Sécurité routière (https://www.securite-routiere.gouv.fr/chacun-son-mode-de-deplacement/dangers-de-la-route-en-voiture/equipement-de-la-voiture/nouveaux) recense les périmètres prévisionnels. Elle est actualisée puis rendue définitive au fur et à mesure de la prise des décisions préfectorales.

 

IV – L’attribution de la responsabilité en cas d’infraction commise avec le véhicule de fonction ou de service

Lorsque le salarié commet une infraction au Code de la route au volant d’un véhicule de son entreprise (dépassement de vitesses, non-port de la ceinture de sécurité, usage du téléphone au volant, etc.), le représentant légal de son entreprise, titulaire de la carte grise du véhicule, est légalement responsable. Le titulaire doit en principe payer l’amende – (Article L.121-3 et L.121-2 du Code de la route). Dans le cas où le salarié était au bord d’un véhicule loué ou sous-loué par l’entreprise au moment de commettre l’infraction, le paiement de l’amende incombe également au représentant de l’entreprise, et ce même s’il n’est pas titulaire de la carte grise – (Cass crim., 15 octobre 2019, n° 18-86.644).

Cependant, si le salarié conteste avoir commis l’infraction dont on l’accuse, l’employeur doit réunir tous les éléments permettant d’établir que le salarié conduisait bien le véhicule au moment de l’infraction, sous peine de demeurer redevable de l’amende – (Cass crim., 17 avril 2013, n° 12-87.490). L’employeur doit également par ailleurs indiquer l’identité de ce salarié aux autorités, sous peine d’une amende de 750€ (Article 121-6 du Code de la route).

Pour ce faire, le représentant légal devra indiquer, par LRAR ou de façon dématérialisée via le site www.antai.fr dans un délai de 45 jours à compter de l’envoi de l’avis de réception, l’identité et l’adresse du salarié qui conduisait le véhicule, ceci en dehors des cas de vol, d’usurpation de plaque d’immatriculation ou évènement de force majeur.

A la réception de l’avis de contravention, l’employeur peut alors opérer un choix. Il peut soit s’autodésigner, auquel cas il sera tenu de payer l’amende et perdra des points sur son permis, soit l’employeur peut désigner le salarié qui subira les mêmes conséquences, et enfin, l’employeur peut aussi choisir de payer l’amende sans désigner le salarié ayant commis l’infraction, auquel cas il ne perdra pas de points sur son permis de conduire, mais il devra cependant payer une seconde amende pour ne pas avoir désigné le conducteur.

 

V – Les conséquences du retrait du véhicule de fonction et du véhicule de service

 

Le retrait du véhicule de fonction

Le véhicule faisant partie intégrante du salaire du salarié, si l’employeur souhaite le lui retirer, alors celui-ci doit obtenir l’accord du salarié au préalable. En effet, toute modification de salaire correspond à une modification du contrat de travail nécessitant le consentement du salarié. De fait, le salarié peut également refuser ce retrait. Durant une suspension du contrat de travail, l’employeur ne peut pas exiger du salarié qu’il restitue son véhicule – (Cass. soc., 24 mars 2010, n°08-43.996). Lorsque le contrat de travail est rompu, le salarié doit restituer le véhicule à l’entreprise. En effet, la voiture de fonction est un accessoire du salaire, et elle est liée à l’existence de celui-ci. A défaut le salarié s’expose à la caractérisation d’une infraction d’abus de confiance. De plus, le salarié peut conserver le véhicule pendant la durée du préavis, puisque le préavis ne doit entraîner aucune diminution de salaires et avantages que le salarié aurait perçus s’il avait accompli son travail, jusqu’à son expiration – (L.1234-5 du Code du travail).

 

Le retrait du véhicule de service

Si l’employeur décide de retirer le véhicule de service à un salarié, celui-ci ne peut le refuser, car il ne s’agit pas d’une modification du contrat de travail. Pour autant, le salarié est en droit de réclamer une indemnité pour compenser ses frais de déplacement. Le véhicule doit être restitué à l’entreprise dès lors que le salarié cesse ses fonctions. En effet, le véhicule est mis à disposition du salarié en raison d’un contrat de travail.

De plus, le contrat de travail doit prévoir les modalités de restitution en cas de suspension du contrat de travail.

 

 

Me Nicolas BECK

par
Avocat au Barreau de Paris
Expert en droit du travail

Fascicule mis à jour le 15 décembre 2022.

Tous droits réservés.

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