Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 4 septembre 2019, 18-15.231, Inédit

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Résumé

Apport de la jurisprudence : Licenciement / Faute grave / Troubles pathologiques / Absence de cause réelle et sérieuse

Un salarié, sujet à des antécédents ou troubles pathologiques est licencié pour faute grave. Il conteste son licenciement en soutenant que les faits qui lui sont reprochés constituent un corollaire
de son état de santé dégradant.
La Cour de cassation estime que le lien entre les difficultés professionnelles du salarié et son état de santé n'est pas établi au regard de l'appréciation souveraine des faits et des moyens de preuve opérés par les Juges du fond.

Cass. soc n°18-15231 du 4 septembre 2019

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :



Sur le premier moyen :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Nancy, 14 février 2018), que M. B..., engagé le 1er avril 2005 en qualité d'expert automobile par la société Auto expertise conseil, a été licencié, le 23 avril 2014, pour faute grave ; que soutenant que les faits qui lui étaient reprochés par son employeur étaient en lien avec son état de santé, il a saisi la juridiction prud'homale de demandes au titre d'un licenciement nul, ou à défaut, sans cause réelle et sérieuse ;

Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt de rejeter ses demandes au titre d'un licenciement nul alors, selon le moyen :

1°/ que le licenciement au soutien duquel l'employeur reproche au salarié un comportement ayant pour origine ses troubles pathologiques, est nul ; qu'en se bornant, après avoir relevé que les troubles présentés par M. B... étaient patents, le docteur P... ayant souligné dans son compte-rendu psychiatrique du 22 avril 2014 qu'il avait un rythme verbal particulièrement ralenti, qu'il occupait une position d'épuisement physique et psychique possiblement en relation avec le contexte professionnel, que le conseiller ayant assisté le salarié lors de l'entretien préalable du 27 mars 2014, avait noté qu'il n'était visiblement pas dans un état normal et, qu'antérieurement à la notification du licenciement le 23 avril 2014, l'employeur avait été mis au courant, en sus de la visite médicale du 3 avril 2014 et de l'avis d'inaptitude temporaire pris à cette date, du compte-rendu psychiatrique du docteur P..., à énoncer, pour exclure l'existence d'un lien entre l'état de santé de M. B... et son licenciement, que les faits qui lui étaient reprochés, se situaient entre début janvier et début mars 2014 et étaient antérieurs à son dernier arrêt de travail du 13 mars 2014, sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si les erreurs qui lui étaient reprochées au soutien de son licenciement, n'étaient pas la conséquence de ses troubles pathologiques, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L1132-1 du code du travail ;

2°/ qu'en retenant, pour exclure l'existence d'un lien entre l'état de santé de M. B... et son licenciement, que la seule connaissance par l'employeur des arrêts de travail de M. B... du 22 novembre 2011 au 3 février 2012, du 30 septembre 2012 au 12 octobre 2012 puis du 19 février 2013 au 22 février 2013 sur lesquels le motif ne figurait pas était insuffisant à caractériser qu'il ait pu apprécier l'état de santé du salarié qui, lors de la notification de son licenciement, n'avait pas été en arrêt de travail depuis plus d'un an, tout en constatant qu'antérieurement à la notification du licenciement le 23 avril 2014, l'employeur avait été mis au courant, en sus de la visite médicale du 3 avril 2014 et de l'avis d'inaptitude temporaire, du compte-rendu de l'examen psychiatrique du docteur P... et que le conseiller ayant assisté le salarié lors de l'entretien préalable, avait affirmé qu'il n'était visiblement pas dans un état normal, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations desquelles il résultait que l'employeur avait eu connaissance des troubles pathologiques du salarié avant de lui notifier son licenciement, et a violé l'article L1132-1 du code du travail ;

Mais attendu qu'ayant relevé, par une appréciation souveraine des éléments de fait et de preuve qui lui étaient soumis, qu'il n'était pas établi que les difficultés professionnelles du salarié aient eu pour origine son état de santé, la cour d'appel, qui a accompli la recherche prétendument omise, a, par ces seuls motifs, légalement justifié sa décision ;

Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le second moyen, ci-après annexé, qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. B... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quatre septembre deux mille dix-neuf.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par la SCP Potier de La Varde, Buk-Lament et Robillot, avocat aux Conseils, pour M. B...

PREMIER MOYEN DE CASSATION

M. B... fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir dit que son licenciement pour faute grave prononcé le 24 avril 2013 par la société Auto Expertise Conseil, n'était pas nul et de l'avoir débouté de ses demandes liées à son licenciement ;

AUX MOTIFS QUE sur la nullité du licenciement ; (
) ; qu'en l'espèce, la lettre de licenciement du 23 avril 2014 est motivée comme suit :
« Suite à l'entretien que nous avons eu en nos locaux le 26 mars 2014, nous vous notifions par la présente votre licenciement pour faute grave pour les motifs exposés lors de notre entretien. En effet, depuis de nombreux mois, nous avons attiré votre attention sur le fait que la gestion des dossiers d'expertise qui vous étaient confiés par l'entreprise dénotait un manque d'attention et de rigueur dans la gestion quotidienne de ces dossiers. Afin de vous soulager dans vos tâches, nous avons procédé à un aménagement de vos tournées ainsi que la mise à disposition d'une collaboratrice à votre service quasiment exclusif. Aussi, par courrier du 3 juin 2013, nous avions attiré votre attention sur les difficultés rencontrées et nous vous avions donc adressé un premier avertissement en vous demandant une vive remise en question de votre part en espérant que ces erreurs ne se reproduiraient plus.
Cet avertissement n'a pas fait l'objet de contestation de votre part.
Toutefois, nous vous avons donc convoqué pour un entretien préalable qui s'est tenu le 26 mars 2014, lors duquel nous vous avons exposé nos griefs et avons sollicité vos observations.
De manière récurrente, nous avons pu constater un certain nombre d'anomalies sur les dossiers qui étaient à votre charge (
.).
Il ressort de l'ensemble de ces éléments que nous vous signalons que le manque de suivi récurrent de vos dossiers nous a valu des plaintes de nos différents clients.
Malgré des moyens supplémentaires mis à votre disposition et malgré des facilités qui vous ont été accordées par rapport à vos collègues de travail, nous n'avons noté aucune amélioration dans le traitement de ces dossiers depuis l'avertissement qui vous a été donné le 3 juin 2013.
Bien au contraire, les relevés effectués sur ces derniers mois laissent apparaître une dégradation dans le suivi des dossiers d'expertise qui vous sont confiés.
Cette conduite met en cause la bonne marche de l'entreprise, les explications recueillies auprès de vous au cours de notre entretien, ne nous ont pas permis de modifier notre appréciation à ce sujet.
Nous vous informons que nous avons, en conséquence, décidé de vous licencier pour faute grave compte tenu de la gravité des faits qui vous sont reprochés, votre maintien dans l'entreprise s'avère impossible, le licenciement prend donc effet immédiatement à la date de la première présentation de ce courrier, sans indemnité de préavis, ni indemnité de licenciement. (
) » ; que M. B... a donc été licencié pour faute grave ;
(
) ; qu'en l'espèce, la lettre de licenciement fait mention de plusieurs dossiers dans lesquels des anomalies ont été constatées imputables aux erreurs du salarié ; que la société ajoute que malgré l'avertissement du 3 juin 2013, M. B... a continué à faire de graves erreurs et se prévaut pour le prouver, des plaintes reçues en mars 2014, de la Carrosserie G. R... et de la MAIF ; qu'elle verse aux débats :
- le courrier du 3 mars 2014 de M. R..., carrossier qui travaille en partenariat avec la société Auto Expertise Conseil, par lequel il affirme que «depuis un an, le travail en partenariat avec M. B... devient de plus en plus compliqué via sa nonchalance» et souligne la lenteur avec laquelle il traite les dossiers ; qu'il donne trois exemples de dossiers pour lesquels il a dû relancer la société pour que les dossiers soient clôturés, le dossier Corsa Sarl Nitting où 8 jours après la livraison, le certificat de conformité n'était pas délivré, M. B... ne se souvenant pas avoir essayé le véhicule, ou les dossiers Golf ou BMW où des retards dans le traitement étaient invoqués ;
- le mail de M. K..., conseiller technique régional de la MAIF, qui écrit, le 3 mars 2014, à la société, à propos du dossier "Q... L..." un de leurs sociétaires, afin de critiquer le "manque évident de réactivité de votre cabinet, l'absence de retour d'informations vers les intervenants du dossier ajourés à votre indécision quant aux imputabilités techniques relevant .du sinistre déclaré, pénalisent lourdement notre société, et détériorent l'image du service apporté par la Mutuelle auprès des sociétaires » (
) ;
- les extraits informatiques relatifs au traitement des dossiers visés dans la lettre de licenciement, 1402973, 14020395, 14010888, 14011213, 14020689, 14020371, 14020148, 14010200, 14010592, 14020175, 14020146, 14011238, 14020844, 14020566, 14020930, sur lesquels apparaissent les anomalies reprochées à M. B... ; que contrairement à ce que soutient M. B..., l'ensemble de ces éléments permet de confirmer la matérialité des griefs qui lui sont reprochés ; que M. B... considère cependant que son licenciement est discriminatoire et nul car prononcé en raison de son état de santé, ses erreurs étant en lien avec le bure-out dont il se dit victime ; qu'il rappelle que le licenciement est nul lorsque l'employeur reproche au salarié un comportement qui n'est que la conséquence des troubles pathologiques dont il avait connaissance ; qu'il évoque les dispositions de l'article L1132-1 du code du travail ; qu'il ajoute que l'employeur ne pouvait ignorer la pathologie dont il était atteint, à l'origine des erreurs .commises, rappelant que "son premier arrêt de travail daté du 22 novembre 2011 et qu'il se justifiait par les importantes céphalées dont il souffrait et qui ont diminué ses aptitudes physiques et professionnelles ; qu'il souligne, à cet égard, l'absence de visite de reprise organisée par l'employeur à cette époque ; que pour prouver la connaissance par l'employeur de son état de santé, il fait valoir que celui-ci, dans la lettre de licenciement, reconnaît avoir allégé ses conditions de travail, ce qui constitue l'aveu de la part de l'employeur, de la prise en compte de ses difficultés médicales ; qu'il soutient que son état de santé a continué de se détériorer jusqu'au 13 mars 2014, date à laquelle il a, de nouveau, été en arrêt maladie, avant d'être déclaré temporairement inapte à son poste par avis du médecin du travail du 3 avril 2014 ; qu'il fait état d'arrêts, outre celui du 22 novembre 2011 au 3 février 2012, de celui du 30 septembre 2012 au 12 octobre 2012 puis du 19 février 2013 au 22 février 2013, du 13 mars 2014 au 6 octobre 2014 ; qu'il affirme dans ses écritures que son arrêt de travail s'est alors prolongé jusqu'au 2 janvier 2016 ; qu'il produit également la convocation auprès de la médecine du travail du 27 mars 2014 pour le rendez-vous fixé au 7 avril 2014 qui sera décalé au 3 avril 2014, le mail du 28 mars 2014 par lequel il a transmis cette convocation à l'employeur et l'avis d'inaptitude temporaire, émis par le docteur D... le 3 avri1 2014 ; qu'il produit également le compte-rendu de l'examen psychiatrique, réalisé par le docteur P..., le 22 avril 2014, à la demande du médecin du travail le docteur D..., aux termes duquel le psychiatre conclut que « malgré le caractère étrange, singulier et bizarroïde du comportement, des attitudes développées, des propos, des plaintes et des doléances exprimées par le sujet, il semble bien qu'actuellement M. B... occupe actuellement une position d'épuisement physique et psychique possiblement en relation avec le contexte professionnel auquel il est exposé. Il ne semble pas de surcroît que M. B... parvienne facilement à s'adapter aux évolutions du métier, et en particulier, à l'exigence de réactivité, de productivité et de rapidité d'exécution, de production et déficience maintenant attendus de la part de certains experts et, en particulier, des experts automobiles, objet alors d'une pression non négligeable de la part des compagnies d'assurances, observations négatives dont le sujet peut se trouver d'autant plus facilement la cible qu'il semble plutôt fonctionner habituellement sur un mode relativement ralenti, peu offensif, avec encore plus d'acuité lorsque ses fonctions supérieures et ses capacités intellectuelles se trouvent parasitées par les maux de tête dont il souffre et qui paraissent bien s'inscrire plutôt dans une dynamique de somatisation. Actuellement, M. B... développe des troubles psychopathologiques susceptibles de s'intégrer dans la notion et l'évolution d'un burnout nécessitant le prononcé d'une inaptitude temporaire de l'ordre de trois ou quatre mois » ; que la lecture de ce compte-rendu fait apparaitre que le salarié explique souffrir de céphalées récurrentes depuis 2006 sans que la cause objective ait été trouvée malgré de nombreux examens , qu'il a aussi précisé que son arrêt de travail fin 2011 est en lien avec l'évolution et le développement d'un burnout et que ces maux de tête expliquent les retards qu'il accuse dans l'exécution de son travail ; que ce rapport note aussi que le salarié avait rappelé qu'en 2006, il avait été victime d'une chute à vélo mais qu'il n'avait pas subi de bilan neurologique à la suite de cet accident ; que par mail du 23 avril 2014, M. B... a bien transmis ce compte-rendu à son employeur ; que ces éléments démontrent que l'employeur avait été mis au courant de la visite médicale du 3 avril, de l'avis d'inaptitude temporaire pris à cette date et du rapport du docteur P... antérieurement au licenciement notifié le 23 avril 2014 mais postérieurement à la tenue de l'entretien préalable en date du 27 mars 2014 ; que toutefois l'employeur nie tout lien entre le comportement fautif de M. B... et ses troubles pathologiques ; qu'il convient de relever comme le fait l'employeur, que dans son rapport, le docteur P... note que le salarié a lui-même fait référence à une chute à vélo en 2006 affirmant que cet accident est l'événement ayant déclenché les maux de tête ; que par ailleurs, le rapport reprenant les propres déclarations M. B... indique qu'un suivi psychiatrique lui avait été préconisé à cette époque, mais qu'il n'avait pas voulu le suivre ; qu'il y a lieu aussi de souligner que tout en se plaignant d'un burnout, M. B... ne justifie d'aucune alerte ou dénonciation d'une situation de stress ou d'épuisement par le salarié ; que l'employeur a intenté la procédure de licenciement pour faute grave avant l'avis d'inaptitude temporaire puisque la convocation date du 17 mars et a été reçue le 20 mars 2014 par le salarié, soit avant que la société ait eu connaissance de la convocation de l'intéressé à la médecine du travail qui date du 28 mars 2014 ; que par ailleurs, les faits qui lui sont reprochés se situent entre début janvier et début mars 2014 soit bien avant que la société ait eu connaissance de la convocation à la médecine du travail et de l'avis d'inaptitude temporaire ; que de plus, il y a lieu de relever qu'il n'existe aucun arrêt de travail entre le 23 février 2013 et le 13 mars 2014 soit pendant près d'une année et que les faits qui lui sont reprochés se situent entre son état de santé et son licenciement ; qu'enfin, il y a lieu de relever le fait que le salarié a demandé une convocation à la médecine du travail, le lendemain de la tenue de l'entretien préalable puisque cette visite est notée comme faite à la demande du salarié ; qu'il résulte de l'ensemble de ces éléments que le salarié souffre certes de céphalées depuis 2006 et que ces maux de tête ont donné lieu à un premier arrêt, de travail à compter du 22 novembre 2011 jusqu'au 3 février 2012, suivi d'un second arrêt du 30 septembre 2012 au 12 octobre 2012 et d'un 3ème arrêt du 19 février 2013 au 22 février 2013 ; que toutefois, plus aucun arrêt de travail ne sera alors prescrit jusqu'à celui du 13 mars 2014 ; que la seule connaissance par l'employeur d'arrêts de travail sur lesquels le motif ne figure pas est insuffisant à caractériser qu'il ait pu apprécier l'état de santé de M. B... et ce d'autant plus qu'au moment où la procédure de licenciement est initiée, cela fait plus d'un an qu'il n'a plus bénéficié d'arrêt de travail ; que si l'employeur n'a pas satisfait à son obligation de soumettre le salarié à la visite médicale de reprise après le premier arrêt de travail, ce dernier n'en a pas non plus sollicité avant celle du 3 avril 2014 ni n'a informé son employeur de ses difficultés quant à sa Charge de travail ; que de même, alors qu'il est sanctionné par un avertissement le 3 juin 2013 pour des faits similaires, d'une part, il ne le conteste pas et d'autre part, il n'évoque pas de difficultés médicales à ce moment-là ; que par ailleurs, si l'employeur reconnaît avoir procédé à un allégement du secteur d'activité de M. B... et de ses missions, aucun élément ne permet de retenir que ces mesures aient été dictées par l'état de santé de celui-ci, ou préconisées par le médecin du travail ; qu'enfin, si les troubles présentés par M. B... sont patents, le docteur P... soulignant que l'intéressé avait un rythme verbal particulièrement ralenti, cherchant ses mots... ne comprenant pas le sens des questions posées, et le conseiller ayant assisté le salarié lors de l'entretien, affirmant qu'il n'était visiblement pas dans un état normal, les éléments du dossier ne sont pas suffisants pour démontrer que cet état de santé était lié d'une manière directe et certaine à un burnout professionnel ; qu'en effet, dans ses conclusions, le docteur P... utilise des termes empreints de précaution : « il semble bien qu'actuellement M. B... occupe actuellement une position d'épuisement physique et psychique possiblement en relation avec le contexte professionnel auquel il est exposé » ; qu'il s'ensuit que si les troubles sont avérés, il n'existe pas d'éléments suffisants pour caractériser la réalité d'un burnout en lien direct et certain avec le travail ni pour établir que les difficultés professionnelles aient eu pour origine l'état de santé de l'intéressé ; que dès lors, il n'est pas démontré que le licenciement ait eu pour origine l'état de santé du salarié et ait pu revêtir un caractère discriminatoire ; qu'il convient en conséquence d'infirmer le jugement en ce qu'il a dit le licenciement nul ;

1°) ALORS QUE le licenciement au soutien duquel l'employeur reproche au salarié un comportement ayant pour origine ses troubles pathologiques, est nul ; qu'en se bornant, après avoir relevé que les troubles présentés par M. B... étaient patents, le docteur P... ayant souligné dans son compte-rendu psychiatrique du 22 avril 2014 qu'il avait un rythme verbal particulièrement ralenti, qu'il occupait une position d'épuisement physique et psychique possiblement en relation avec le contexte professionnel, que le conseiller ayant assisté le salarié lors de l'entretien préalable du 27 mars 2014, avait noté qu'il n'était visiblement pas dans un état normal et, qu'antérieurement à la notification du licenciement le 23 avril 2014, l'employeur avait été mis au courant, en sus de la visite médicale du 3 avril 2014 et de l'avis d'inaptitude temporaire pris à cette date, du compte-rendu psychiatrique du docteur P..., à énoncer, pour exclure l'existence d'un lien entre l'état de santé de M. B... et son licenciement, que les faits qui lui étaient reprochés, se situaient entre début janvier et début mars 2014 et étaient antérieurs à son dernier arrêt de travail du 13 mars 2014, sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si les erreurs qui lui étaient reprochées au soutien de son licenciement, n'étaient pas la conséquence de ses troubles pathologiques, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L1132-1 du code du travail ;

2°) ALORS QU'en outre, en retenant, pour exclure l'existence d'un lien entre l'état de santé de M. B... et son licenciement, que la seule connaissance par l'employeur des arrêts de travail de M. B... du 22 novembre 2011 au 3 février 2012, du 30 septembre 2012 au 12 octobre 2012 puis du 19 février 2013 au 22 février 2013 sur lesquels le motif ne figurait pas était insuffisant à caractériser qu'il ait pu apprécier l'état de santé du salarié qui, lors de la notification de son licenciement, n'avait pas été en arrêt de travail depuis plus d'un an, tout en constatant qu'antérieurement à la notification du licenciement le 23 avril 2014, l'employeur avait été mis au courant, en sus de la visite médicale du 3 avril 2014 et de l'avis d'inaptitude temporaire, du compte-rendu de l'examen psychiatrique du docteur P... et que le conseiller ayant assisté le salarié lors de l'entretien préalable, avait affirmé qu'il n'était visiblement pas dans un état normal, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations desquelles il résultait que l'employeur avait eu connaissance des troubles pathologiques du salarié avant de lui notifier son licenciement, et a violé l'article L1132-1 du code du travail.

SECOND MOYEN DE CASSATION

M. B... fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir dit que son licenciement prononcé le 24 avril 2013 par la société Auto expertise Conseil reposait sur une faute grave et de l'avoir débouté de ses demandes liées à son licenciement ;

AUX MOTIFS QUE qu'en l'espèce, la lettre de licenciement du 23 avril 2014 est motivée comme suit :
« Suite à l'entretien que nous avons eu en nos locaux le 26 mars 2014, nous vous notifions par la présente votre licenciement pour faute grave pour les motifs exposés lors de notre entretien. En effet, depuis de nombreux mois, nous avons attiré votre attention sur le fait que la gestion des dossiers d'expertise qui vous étaient confiés par l'entreprise dénotait un manque d'attention et de rigueur dans la gestion quotidienne de ces dossiers. Afin de vous soulager dans vos tâches, nous avons procédé à un aménagement de vos tournées ainsi que la mise à disposition d'une collaboratrice à votre service quasiment exclusif. Aussi, par courrier du 3 juin 2013, nous avions attiré votre attention sur les difficultés rencontrées et nous vous avions donc adressé un premier avertissement en vous demandant une vive remise en question de votre part en espérant que ces erreurs ne se reproduiraient plus.
Cet avertissement n'a pas fait l'objet de contestation de votre part.
Toutefois, nous vous avons donc convoqué pour un entretien préalable qui s'est tenu le 26 mars 2014, lors duquel nous vous avons exposé nos griefs et avons sollicité vos observations.
De manière récurrente, nous avons pu constater un certain nombre d'anomalies sur les dossiers qui étaient à votre charge (
.).
Il ressort de l'ensemble de ces éléments que nous vous signalons que le manque de suivi récurrent de vos dossiers nous a valu des plaintes de nos différents clients.

Malgré des moyens supplémentaires mis à votre disposition et malgré des facilités qui vous ont été accordées par rapport à vos collègues de travail, nous n'avons noté aucune amélioration dans le traitement de ces dossiers depuis l'avertissement qui vous a été donné le 3 juin 2013.
Bien au contraire, les relevés effectués sur ces derniers mois laissent apparaître une dégradation dans le suivi des dossiers d'expertise qui vous sont confiés.
Cette conduite met en cause la bonne marche de l'entreprise, les explications recueillies auprès de vous au cours de notre entretien, ne nous ont pas permis de modifier notre appréciation à ce sujet.
Nous vous informons que nous avons, en conséquence, décidé de vous licencier pour faute grave compte tenu de la gravité des faits qui vous sont reprochés, votre maintien dans l'entreprise s'avère impossible, le licenciement prend donc effet immédiatement à la date de la première présentation de ce courrier, sans indemnité de préavis, ni indemnité de licenciement. (
) » ; que M. B... a donc été licencié pour faute grave ;
(
) ; qu'en l'espèce, la lettre de licenciement fait mention de plusieurs dossiers dans lesquels des anomalies ont été constatées imputables aux erreurs du salarié ; que la société ajoute que malgré l'avertissement du 3 juin 2013, M. B... a continué à faire de graves erreurs et se prévaut pour le prouver, des plaintes reçues en mars 2014, de la Carrosserie G. R... et de la MAIF ; qu'elle verse aux débats :
-le courrier du 3 mars 2014 de M. R..., carrossier qui travaille en partenariat avec la société Auto Expertise Conseil, par lequel il affirme que «depuis un an, le travail en partenariat avec M. B... devient de plus en plus compliqué via sa nonchalance» et souligne la lenteur avec laquelle il traite les dossiers ; qu'il donne trois exemples de dossiers pour lesquels il a dû relancer la société pour que les dossiers soient clôturés, le dossier Corsa Sarl Nitting où 8 jours après la livraison, le certificat de conformité n'était pas délivré, M. B... ne se souvenant pas avoir essayé le véhicule, ou les dossiers Golf ou BMW où des retards dans le traitement étaient invoqués ;
-le mail de M. K..., conseiller technique régional de la MAIF, qui écrit, le 3 mars 2014, à la société, à propos du dossier "Q... L..." un de leurs sociétaires, afin de critiquer le "manque évident de réactivité de votre cabinet, l'absence de retour d'informations vers les intervenants du dossier ajourés à votre indécision quant aux imputabilités techniques relevant .du sinistre déclaré, pénalisent lourdement notre société, et détériorent l'image du service apporté par la Mutuelle auprès des sociétaires » (
) ;
-les extraits informatiques relatifs au traitement des dossiers visés dans la lettre de licenciement, 1402973, 14020395, 14010888, 14011213, 14020689, 14020371, 14020148, 14010200, 14010592, 14020175, 14020146, 14011238, 14020844, 14020566, 14020930, sur lesquels apparaissent les anomalies reprochées à M. B... ; que contrairement à ce que soutient M. B..., l'ensemble de ces éléments permet de confirmer la matérialité des griefs qui lui sont reprochés ; (
.) ; que M. B... invoque le manquement de l'employeur à son obligation de sécurité de résultat, caractérisée par l'absence patente et non contestée de visites médicales régulières ; qu'il soutient que si des visites médicales régulières avaient été organisées, elles auraient pu permettre de détecter, en amont, son syndrome dépressif professionnel et de mettre en place des mesures de protection du salarié ; qu'il verse sa fiche d'aptitude du 19 septembre 2007 soutenant qu'il n'a pas eu d'autres visites auprès de la médecine du travail depuis cette date ; que l'employeur ne justifie pas avoir organisé de visites médicales au cours de l'exécution du contrat de travail, ni de visite de reprise à l'issue de l'arrêt de travail du salarié début 2012 ; que toutefois, s'il apparaît que l'employeur s'est abstenu d'assurer au salarié un suivi médical régulier, ce manquement ne saurait ouvrir droit qu'à une indemnisation du préjudice qui en est résulté pour le salarié mais ne saurait rendre le licenciement sans cause réelle et sérieuse dès lors que la cour n'a retenu ni la réalité du burnout allégué ni le lien entre la dégradation de l'état de santé de M. B... et les troubles dont il est atteint avec le travail ; qu'en conclusion, les fautes professionnelles établies à l'encontre de M. B... sont suffisamment graves en raison de leur nature, de leur réitération malgré un avertissement décerné l'année précédente et de leur incidence sur l'image de la société, pour rendre impossible le maintien du salarié dans l'entreprise ; qu'il en résulte que le licenciement repose bien sur une faute grave, ce qui conduit à infirmer le jugement en ce qu'il a condamné la société Auto Expertise Conseil à verser une indemnité compensatrice de préavis, les congés payés afférents, une indemnité légale de licenciement et des dommages et intérêts pour le préjudice subi ; que M. B... sera donc débouté de toutes ses demandes liées au licenciement ;

1°) ALORS QUE la cassation, à intervenir sur le premier moyen, de l'arrêt en ce qu'il a dit que le licenciement de M. B... n'était pas nul, entraînera également par voie de conséquence l'annulation du chef de la décision ayant jugé que son licenciement reposait sur une faute grave et débouté le salarié de ses demandes, en application de l'article 625 du code de procédure civile ;

2°) ALORS QUE la faute grave est celle qui, par son importance, rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise pendant la durée même limitée du préavis ; qu'en affirmant, pour déclarer le licenciement de M. B... justifié par une faute grave, que ses fautes professionnelles étaient suffisamment graves en raison de leur nature, de leur réitération malgré un avertissement décerné l'année précédente et leur incidence sur l'image de la société, sans spécifier en quoi, eu égard à l'ancienneté de M. B... de neuf années dans l'entreprise, ses fautes professionnelles étaient de nature à rendre impossible son maintien dans l'entreprise même pendant la durée de son préavis, la cour d'appel a violé les articles L1234-1 et suivants du code du travail.