Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 15 juin 2018, 17-14.395, Inédit

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Résumé

Apport de la jurisprudence : Procédure abusive

un même contrat à temps partiel d'un salarié peut concerner plusieurs sociétés différentes sans quand les deux sociétés soient nécessairement condamnées pour licenciement sans cause réelle et sérieuse. En l'espèce, la salarié avait saisi simultanément le conseil de prud'hommes de Créteil ainsi que le conseil de prud'hommes de Paris sans jamais se justifier sur le transfert de son contrat entre les deux sociétés.

15/06/2018 - N° de pourvoi: 17-14395

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :



Sur le moyen unique :

Attendu selon l'arrêt attaqué (Paris,01 mars 2016), que Mme Z... a été engagée à compter du 16 avril 2007 par la société de logistique en sécurité et incendie (SLSI) suivant contrat de travail non écrit à durée indéterminée à temps partiel, pour 15 à 22 heures de travail hebdomadaire, en qualité d'agent d'exploitation niveau II.1, coefficient 110 ; que la même salariée a été engagée par la société International sécurité management (ISM) à compter du 1er février 2010, suivant contrat de travail non écrit à durée indéterminée à temps partiel d'une durée de 20 heures par semaine, aux mêmes fonctions ; que par acte du 28 mars 2014, Mme Z... a saisi la juridiction prud'homale afin d'obtenir le prononcé de la résiliation judiciaire du contrat de travail, la société ISM ayant cessé de lui fournir du travail depuis le mois de janvier 2014 ; que par un jugement du 30 avril 2015, le conseil des prud'hommes a fait droit aux demandes de la salariée ; que par un jugement définitif du 16 septembre 2015, le conseil des prud'hommes de Paris, également saisi aux fins de prononcé de la résiliation judiciaire du contrat de travail conclu avec la société SLSI, a fait droit aux demandes de la salariée et a condamné cette société au paiement des indemnités dues au titre d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse et des salaires dus depuis le mois de février 2010 ;

Attendu que la salariée fait grief à l'arrêt de rejeter ses demandes, alors, selon le moyen :

1°/ alors que la seule circonstance qu'une partie se contredirait au détriment d'autrui n'emporte pas nécessairement fin de non-recevoir ; que l'action de Mme Z... contre la société ISM n'opposait pas les mêmes parties que celle menée contre la société SLSI et n'avait pas le même objet ; qu'en déclarant Mme Z... irrecevable à agir contre la société ISM, faute d'intérêt à agir, dès lors que le conseil de prud'hommes de Paris avait, conformément à sa demande, retenu que la société SLSI ne pouvait pas se prévaloir de l'article L1224-1 du code du travail, prononcé la résiliation judiciaire du contrat de travail et condamné cette dernière au paiement de salaires et indemnités pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, la cour d'appel a violé l'article 122 du code de procédure civile, ensemble le principe de « l'Estoppel » par fausse application ;

2°/ alors que les termes du litige sont fixés par les prétentions respectives des parties ; que dans ses conclusions d'appel, Mme Z... , loin d'invoquer un transfert légal ou conventionnel du contrat de travail qui la liait à la société SLSI à la société ISM en application de l'article L. 1224-1 du code du travail, soutenait que cette dernière société l'avait engagée, par contrat à durée indéterminée, oral, à temps partiel à effet du 1er février 2010 et donc qu'il s'agissait d'un contrat de travail à temps partiel distinct du contrat de travail à temps partiel conclu le 16 avril 2007 avec la société SLSI ; qu'en énonçant néanmoins que Mme Z... ne s'expliquait pas sur l'absence de transfert de son contrat de travail ni sur la condamnation de la société SLSI à lui payer des rappels de salaires et indemnités pour la rupture abusive de son contrat de travail qui lui aurait interdit de solliciter la résiliation judiciaire de celui la liant à la société ISM et de solliciter à l'encontre de cette dernière le paiement de rappels de salaires et d'indemnités pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse, la cour d'appel a dénaturé les conclusions de la salariée, violant les articles 4 du code de procédure civile et 1134 ancien du code civil, devenu l'article 1192 nouveau du même code ;

Mais attendu qu'ayant constaté, hors toute dénaturation et abstraction faite du motif surabondant critiqué par la première branche, que le même contrat de travail à temps partiel s'était poursuivi au sein de la société SLSI, la cour d'appel n'encourt aucun des griefs du moyen ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne Mme Z... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile rejette la demande ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quinze juin deux mille dix-huit. MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Ghestin, avocat aux Conseils, pour Mme Z...

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR dit qu'à la suite du jugement du conseil de prud'hommes de Paris rendu le 16 septembre 2015 ayant prononcé la résiliation judiciaire du contrat de travail ayant lié Mme Z... à la société SLSI et ayant alloué à la salariée diverses sommes pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, elle n'avait pas d'intérêt à agir contre la société ISM en résiliation judiciaire de son contrat de travail avec cette société et en paiement de diverses sommes pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse et de l'AVOIR en conséquence déboutée de l'ensemble de ses demandes et condamnée à payer à la société ISM la somme de 2 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

AUX MOTIFS QUE la société ISM établit qu'à la demande de Mme Z... l'ayant saisi le même jour que le conseil de prud'hommes de Créteil, le conseil de prud'hommes de Paris, par jugement dont il n'est pas contesté qu'il soit irrévocable en date du 16 septembre 2015, a jugé que la société SLSI avait toujours été l'employeur de Mme Z... depuis le 16 avril 2007 ;

que, conformément à la position défendue par Mme Z... , le conseil de prud'hommes de Paris a jugé que la société SLSI ne pouvait se prévaloir de l'article L. 1224-1 du code du travail ;

que Mme Z... n'avait pas démissionné et n'avait ni été licenciée et qu'ainsi son contrat de travail s'était poursuivi au sein de la société SLSI ;

que par suite, le conseil de prud'hommes de Paris a constaté la résiliation judiciaire du contrat de travail à la date du 16 septembre 2015 et a condamné la société SLSI au paiement de salaires jusqu'à cette date outre les indemnités pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

que dès lors, Mme Z... qui ne s'explique pas sur ce point dans ses conclusions, n'a pas d'intérêt à agir contre la société ISM ;

que par conséquent, le jugement sera infirmé et Mme Z... déboutée de l'ensemble de ses demandes ;

qu'il n'apparaît pas équitable que la société ISM conserve la charge de ses frais irrépétibles ;

1°) ALORS QUE la seule circonstance qu'une partie se contredirait au détriment d'autrui n'emporte pas nécessairement fin de non-recevoir ; que l'action de Mme Z... contre la société ISM n'opposait pas les mêmes parties que celle menée contre la société SLSI et n'avait pas le même objet ; qu'en déclarant Mme Z... irrecevable à agir contre la société ISM, faute d'intérêt à agir, dès lors que le conseil de prud'hommes de Paris avait, conformément à sa demande, retenu que la société SLSI ne pouvait pas se prévaloir de l'article L. 1224-1 du code du travail, prononcé la résiliation judiciaire du contrat de travail et condamné cette dernière au paiement de salaires et indemnités pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, la cour d'appel a violé l'article 122 du code de procédure civile, ensemble le principe de « l'Estoppel » par fausse application ;

2°) ALORS QUE les termes du litige sont fixés par les prétentions respectives des parties ; que dans ses conclusions d'appel, Mme Z... , loin d'invoquer un transfert légal ou conventionnel du contrat de travail qui la liait à la société SLSI à la société ISM en application de l'article L. 1224-1 du code du travail, soutenait que cette dernière société l'avait engagée, par contrat à durée indéterminée, oral, à temps partiel à effet du 1er février 2010 (concl. p. 4 al. 3) et donc qu'il s'agissait d'un contrat de travail à temps partiel distinct du contrat de travail à temps partiel conclu le 16 avril 2007 avec la société SLSI ; qu'en énonçant néanmoins que Mme Z... ne s'expliquait pas sur l'absence de transfert de son contrat de travail ni sur la condamnation de la société SLSI à lui payer des rappels de salaires et indemnités pour la rupture abusive de son contrat de travail qui lui aurait interdit de solliciter la résiliation judiciaire de celui la liant à la société ISM et de solliciter à l'encontre de cette dernière le paiement de rappels de salaires et d'indemnités pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse, la cour d'appel a dénaturé les conclusions de la salariée, violant les articles 4 du code de procédure civile et 1134 ancien du code civil, devenu l'article 1192 nouveau du même code.