Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 6 juin 2018, 17-13.449, Inédit

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Résumé

Apport de la jurisprudence : Demande en référé de réintégration et de paiement d'indemnité

Le refus d'autorisation du licenciement de la salariée était confirmé, ce dont elle aurait dû déduire l'absence de contestation sérieuse s'agissant des demandes de provisions au titre des sommes dues en application de l'article L. 2422-4 du code du travail.

07/06/2018 - N° de pourvoi :17-13449

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :



Sur le moyen unique

Vu les articles L2422-4 et R1555-7 du code du travail ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme Z..., salariée de la société opérateur public régional de formation de la région de Guyane (OPRF), a été licenciée le 4 juin 2015, à la suite d'une autorisation délivrée par l'inspecteur du travail le 25 mai 2015 ; que le 2 octobre 2015 le ministre du travail a annulé la décision d'autorisation du licenciement et a refusé l'autorisation de licencier la salariée ; que le 9 juin 2016, le tribunal administratif a annulé la décision de refus du ministre du travail ; que le ministre du travail, saisi à nouveau à la suite de la décision du tribunal administratif, a, par décisions des 18 août et 22 septembre 2016, refusé à nouveau l'autorisation de licenciement ; que la salariée a demandé en référé sa réintégration ainsi que le paiement de diverses sommes et rappels de salaire pour la période s'étant écoulée entre la rupture de son contrat de travail et sa réintégration effective ;

Attendu que pour dire n'y avoir lieu à référé sur les demandes de la salariée au titre des salaires et primes dûs à compter du 16 septembre 2015 et jusqu'à la date effective de sa réintégration, la cour d'appel énonce que cette demande qui n'est pas formée à titre provisionnel, échappe de facto à la compétence du juge des référés ; en outre et à titre superfétatoire, cette demande se heurte à des contestations sérieuses dès lors que la décision de refus d'autorisation du ministre du travail en date du 2 octobre 2015 ayant donné lieu à l'obligation de réintégration de Mme Z... au sein de l'OPRF a été suspendue par ordonnance de référé du juge du tribunal administratif du 30 novembre 2015 ; toutefois si cette suspension a pris fin le 9 juin 2016, force est de relever que cette décision a été annulée par le tribunal administratif de sorte qu'elle ne pouvait être exécutée ; dès lors, cette demande échappe manifestement à la compétence du juge des référés ;

Qu'en statuant ainsi, alors qu'elle avait constaté qu'à la date où elle statuait, le refus d'autorisation du licenciement de la salariée était confirmé, ce dont elle aurait dû déduire l'absence de contestation sérieuse s'agissant des demandes de provisions au titre des sommes dues en application de l'article L2422-4 du code du travail, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a dit n'y avoir lieu à référé sur les demandes de provision au titre des salaires et avantages pour la période allant du 16 septembre 2015 à sa réintégration, l'arrêt rendu le 28 novembre 2016, entre les parties, par la cour d'appel de Cayenne ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Fort-de-France ;

Condamne l'établissement Opérateur public régional de formation de la région de Guyane aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne l'établissement Opérateur public régional de formation de la région de Guyane à payer à Mme Z... la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du six juin deux mille dix-huit. MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat aux Conseils, pour Mme Z...

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit n'y avoir lieu à référé sur les demandes de Mme Z... au titre des salaires et avantages à compter du 16 septembre 2015 et ce jusqu'à la date effective de sa réintégration, et de l'avoir condamnée en application de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens ;

AUX MOTIFS QUE cette demande qui n'est pas formée à titre provisionnel, échappe de facto à la compétence du juge des référés ; en outre et à titre superfétatoire, cette demande se heurte à des contestations sérieuses dès lors que la décision de refus d'autorisation du Ministre du travail en date du 02/10/2015 ayant donné lieu à l'obligation de réintégration de Madame Z... Y... au sein de l'OPRF a été suspendue par ordonnance de référé du juge du tribunal administratif du 30/11/2015; toutefois si cette suspension a pris fin le 09/06/2016, force est de relever que cette décision a été annulée par le tribunal administratif de sorte qu'elle ne pouvait être exécutée ; dès lors, cette demande échappe manifestement à la compétence du juge des référés ;

ALORS QUE le juge doit observer le principe du contradictoire et ne peut fonder sa décision sur les moyens de droit qu'il a relevés d'office sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations ; que la cour d'appel a retenu que la demande portant sur les salaires n'était pas formée à titre provisionnel et échappait de facto à la compétence du juge des référés ; qu'en soulevant ce moyen d'office sans inviter préalablement les parties à présenter leurs observations, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile ;

2° Et ALORS QUE dès lors que le principe même de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, une provision doit être allouée, même si le montant de l'obligation peut être encore sujet à controverse ; que l'employeur a expressément indiqué qu'un rappel de salaire allait être versé à la salariée ; qu'en considérant que la demande se heurtait à des contestations sérieuses, quand l'obligation n'était pas contestée, la cour d'appel a violé l'article R1455-7 du code du travail ;

3° ALORS, encore, QUE l'annulation de l'autorisation administrative de licenciement par l'autorité hiérarchique ne laisse rien subsister de celle-ci, peu important l'annulation ultérieure par la juridiction administrative de la décision de l'autorité hiérarchique ; que la cour d'appel constaté que l'autorisation de licenciement délivrée par l'inspecteur du travail a été annulée par le Ministre du travail qui a refusé d'autoriser le licenciement le 02/10/2015, décision suspendue par ordonnance de référé du juge du tribunal administratif du 30/11/2015 ; que cette suspension a pris fin le 09/06/2016, la décision du ministre ayant à cette date été annulée par le tribunal administratif ; que les 18 août et 22 septembre 2016, l'autorisation de licenciement a été refusée ; qu'ainsi l'employeur n'a bénéficié d'aucune autorisation de licenciement à compter du 2 octobre 2015 ; qu'en statuant comme elle l'a fait, quand l'annulation de l'autorisation administrative de licenciement par l'autorité hiérarchique ne laissait rien subsister de celle-ci, peu important l'annulation ultérieure par la juridiction administrative de la décision de l'autorité hiérarchique, ce dont il résultait que la salariée était en droit d'obtenir sa réintégration et le paiement d'un rappel de salaires à compter du licenciement, la cour d'appel a violé les articles L 2422-1 et R 1555-7 du code du travail.