Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 14 décembre 2022, 21-19.370 21-19.371 21-19.372, Inédit

Ref:UAAAKD2F

Résumé

Apport de la jurisprudence : PSE / Licenciement économique / Accord d’entreprise / Indemnité transactionnelle

En cas d’accords successifs, portant sur les mesures d’accompagnement en faveur des emplois et du reclassement des salariés dans le cadre d’une procédure de licenciement économique et d’un accord PSE par la suite, la Cour de cassation confirme, que c’est bien le dernier accord instaurant le PSE qui doit être respecté. Les dispositions éventuellement prévues dans les accords initiaux autres que le PSE n’ont pas nécessairement à être reprises ni appliquées. En l’espèce, il s’agissait d’une indemnité transactionnelle qui n’avait pas été reprise dans le PSE. La Cour de cassation semble opter pour la substitution entre les accords et non leur complémentarité.

Cass. soc, 14 décembre 2022 n°21-19.370

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

CH9



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 14 décembre 2022




Rejet


M. SOMMER, président



Arrêt n° 1374 FS-D


Pourvois n°
P 21-19.370
Q 21-19.371
R 21-19.372 JONCTION






R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 14 DÉCEMBRE 2022



1°/ M. [X] [M], domicilié [Adresse 2],

2°/ M. [O] [W], domicilié [Adresse 4],

3°/ M. [G] [Y], domicilié [Adresse 1]

ont formé respectivement les pourvois n° P 21-19.370, Q 21-19.371, et R 21-19.372 contre trois arrêts rendus le 12 mai 2022 par la cour d'appel de Reims (chambre sociale) dans les litiges les opposant à la société DHL services logistiques, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 3], défenderesse à la cassation.

Les demandeurs invoquent, à l'appui de chacun de leur pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Les dossiers ont été communiqués au procureur général.

Sur le rapport de Mme Marguerite, conseiller référendaire, les observations de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de MM. [M], [W] et [Y], de la SCP Célice, Texidor et Périer, avocat de la société DHL services logistiques, et de l'avis de M. Gambert, avocat général, après débats en l'audience publique du 8 novembre 2022 où étaient présents M. Sommer, président, Mme Marguerite, conseiller rapporteur référendaire, Mme Mariette, conseiller doyen, MM. Pietton, Barincou, Seguy, Mmes Grandemange, Douxami, conseillers, M. Le Corre, Mme Prieur, M. Carillon, conseillers référendaires, M. Gambert, avocat général et Mme Pontonnier, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Jonction

1. En raison de leur connexité, les pourvois n° P 21-19.370, Q 21-19.371 et R 21-19.372 sont joints.

Faits et procédure

2. Selon les arrêts attaqués (Reims, 12 mai 2021) et les productions, la société DHL services logistiques a conclu, le 26 février 2016, avec plusieurs organisations syndicales représentatives dans l'entreprise un accord d'entreprise visant à définir par anticipation les mesures d'accompagnement en faveur des emplois et du reclassement des salariés en l'absence de possibilité de mobilité dans le même secteur géographique au cas où l'entreprise serait contrainte d'engager une procédure de licenciement pour motif économique.

3. Une procédure de licenciement économique collectif a été engagée dans le cadre de la fermeture du site de [Localité 6] et de la fin d'activité de l'agence transport de [Localité 5]. Un plan de sauvegarde de l'emploi (PSE) a été établi par un accord collectif conclu le 26 mai 2016, validé par une décision de la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (Direccte) le 26 juillet 2016.

4. M. [M] et deux autres salariés du site de [Localité 6], licenciés et ayant accepté le congé de reclassement en décembre 2016, ont saisi la juridiction prud'homale afin de contester le bien-fondé de leur licenciement et obtenir le versement de l'indemnité supplémentaire de licenciement prévue à l'article V.E de l'accord d'entreprise du 26 février 2016.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

5. Les salariés font grief aux arrêts de les débouter de leur demande d'indemnité supplémentaire conventionnelle de licenciement, alors :

« 1°/ qu'à l'occasion de l'interprétation des stipulations des accords ou conventions collectives, les juges sont tenus de respecter la lettre du dispositif conventionnel ; que l'accord collectif d'entreprise du 26 février 2016 prévoyait expressément qu' ''en toute hypothèse, que le salarié signe ou non la transaction, il conserve le bénéfice de l'ensemble des autres dispositions prévues par le PSE auxquels il est éligible, pour ce qui concerne tant les mesures de reclassement externe que les autres indemnités prévues par le PSE'' ; qu'ainsi l'accord collectif prévoyait un rapport de complémentarité entre le PSE et l'accord collectif, sans aucune substitution de l'un à l'autre ; qu'il s'en déduisait donc simplement que les garanties fixées par l'accord, qui ne pouvaient être privatives du bénéfice du PSE, demeuraient en tout état de cause applicables, quel que soit le contenu du PSE ; qu'en considérant cependant que l'accord du 26 février 2016 était un accord anticipant un futur plan de sauvegarde de l'emploi et qu'il convenait avec les partenaires syndicaux des mesures d'accompagnement qui devraient y figurer obligatoirement, que le plan de sauvegarde de l'emploi, qui avait été adopté de manière conventionnelle, n'avait pas inclus l'indemnité supplémentaire de licenciement, pour en déduire qu'à la lecture de ces deux textes, il apparaissait que l'accord du 26 février 2016 n'était pas applicable indépendamment du plan de sauvegarde de l'emploi, quand le texte de l'accord collectif ne prévoyait pas une substitution de l'accord de PSE aux clauses de l'accord du 26 février 2016, mais un cadre général déterminant le contenu du PSE, la cour d'appel a violé l'accord collectif d'entreprise du 26 février 2016 et l'accord de PSE du 26 mai 2016 ;

2°/ que l'objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties, qui sont fixées par l'acte introductif d'instance et par les conclusions en défense ; que le juge doit se prononcer sur tout ce qui est demandé et seulement sur ce qui est demandé ; que pour débouter le salarié de sa demande d'indemnité supplémentaire conventionnelle de licenciement, la cour d'appel a considéré que l'accord du 26 février 2016 prévoyait la signature d'un accord transactionnel avec le salarié qui, s'il acceptait l'indemnité supplémentaire, devait renoncer à contester son licenciement, que l'accord passé entre l'employeur et les partenaires syndicaux s'analysait donc en une possibilité alternative d'obtenir soit une indemnité supplémentaire de licenciement excluant l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, soit une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse excluant l'indemnité supplémentaire, pour en déduire que le salarié ne pouvait prétendre à la fois à l'une et l'autre de ces indemnités ; qu'en statuant ainsi, alors que ni l'employeur ni le salarié n'ont jamais soutenu que le versement de l'indemnité spéciale de licenciement était alternative à l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, la cour d'appel a dénaturé l'objet du litige en violation des dispositions des articles 4 et 5 du code de procédure civile ;

3°/ que le juge doit en toutes circonstances faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; qu'en relevant d'office, sans inviter préalablement les parties à présenter leurs observations, le moyen tiré de ce que le versement de l'indemnité spéciale de licenciement était alternative à l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, quand ni l'employeur ni le salarié n'ont jamais discuté de cette argumentation devant les juges du fond, la cour d'appel, qui a soulevé ce moyen d'office, sans avoir préalablement recueilli les observations des parties à cet égard, a violé l'article 16 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

6. Aux termes du préambule de l'accord d'entreprise du 26 février 2016, d'une part, celui-ci a pour vocation de garantir et définir les mesures sociales d'accompagnement qui devront être respectées en cas de mise en oeuvre d'un licenciement économique dans l'entreprise et, d'autre part, les mesures sociales d'accompagnement qu'il définit seront reprises in extenso dans chaque accord déterminant un PSE.

7. Aux termes de l'article V.E de cet accord d'entreprise, une indemnité supplémentaire de licenciement sera éventuellement versée à l'ensemble des salariés licenciés. Elle prendra la forme d'une indemnité transactionnelle optionnelle et vise à indemniser le salarié licencié de l'ensemble des préjudices liés à la résiliation de son contrat de travail. Le salarié, qu'il signe ou non la transaction, conserve le bénéfice de l'ensemble des autres dispositions prévues au plan de sauvegarde de l'emploi auxquelles il est éligible.

8. Selon le préambule de l'accord collectif du 26 mai 2016 déterminant le contenu du plan de sauvegarde de l'emploi, celui-ci prend pour cadre les dispositions de l'accord du 8 décembre 2015, auquel l'accord du 26 février 2016 s'est substitué et les adapte au projet de restructuration en cause.

9. Il en résulte que les partenaires sociaux signataires de l'accord majoritaire du 26 mai 2016 ont mis en oeuvre les mesures prévues par l'accord du 26 février 2016, en fonction des caractéristiques du projet de licenciement collectif en cause et de la situation de l'entreprise ou du groupe à la date de présentation du PSE, sans reprendre la clause litigieuse prévoyant le versement d'une indemnité supplémentaire de licenciement, de sorte que les salariés ne peuvent s'en prévaloir.

10. Le moyen, qui soutient le contraire, n'est pas fondé en sa première branche.

11. Les deuxième et troisième branches s'attaquant à des motifs surabondants, le moyen ne peut donc être accueilli dans aucune de ses branches.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE les pourvois ;

Condamne MM. [M], [W] et [Y] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze décembre deux mille vingt-deux.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils, pour M. [M], demandeur au pourvoi n° P 21-19.370

M. [M] fait grief à l'arrêt attaqué de l'AVOIR débouté de sa demande d'indemnité supplémentaire conventionnelle de licenciement ;

1) ALORS d'abord QU'à l'occasion de l'interprétation des stipulations des accords ou conventions collectives, les juges sont tenus de respecter la lettre du dispositif conventionnel ; que l'accord collectif d'entreprise du 26 février 2016 prévoyait expressément qu'« en toute hypothèse, que le salarié signe ou non la transaction, il conserve le bénéfice de l'ensemble des autres dispositions prévues par le PSE auxquels il est éligible, pour ce qui concerne tant les mesures de reclassement externe que les autres indemnités prévues par le PSE » ; qu'ainsi l'accord collectif prévoyait un rapport de complémentarité entre le PSE et l'accord collectif, sans aucune substitution de l'un à l'autre ; qu'il s'en déduisait donc simplement que les garanties fixées par l'accord, qui ne pouvaient être privatives du bénéfice du PSE, demeuraient en tout état de cause applicables, quel que soit le contenu du PSE ; qu'en considérant cependant que l'accord du 26 février 2016 était un accord anticipant un futur plan de sauvegarde de l'emploi et qu'il convenait avec les partenaires syndicaux des mesures d'accompagnement qui devraient y figurer obligatoirement, que le plan de sauvegarde de l'emploi, qui avait été adopté de manière conventionnelle, n'avait pas inclus l'indemnité supplémentaire de licenciement, pour en déduire qu'à la lecture de ces deux textes, il apparaissait que l'accord du 26 février 2016 n'était pas applicable indépendamment du plan de sauvegarde de l'emploi, quand le texte de l'accord collectif ne prévoyait pas une substitution de l'accord de PSE aux clauses de l'accord du 26 février 2016, mais un cadre général déterminant le contenu du PSE, la cour d'appel a violé l'accord collectif d'entreprise du 26 février 2016 et l'accord de PSE du 26 mai 2016 ;

2) ALORS ensuite QUE l'objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties, qui sont fixées par l'acte introductif d'instance et par les conclusions en défense ; que le juge doit se prononcer sur tout ce qui est demandé et seulement sur ce qui est demandé ; que pour débouter le salarié de sa demande d'indemnité supplémentaire conventionnelle de licenciement, la cour d'appel a considéré que l'accord du 26 février 2016 prévoyait la signature d'un accord transactionnel avec le salarié qui, s'il acceptait l'indemnité supplémentaire, devait renoncer à contester son licenciement, que l'accord passé entre l'employeur et les partenaires syndicaux s'analysait donc en une possibilité alternative d'obtenir soit une indemnité supplémentaire de licenciement excluant l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, soit une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse excluant l'indemnité supplémentaire, pour en déduire que le salarié ne pouvait prétendre à la fois à l'une et l'autre de ces indemnités ; qu'en statuant ainsi, alors que ni l'employeur ni le salarié n'ont jamais soutenu que le versement de l'indemnité spéciale de licenciement était alternative à l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, la cour d'appel a dénaturé l'objet du litige en violation des dispositions des articles 4 et 5 du Code de procédure civile ;

3) ALORS enfin QUE le juge doit en toutes circonstances faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; qu'en relevant d'office, sans inviter préalablement les parties à présenter leurs observations, le moyen tiré de ce que le versement de l'indemnité spéciale de licenciement était alternative à l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, quand ni l'employeur ni le salarié n'ont jamais discuté de cette argumentation devant les juges du fond, la cour d'appel, qui a soulevé ce moyen d'office, sans avoir préalablement recueilli les observations des parties à cet égard, a violé l'article 16 du code de procédure civile.
Moyen produit par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils, pour M. [W], demandeur au pourvoi n° Q 21-19.371

M. [W] fait grief à l'arrêt attaqué de l'AVOIR débouté de sa demande d'indemnité supplémentaire conventionnelle de licenciement ;

1) ALORS d'abord QU'à l'occasion de l'interprétation des stipulations des accords ou conventions collectives, les juges sont tenus de respecter la lettre du dispositif conventionnel ; que l'accord collectif d'entreprise du 26 février 2016 prévoyait expressément qu'« en toute hypothèse, que le salarié signe ou non la transaction, il conserve le bénéfice de l'ensemble des autres dispositions prévues par le PSE auxquels il est éligible, pour ce qui concerne tant les mesures de reclassement externe que les autres indemnités prévues par le PSE » ; qu'ainsi l'accord collectif prévoyait un rapport de complémentarité entre le PSE et l'accord collectif, sans aucune substitution de l'un à l'autre ; qu'il s'en déduisait donc simplement que les garanties fixées par l'accord, qui ne pouvaient être privatives du bénéfice du PSE, demeuraient en tout état de cause applicables, quel que soit le contenu du PSE ; qu'en considérant cependant que l'accord du 26 février 2016 était un accord anticipant un futur plan de sauvegarde de l'emploi et qu'il convenait avec les partenaires syndicaux des mesures d'accompagnement qui devraient y figurer obligatoirement, que le plan de sauvegarde de l'emploi, qui avait été adopté de manière conventionnelle, n'avait pas inclus l'indemnité supplémentaire de licenciement, pour en déduire qu'à la lecture de ces deux textes, il apparaissait que l'accord du 26 février 2016 n'était pas applicable indépendamment du plan de sauvegarde de l'emploi, quand le texte de l'accord collectif ne prévoyait pas une substitution de l'accord de PSE aux clauses de l'accord du 26 février 2016, mais un cadre général déterminant le contenu du PSE, la cour d'appel a violé l'accord collectif d'entreprise du 26 février 2016 et l'accord de PSE du 26 mai 2016 ;

2) ALORS ensuite QUE l'objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties, qui sont fixées par l'acte introductif d'instance et par les conclusions en défense ; que le juge doit se prononcer sur tout ce qui est demandé et seulement sur ce qui est demandé ; que pour débouter le salarié de sa demande d'indemnité supplémentaire conventionnelle de licenciement, la cour d'appel a considéré que l'accord du 26 février 2016 prévoyait la signature d'un accord transactionnel avec le salarié qui, s'il acceptait l'indemnité supplémentaire, devait renoncer à contester son licenciement, que l'accord passé entre l'employeur et les partenaires syndicaux s'analysait donc en une possibilité alternative d'obtenir soit une indemnité supplémentaire de licenciement excluant l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, soit une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse excluant l'indemnité supplémentaire, pour en déduire que le salarié ne pouvait prétendre à la fois à l'une et l'autre de ces indemnités ; qu'en statuant ainsi, alors que ni l'employeur ni le salarié n'ont jamais soutenu que le versement de l'indemnité spéciale de licenciement était alternative à l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, la cour d'appel a dénaturé l'objet du litige en violation des dispositions des articles 4 et 5 du Code de procédure civile ;

3) ALORS enfin QUE le juge doit en toutes circonstances faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; qu'en relevant d'office, sans inviter préalablement les parties à présenter leurs observations, le moyen tiré de ce que le versement de l'indemnité spéciale de licenciement était alternative à l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, quand ni l'employeur ni le salarié n'ont jamais discuté de cette argumentation devant les juges du fond, la cour d'appel, qui a soulevé ce moyen d'office, sans avoir préalablement recueilli les observations des parties à cet égard, a violé l'article 16 du code de procédure civile. Moyen produit par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils, pour M. [Y], demandeur au pourvoi n° R 21-19.372

M. [Y] fait grief à l'arrêt attaqué de l'AVOIR débouté de sa demande d'indemnité supplémentaire conventionnelle de licenciement ;

1) ALORS d'abord QU'à l'occasion de l'interprétation des stipulations des accords ou conventions collectives, les juges sont tenus de respecter la lettre du dispositif conventionnel ; que l'accord collectif d'entreprise du 26 février 2016 prévoyait expressément qu'« en toute hypothèse, que le salarié signe ou non la transaction, il conserve le bénéfice de l'ensemble des autres dispositions prévues par le PSE auxquels il est éligible, pour ce qui concerne tant les mesures de reclassement externe que les autres indemnités prévues par le PSE » ; qu'ainsi l'accord collectif prévoyait un rapport de complémentarité entre le PSE et l'accord collectif, sans aucune substitution de l'un à l'autre ; qu'il s'en déduisait donc simplement que les garanties fixées par l'accord, qui ne pouvaient être privatives du bénéfice du PSE, demeuraient en tout état de cause applicables, quel que soit le contenu du PSE ; qu'en considérant cependant que l'accord du 26 février 2016 était un accord anticipant un futur plan de sauvegarde de l'emploi et qu'il convenait avec les partenaires syndicaux des mesures d'accompagnement qui devraient y figurer obligatoirement, que le plan de sauvegarde de l'emploi, qui avait été adopté de manière conventionnelle, n'avait pas inclus l'indemnité supplémentaire de licenciement, pour en déduire qu'à la lecture de ces deux textes, il apparaissait que l'accord du 26 février 2016 n'était pas applicable indépendamment du plan de sauvegarde de l'emploi, quand le texte de l'accord collectif ne prévoyait pas une substitution de l'accord de PSE aux clauses de l'accord du 26 février 2016, mais un cadre général déterminant le contenu du PSE, la cour d'appel a violé l'accord collectif d'entreprise du 26 février 2016 et l'accord de PSE du 26 mai 2016 ;

2) ALORS ensuite QUE l'objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties, qui sont fixées par l'acte introductif d'instance et par les conclusions en défense ; que le juge doit se prononcer sur tout ce qui est demandé et seulement sur ce qui est demandé ; que pour débouter le salarié de sa demande d'indemnité supplémentaire conventionnelle de licenciement, la cour d'appel a considéré que l'accord du 26 février 2016 prévoyait la signature d'un accord transactionnel avec le salarié qui, s'il acceptait l'indemnité supplémentaire, devait renoncer à contester son licenciement, que l'accord passé entre l'employeur et les partenaires syndicaux s'analysait donc en une possibilité alternative d'obtenir soit une indemnité supplémentaire de licenciement excluant l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, soit une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse excluant l'indemnité supplémentaire, pour en déduire que le salarié ne pouvait prétendre à la fois à l'une et l'autre de ces indemnités ; qu'en statuant ainsi, alors que ni l'employeur ni le salarié n'ont jamais soutenu que le versement de l'indemnité spéciale de licenciement était alternative à l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, la cour d'appel a dénaturé l'objet du litige en violation des dispositions des articles 4 et 5 du Code de procédure civile ;

3) ALORS enfin QUE le juge doit en toutes circonstances faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; qu'en relevant d'office, sans inviter préalablement les parties à présenter leurs observations, le moyen tiré de ce que le versement de l'indemnité spéciale de licenciement était alternative à l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, quand ni l'employeur ni le salarié n'ont jamais discuté de cette argumentation devant les juges du fond, la cour d'appel, qui a soulevé ce moyen d'office, sans avoir préalablement recueilli les observations des parties à cet égard, a violé l'article 16 du code de procédure civile.