Jurisprudence à la loupe

Cass.soc., 15 janvier 2025, n° 23-10.060

Contingent / Convention collective / Application / Heures supplémentaires

Aux termes de l'article 2 B de la loi n° 2003-47 du 17 janvier 2003, les contingents conventionnels d'heures supplémentaires négociés, en application du deuxième alinéa de l'article L. 212-6 du Code du travail, antérieurement à la date de publication de la présente loi reçoivent plein effet en matière d'ouverture du droit à repos compensateur obligatoire, dans la limite du contingent réglementaire prévu au premier alinéa du même article. Fait l'exacte application de la loi la Cour d'appel qui a décidé qu'en vertu de l'article 2 B de la loi n° 2003-47 du 17 janvier 2003 le contingent d'heures supplémentaires ouvrant droit à repos compensateurs négociés antérieurement à la date de publication de cette loi continuait à être fixé par l'article 12, b), de la convention collective nationale des transports routiers et activités annexes du transport du 21 décembre 1950 après l'entrée en vigueur de la loi n° 2008-789 du 20 août 2008, en l'absence de nouvelles dispositions conventionnelles.

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Cass.soc., 15 janvier 2025, n° 23-15.239

Travail à temps partagé / Requalification

Le recours au travail à temps partagé a pour objet la mise à disposition d'un salarié par une entreprise de travail à temps partagé au bénéfice d'un client utilisateur pour l'exécution d'une mission. Chaque mission donne lieu à la conclusion : 1° D'un contrat de mise à disposition entre l'entreprise de travail à temps partagé et le client utilisateur dit « entreprise utilisatrice » ; 2° D'un contrat de travail, dit « contrat de travail à temps partagé », entre le salarié et son employeur, l'entreprise de travail à temps partagé. Aux termes de l'article L. 1252-2 du même Code, est un entrepreneur de travail à temps partagé toute personne physique ou morale dont l'activité exclusive, nonobstant les dispositions de l'article L. 8241-1, est de mettre à disposition d'entreprises utilisatrices du personnel qualifié qu'elles ne peuvent recruter elles-mêmes en raison de leur taille ou de leurs moyens. Les salariés mis à disposition le sont pour des missions qui peuvent être à temps plein ou à temps partiel. Il en résulte que l'entreprise de travail à temps partagé qui ne respecte pas les dispositions de l'article L. 1252-2 du Code du travail se place hors du champ d'application du travail à temps partagé et se trouve liée au salarié par un contrat de droit commun à durée indéterminée.

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Cass.soc., 15 janvier 2025, n° 23-11.765

Prescription / Coemploi

L'action visant à la reconnaissance d'une situation de coemploi revêt le caractère d'une action personnelle et relève de la prescription de l'article 2224 du Code civil. Lorsque la situation de coemploi a été révélée au salarié par la découverte d'une fraude, le point de départ de ce délai est la date à laquelle celui qui exerce l'action a connu ou aurait dû connaître les faits, révélant l'existence de la fraude, lui permettant d'exercer son droit. Ce point de départ est également applicable aux actions relatives aux demandes salariales et indemnitaires consécutives à la reconnaissance d'une situation de coemploi, lesquelles sont soumises au délai de prescription déterminé par la nature de la créance invoquée.

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Cass.soc., 15 janvier 2025, n° 23-20.168

Travail temporaire / Délai de carence / Requalification

L'entreprise de travail temporaire ne peut conclure avec un même salarié sur le même poste de travail, à défaut de stipulation contraire dans la convention ou l'accord de branche conclu en application de l'article L. 1251-37, des contrats de missions successifs sans respect d'un délai de carence qu'à la condition que chaque contrat en cause soit conclu pour l'un des motifs limitativement énumérés par le second de ces textes, au nombre desquels figure la réalisation de travaux urgents nécessités par des mesures de sécurité mais ne figure pas l'accroissement temporaire d'activité.

Doit en conséquence être cassé l'arrêt qui, après avoir constaté que les contrats de mission établis par l'entreprise de travail temporaire mentionnaient le motif d'un accroissement temporaire d'activité et n'avaient pas été conclus pour la réalisation de travaux urgents nécessités par des mesures de sécurité, rejette la demande du salarié tendant à faire prononcer la requalification de ses contrats de mission en contrat à durée indéterminée, au motif que le non-respect des délais de carence ne constitue nullement une cause de requalification des contrats de mission en un contrat de travail à durée indéterminée, alors que le respect du délai de carence prévu par l'article L. 1251-36 du Code du travail s'imposait et que faute pour l'entreprise de travail temporaire de l'avoir observé elle avait failli aux obligations qui lui étaient propres.

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Cass.soc., 15 janvier 2025, n° 23-13.980

Convention collective / Activité / CDD / Rugby

Viole la loi, la Cour d'appel qui examine les conditions d'homologation du contrat de travail à durée déterminée au regard de la convention collective du rugby professionnel, alors qu'elle avait constaté que, à la date de prise d'effet du contrat, le club de rugby n'évoluait plus dans le championnat professionnel PRO D2 relevant de la ligue nationale de rugby, mais dans le championnat amateur Fédérale 1, de sorte que la relation de travail était soumise au statut du joueur de Fédérale 1.

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Cass.soc., 15 janvier 2025, n° 23-14.765

Trajet / Temps de travail effectif / Lieu de travail

Fait l'exacte application de la loi la Cour d'appel qui, ayant constaté qu'à la suite du déménagement de l'entreprise cliente, l'employeur avait pris la décision de déplacer le lieu de prise de service, de l'ancien vers le nouveau lieu d'établissement de l'entreprise cliente, et fait ressortir que ce site constituait le lieu de rattachement concret du conducteur, a décidé que les trajets entre le domicile et le lieu de prise en charge du véhicule ne constituaient pas du temps de travail effectif.

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Cass.soc., 8 janvier 2025, n° 23-19.403

Expertise / Objet / UES / Unité économique et social

Une UES demande l'annulation de la délibération désignant un expert-comptable pour assister le comité central en vue des consultations. L'expertise à laquelle le comité social et économique peut décider de recourir en application de l'article L. 2315-88 du Code du travail en vue de la consultation annuelle sur la situation économique et financière de l'entreprise ne peut porter que sur l'année qui fait l'objet de la consultation et les deux années précédentes ainsi que sur les éléments d'information relatifs à ces années.

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Cass.soc., 8 janvier 2025, n° 23-15.957

Obligation de sécurité / Harcèlement / Alerte

Après avoir écarté l'existence du harcèlement moral allégué, et en l'absences d'autres circonstances, la Cour d'appel a pu conclure à l'absence de manquement de l'employeur à son obligation de sécurité. Les courriers dénonçant des difficultés relationnelles ne pouvaient pas être considérés comme des alertes.

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Cass.soc., 8 janvier 2025, n° 22-24.798

Avantage / Cumul

Les avantages ayant le même objet ou la même cause ne peuvent, sauf stipulations contraires, se cumuler, le plus favorable d'entre eux pouvant seul être accordé.

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Cass.soc., 8 janvier 2025, n° 23-17.995

Rémunération variable / Objectif / Salarié protégé

Un salarié, titulaire d'un mandat de conseiller prud'homme, reproche à son employeur une réduction de sa rémunération variable en raison de son statut de salarié protégé et de ses absences. La rémunération variable dépendait des résultats du sondage de satisfaction de son équipe et le salarié n'effectuait pas toutes ses fonctions, de sorte que les objectifs avaient été précisés et reposaient sur des critères indépendants de la volonté de l'employeur.

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Cass.soc., 8 janvier 2025, n° 23-19.996

Obligation de sécurité / Harcèlement / Qualification

Un salarié licencié pour faute grave reproche à son employeur un harcèlement moral et un manquement de ce dernier à son obligation de sécurité. Bien que le salarié n’ait pas qualifié les faits de harcèlement, il les avait signalés à son employeur et celui-ci a eu comme réaction de licencier le salarié. Le respect par l'employeur de son obligation de sécurité n'est pas caractérisé.

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Cass.soc., 8 janvier 2025, n°22-24.797

Avantage / Objet

En cas de concours de conventions collectives ou d'accords collectifs, les avantages ayant le même objet ou la même cause ne peuvent, sauf stipulations contraires, se cumuler, le plus favorable d'entre eux pouvant seul être accordé. Viole dès lors l'article L.2254-1 du Code du travail la cour d'appel qui décide que les dispositions des accords du 23 juillet 2010, respectivement signés par la société Enedis et par la société GRDF, sont applicables à tous les salariés des unités opérationnelles nationales concernés par le projet de transformation des activités communes, qu'ils fassent ou non partie d'équipes constituées, alors que les avantages conventionnels ayant le même objet ne peuvent, sauf stipulations contraires, se cumuler et qu'il résultait de ses constatations que l'unité opérationnelle nationale ressources humaines faisait partie du service commun Enedis-GRDF et que les stipulations des deux accords collectifs étaient identiques, de sorte que les dispositions des articles 4.3 et 4.7 des accords, à l'égard des salariés du service commun Enedis-GRDF, avaient le même objet.

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Cass.soc., 8 janvier 2025, n°24-11.781

Election du CSE / Liste / Egalité homme femme

Si l'article L.2314-30 du Code du travail, d'ordre public absolu, dispose que pour chaque collège électoral, les listes mentionnées à l'article L.2314-29 qui comportent plusieurs candidats sont composées d'un nombre de femmes et d'hommes correspondant à la part de femmes et d'hommes inscrits sur la liste électorale et les listes composées alternativement d'un candidat de chaque sexe jusqu'à épuisement des candidats d'un des sexes, il n'impose pas de position ou d'ordre pour l'alternance des candidats. Il en résulte qu'un protocole préélectoral ne peut imposer de position ou d'ordre d'alternance aux organisations syndicales.

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Cass.soc., 8 janvier 2025, n°23-11.417

AGS / Résiliation judiciaire

L'assurance mentionnée à l'article L. 3253-6 du Code du travail couvre les créances impayées résultant de la rupture d'un contrat de travail, lorsque le salarié obtient la résiliation judiciaire de celui-ci en raison de manquements suffisamment graves de son employeur empêchant la poursuite dudit contrat et que la rupture intervient pendant l'une des périodes visées à l'article L. 3253-8, 2°, du même code.

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Cass.soc., 8 janvier 2025, n°22-24.724

Reclassement / Critère

L'employeur doit indiquer dans la liste des postes disponibles mise à disposition des salariés concernés, les critères de départage arrêtés afin de pouvoir identifier le salarié retenu, sur des bases objectives, en cas de candidatures multiples pour un même poste. A défaut de cette mention, l'offre est imprécise en ce qu'elle ne donne pas les éléments d'information de nature à donner aux salariés les outils de réflexion déterminant leur décision, ce qui caractérise un manquement de l'employeur à son obligation de reclassement et prive le licenciement de cause réelle et sérieuse

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Cass.soc., 18 décembre 2024, n°23-11.769

Temps partiel / Requalification / Horaire / Prise d’acte / Démission

Un salarié, engagé par deux sociétés avec deux contrats de travail à temps partiel, fait une prise d'acte. Lorsque la prise d'acte de la rupture du contrat de travail produit les effets d'une démission, le salarié est redevable de l'indemnité compensatrice de préavis. Il demande la requalification d'un contrat à temps partiel en contrat à temps plein. Ne recevant pas son horaire de travail, bien que l'addition des temps des deux contrats corresponde à un temps plein, le salarié n'était pas en mesure de prévoir son rythme de travail.

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Cass.soc., 18 décembre 2024, n°23-12.995

Rémunération / Contrat de travail

Une clause du contrat de travail peut prévoir une variation de la rémunération du salarié dès lors qu'elle est fondée sur des éléments objectifs indépendants de la volonté de l'employeur et ne fait pas porter le risque d'entreprise sur le salarié. Si l'employeur peut à tout moment modifier le barème des commissions, la variation de la rémunération dépend de la seule volonté de l'employeur.

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Cass.soc., 18 décembre 2024, n°23-11.507

Inaptitude / Résiliation judiciaire

L'employeur n'avait pas repris, à l'expiration du délai d'un mois à compter de l'avis d'inaptitude jusqu'au licenciement, le paiement du salaire. Il s'agit d'un manquement suffisamment grave justifiant la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de l'employeur.

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Cass.soc., 18 décembre 2024, n°23-19.664

Résiliation judiciaire / Délai

A la suite d'une réorganisation, un salarié voit sa rémunération réduite sans avoir donné son accord. Il demande une résiliation judiciaire après 2 ans. La Cour d'appel juge les manquements de l'employeur suffisamment anciens, permettant la poursuite du contrat de travail. La Cour de cassation estime que le Juge doit rechercher si les manquements sont suffisamment graves pour empêcher la poursuite du contrat de travail et ne pas se référer uniquement à l'ancienneté.

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Cass.soc., 18 décembre 2024, n°23-13.531

Clause de mobilité / Validité

La clause de mobilité, qui envisageait notamment une mobilité au sein des filiales, ne définissait pas de façon précise sa zone géographique d'application. Le licenciement en application d'une clause nulle ne repose pas sur une cause réelle et sérieuse.

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Cass.soc., 18 décembre 2024, n°23-14.847

Rémunération / Réorganisation / Sauvegarde de la compétitivité / Modification du contrat

La réorganisation de l'entreprise constitue un motif économique autonome de licenciement. La lettre de licenciement, qui fait mention du refus d'une modification du contrat de travail consécutive à une réorganisation de l'entreprise est suffisamment motivée. Une entreprise invoque un changement de réglementation pour modifier la structure de rémunération de l'ensemble des salariés constituant une réorganisation de l'entreprise. Le Juge doit vérifier si cette réorganisation était justifiée par des difficultés économiques ou destinée à sauvegarder sa compétitivité.

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Cass.soc., 18 décembre 2024, n°23-19.381

Clause de non-concurrence / Obligation

La perte du droit à l'indemnité de non-concurrence ne vaut que pour l'avenir et qu'à compter du jour où la violation de l'obligation de non-concurrence a été constatée. Le salarié qui viole, même momentanément l'obligation de non-concurrence, perd son droit à indemnité et doit rembourser les sommes versées à ce titre.

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Cass.soc., 18 décembre 2024, n°23-16.280

Invalidité / Reclassement / Visite de reprise

Un salarié en arrêt de travail pour maladie informe son employeur de son classement en invalidité. Il reproche à son employeur l'exécution déloyale du contrat de travail en l'absence de reclassement. La Cour d'appel juge que le reclassement ne peut intervenir pendant l'arrêt de travail et avant la visite de reprise. La Cour de cassation juge que dès lors que le salarié informe son employeur de son classement en invalidité de deuxième catégorie sans manifester la volonté de ne pas reprendre le travail, il appartient à celui-ci de prendre l'initiative de faire procéder à une visite de reprise, laquelle met fin à la suspension du contrat de travail.

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Cass.soc., 18 décembre 2024, n°23-13.603

Accident de trajet / Accident du travail

Un salarié victime d'un accident de trajet demande l'application d'une clause de sa convention collective prévoyant une indemnité en cas d'accident du travail. La Cour de cassation juge que, pour ce texte, l'accident de trajet ne se confond pas avec l'accident du travail.

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Cass.soc., 11 décembre 2024, n°23-18.987

Plan de sauvegarde de l'emploi / Accord collectif

Le Juge judiciaire ne peut, sans violer le principe de séparation des pouvoirs, en l'état d'une décision de validation d'un accord collectif majoritaire fixant le plan de sauvegarde de l'emploi devenue définitive, apprécier la légalité des mesures figurant dans ce plan et déterminant les catégories professionnelles concernées par le licenciement. Il appartient à l'autorité administrative sous le contrôle du Juge administratif de vérifier si les stipulations de l'accord collectif majoritaire qui déterminent les catégories professionnelles sont entachées de nullité, en raison notamment de ce qu'elles revêtiraient un caractère discriminatoire.

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