Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 7 juillet 2021, 19-26.032, Inédit

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Résumé

Apport de la jurisprudence : Salarié protégé / Mandat extérieur / Statut protecteur / Période d'essai / Nullité du licenciement

Même en période d’essai, le titulaire d’un mandat extérieur à l’entreprise bénéficie du statut protecteur nécessitant l’autorisation de l’Inspection du travail préalablement au prononcé de la rupture de la relation de travail. Dans le cas d’espèce, le salarié était titulaire d’un mandat de défenseur syndical l’invitant à être présent dans le cadre d’audiences au conseil des prud'homme. La Cour de cassation rappelle la règle selon laquelle, il appartient au salarié qui se prévaut du statut protecteur lié à un mandat extérieur à l'entreprise d'établir qu'il a informé son employeur de l'existence de ce mandat au plus tard avant la notification de l'acte de rupture, ou que celui-ci en avait connaissance.

Cass soc, 7 juillet 2021, 19-26.032, Inédit

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

IK



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 7 juillet 2021




Cassation partielle


M. HUGLO, conseiller doyen
faisant fonction de président



Arrêt n° 895 F-D

Pourvoi n° P 19-26.032






R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 7 JUILLET 2021

M. [R] [A], domicilié [Adresse 1], a formé le pourvoi n° P 19-26.032 contre l'arrêt rendu le 21 novembre 2019 par la cour d'appel de Versailles (6e chambre), dans le litige l'opposant à la société Luxant Security Ile-de-France, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 2], défenderesse à la cassation.

Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, les trois moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Lanoue, conseiller référendaire, les observations de la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat de M. [A], de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de la société Luxant Security Ile-de-France, après débats en l'audience publique du 27 mai 2021 où étaient présents M. Huglo, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Lanoue, conseiller référendaire rapporteur, Mme Ott, conseiller, et Mme Lavigne, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Versailles, 21 novembre 2019), M. [A] a été engagé par la société Luxant Security Ile de France (la société) par contrat de travail à durée indéterminée à effet au 19 mai 2017 en qualité de chef d'équipe des services de sécurité incendie.

2. Par lettre du 28 juin 2017, la société lui a notifié la rupture de sa période d'essai, contractuellement fixée à deux mois renouvelable pour un mois, avec un délai de prévenance au 14 juillet 2017.

3. Le salarié a saisi la juridiction prud'homale le 2 août 2017 en nullité de la rupture, faisant valoir qu'il était salarié protégé en sa qualité de défenseur syndical et que l'autorisation de l'inspecteur du travail n'avait pas été sollicitée.

Examen des moyens

Sur le premier moyen, pris en sa deuxième branche

Enoncé du moyen

4. Le salarié fait grief à l'arrêt de constater que sa qualité de défenseur syndical n'a pas été portée à la connaissance de l'employeur préalablement à la notification de la rupture, de dire et juger que la rupture du contrat de travail pendant la période d'essai n'est ni nulle ni nulle d'effet et de le débouter de ses demandes à ce titre, alors « que s'il appartient au salarié qui se prévaut du statut protecteur lié à un mandat extérieur à l'entreprise d'établir qu'il a informé son employeur de l'existence de ce mandat au plus tard avant la notification de l'acte de rupture, ou que celui-ci en avait connaissance, cette information n'est soumise à aucun formalisme ; qu'en retenant qu'il n'était pas établi que les courriels envoyés par le salarié ont été réceptionnés, quand il résultait de ses constatations que celui-ci avait informé l'employeur qu'il posait des heures de délégation par télécopie envoyée au service des ressources humaines et réceptionnée le 23 mai 2017, soit plus d'un mois avant la rupture intervenue le 28 juin 2017, la cour d'appel a violé les articles L. 1453-4, L. 1453-9, L. 2411-1-19° et L2411-24 du code du travail. »

Réponse de la Cour

Vu l'article L2411-24 du code du travail :

5. Il appartient au salarié qui se prévaut du statut protecteur lié à un mandat extérieur à l'entreprise d'établir qu'il a informé son employeur de l'existence de ce mandat au plus tard avant la notification de l'acte de rupture, ou que celui-ci en avait connaissance.

6. Pour débouter le salarié de ses demandes, l'arrêt retient qu'il se prévaut de l'envoi d'une lettre du 23 mai 2017, adressée par courriel à l'entreprise, qui a pour objet la pose d'heures de délégation pour le mois de mai 2017 en raison d'une audience au conseil des prud'hommes dans le cadre de son mandat de défenseur syndical, et d'un courriel du 26 juin 2017 par lequel il confirme sa réclamation téléphonique au sujet des heures de délégation de mai et pose des heures de délégation pour juin, mais ne produit pas de réponse à ces courriels, qu'il ne produit pas le planning de mai modifié qui prouverait que son employeur a tenu compte de sa demande et que son bulletin de paie du mois considéré ne fait état d'aucune heure de délégation, que par conséquent, il ne rapporte pas la preuve, qui lui incombe, que son employeur avait connaissance de son statut de défenseur syndical au moment de la rupture de la période d'essai.

7. En statuant ainsi, alors qu'elle avait relevé que la lettre du 23 mai 2017 avait été également envoyée à l'entreprise par télécopie réceptionnée le même jour, ce dont il résultait que le salarié avait dès cette date porté l'existence de son mandat de défenseur syndical à la connaissance de son employeur, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé le texte susvisé.

Et sur le deuxième moyen , pris en sa première branche, et le troisième moyens, pris en sa première branche, réunis

Enoncé des moyens

8. Par son deuxième moyen, pris en sa première branche, le salarié fait grief à l'arrêt de le débouter de ses demandes au titre de la discrimination syndicale, alors « que pour rejeter la demande au titre de la discrimination syndicale, la cour a retenu qu'il a été jugé qu'il n'était pas établi que l'employeur avait connaissance du statut de défenseur syndical du salarié ; que dès lors, la cassation à intervenir sur le premier moyen de cassation emportera censure de l'arrêt en ses dispositions relatives à la discrimination et ce, en application de l'article 624 du code de procédure civile. »

9. Par son troisième moyen, pris en sa première branche, le salarié fait grief à l'arrêt de le débouter de sa demande de dommages-intérêts au titre de l'exécution déloyale du contrat de travail, alors « que pour débouter le salarié de sa demande, la cour d'appel, tout en constatant que les heures de délégation du mois de mai n'avaient été réglées qu'en juillet, a retenu que cette date de paiement apparaît cohérente avec la thèse de l'employeur qui soutient n'avoir eu connaissance des fonctions de défenseur syndical que tardivement, de sorte qu'il ne peut lui être reproché une exécution déloyale du contrat de travail ; que dès lors, la cassation à intervenir sur le premier moyen de cassation emportera censure de l'arrêt en ses dispositions relatives à l'exécution déloyale du contrat de travail et ce, en application de l'article 624 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

10. En application de l'article 624 du code de procédure civile, la cassation des dispositions de l'arrêt critiquées par le premier moyen emporte la cassation par voie de conséquence des chefs de dispositif visés par le deuxième et le troisième moyens, qui s'y rattachent par un lien de dépendance nécessaire.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déboute M. [A] de sa demande de nullité de la rupture du contrat de travail et de ses demandes en paiement à ce titre et le déboute de ses demandes au titre de la discrimination syndicale et de l'exécution déloyale du contrat de travail, l'arrêt rendu le 21 novembre 2019, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ;

Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Versailles autrement composée ;

Condamne la société Luxant Security Ile-de-France aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Luxant Security Ile-de-France et la condamne à payer à M. [A] la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du sept juillet deux mille vingt et un. MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat aux Conseils, pour M. [A]

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Le moyen fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'AVOIR constaté que la qualité de défenseur syndical du salarié n'a pas été portée à la connaissance de l'employeur préalablement à la notification de la rupture, dit et jugé que la rupture du contrat de travail pendant la période d'essai n'est ni nulle ni nulle d'effet et de l'AVOIR débouté de ses demandes à ce titre.

AUX MOTIFS propres QUE M. [A] a été engagé le 19 mai 2017 et la rupture de la période d'essai est intervenue le 28 juin 2017 ; il se prévaut de deux démarches pour soutenir que son employeur avait connaissance de son statut ; il produit en premier lieu un courrier du 23 mai 2017 (pièce 3 du salarié); ce courrier a été adressé par courriel à Mme [O] à l'adresse « [Courriel 1] » et à Mme [D] à l'adresse «[Courriel 2] », également par télécopie réceptionnée le 23 mai à 15 h 39 ; il a été adressé au service des ressources humaines et a pour objet la pose d'heures de délégation pour le mois de mai 2017 ; le salarié écrit : « J'accuse réception de votre planning de ce mois, cependant je vous informe de mon indisponibilité pour le 30 mai prochain pour cause d'une audience devant le conseil des prud'hommes de Nanterre prévue ce même jour. Je suis convoqué à cette audience dans le cadre de mon mandat de défenseur syndical. Je pose à cet effet dix heures de délégation le 30 mai 2017 de 11 h 30 à 21 h 30 conformément aux articles L. 1453-5 et L1453-6 du code du travail. Je vous prie de prendre acte du présent courrier » ; il produit également un courriel du 26 juin 2017 adressé à Mme [O] à l'adresse « [Courriel 1] » (pièce 6 du salarié). M. [A] écrit : « Bonjour Madame, je fais suite à notre entretien téléphonique de ce jour. Je vous confirme par la présente ma réclamation de paiement de mes heures de délégation pour le 30 mai dernier. En effet par courriel du 23 mai dernier j'avais déposé 10 heures de délégation à la date indiquée, mais ces heures ne m'ont pas été payées sur mon salaire du mois en question (voir courriel infra). Je vous demande donc la régularisation de ces heures ainsi que la prime de panier associée, étant précisé que conformément aux articles du code du travail cités dans mon courriel sus rappelé, l'employeur seul peut se faire rembourser dix heures par mois par l'état sur simple demande. En outre, je pose aussi les heures de délégation suivantes pour ce mois. Le 27 juin courant de 13 h à 16 h et le 30 du même mois de 9 h à 16 h étant précisé que pour ces deux jours je suis déjà en repos, vous n'avez pas à me remplacer. Par ailleurs, je vous prie de bien vouloir trouver ci-joint la liste des défenseurs syndicaux suivant arrêté du préfet de région du 20 juin 2017, mon nom y figure en dernière position page 108. Je vous remercie de prendre acte de ce courriel et reste à votre entière disposition pour toute information complémentaire » ; M. [A] ne s'est pas ménagé une preuve par lettre recommandée ou par remise contre décharge ; aucune condition de forme de l'information n'est certes exigée mais le salarié doit démontrer par tous moyens que son employeur avait connaissance de son statut ; le salarié ne produit pas de réponses aux courriels qu'il a adressés, de sorte qu'il n'est pas établi qu'ils ont bien été réceptionnés ; il est indifférent que Mme [O] soit ou non une interlocutrice autorisée de la direction, ou que sa messagerie soit active, comme cherche à le démontrer le salarié en produisant deux attestations, ces éléments ne permettant pas de démontrer la bonne réception de courriels ; M. [A] soutient qu'il a été tenu compte de sa demande concernant la journée du 30 mai 2017, ce qui établit que l'employeur était informé dans la mesure où la demande était motivée par l'exercice de ses fonctions de défenseur syndical ; il produit certes le premier planning du mois de mai 2017 (pièce 2 du salarié) édité le 22 mai 2017 mentionnant une journée de travail programmée le 30 mai de 14 h à 21 h 30 ; il ne produit toutefois pas le planning modifié pour ce mois de mai 2017, qui prouverait qu'il a été tenu compte de sa demande ; par ailleurs, son bulletin de paie du mois considéré (pièce 5 du salarié) ne fait état d'aucune heure de délégation ; ainsi, M. [A] ne rapporte pas la preuve qui lui incombe que son employeur avait connaissance de son statut de défenseur syndical au moment de la rupture de sa période d'essai ;

AUX MOTIFS éventuellement adoptés QUE s'il est établi que Monsieur [R] [A] disposait bien de la qualité de « Défenseur Syndical » tel que mentionné à l'article L1453-4 du code du travail, il est également patent que ce dernier a dissimulé cette qualité au moment de l'embauche en déclarant dans son dossier de recrutement « ne pas avoir la reconnaissance de travailleur protégé ou de conseiller extérieur du salarié » ; en outre, les différents éléments (pièces et dires) communiqués par Monsieur [R] [A] ne permettent pas d'établir de façon probante qu'il ait informé son employeur (siège social, adresse, courriel ou télécopie tels qu'indiqués au contrat de travail) ni que ce dernier ait eu connaissance de sa qualité de salarié protégé avant qu'il ne soit notifié de la décision de rupture.

ALORS QUE s'il appartient au salarié qui se prévaut du statut protecteur lié à un mandat extérieur à l'entreprise d'établir qu'il a informé son employeur de l'existence de ce mandat au plus tard avant la notification de l'acte de rupture, ou que celui-ci en avait connaissance, cette information n'est soumise à aucun formalisme ; qu'en déboutant le salarié au prétexte que celui-ci ne s'était pas ménagé une preuve par lettre recommandée ou par remise contre décharge pour informer l'employeur de son statut de défenseur syndical, la cour d'appel a violé les articles L1453-4 , L1453-9, L2411-1-19° et L2411-24 du code du travail ;

ALORS QUE s'il appartient au salarié qui se prévaut du statut protecteur lié à un mandat extérieur à l'entreprise d'établir qu'il a informé son employeur de l'existence de ce mandat au plus tard avant la notification de l'acte de rupture, ou que celui-ci en avait connaissance, cette information n'est soumise à aucun formalisme ; qu'en retenant qu'il n'était pas établi que les courriels envoyés par le salarié ont été réceptionnés, quand il résultait de ses constatations que celui-ci avait informé l'employeur qu'il posait des heures de délégation par télécopie envoyée au service des ressources humaines et réceptionnée le 23 mai 2017, soit plus d'un mois avant la rupture intervenue le 28 juin 2017, la cour d'appel a violé les articles L1453-4 , L1453-9, L2411-1-19° et L2411-24 du code du travail ;

ALORS QUE le salarié doit informer l'employeur de son statut protecteur au plus tard avant la rupture du contrat de travail ; qu'en déboutant le salarié aux motifs inopérants que celui-ci aurait dissimulé sa qualité de défenseur syndical au moment de l'embauche, la cour d'appel a violé les articles L1453-4 , L1453-9, L2411-1-19° et L2411-24 du code du travail.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION

Le moyen fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'AVOIR débouté le salarié de ses demandes au titre de la discrimination syndicale ;

AUX MOTIFS QUE M. [A] invoque en premier lieu le fait que l'employeur a mis fin à sa période d'essai en raison de sa qualité de défenseur syndical et de son activité syndicale ; pour étayer son allégation, il explique que c'est juste après avoir informé son employeur de sa qualité de défenseur syndical et des absences qui allaient en découler et après avoir réclamé le paiement de ses heures de délégation et en avoir déposé d'autres qu'il a vu arrêtée sa période d'essai ; en l'espèce, la lettre de rupture n'est pas motivée ; en principe, chaque partie au contrat de travail est libre de le rompre sans donner de motif, au cours de la période d'essai, sauf abus de droit lorsque les véritables motifs de la rupture sont sans relation avec l'aptitude professionnelle ou personnelle du salarié à assumer les fonctions qui lui sont dévolues, la finalité de la période d'essai étant détournée ; M. [A] ne rapporte toutefois pas la preuve d'un lien de causalité entre ses activités syndicales et la rupture, la simple concomitance des dates étant insuffisante à démontrer ce lien de causalité ; au demeurant, il a été jugé qu'il n'était pas établi que l'employeur avait connaissance du statut de M. [A] ; M. [A] invoque en deuxième lieu le non-paiement de ses heures de délégation des mois de mai et juin 2017 dans le but de l'empêcher d'exercer son activité ; il se contente de procéder par affirmation sans étayer sa demande ; il ne démontre aucune obstruction de l'employeur à son activité syndicale ; ce fait n'est pas matériellement établi ; M. [A] invoque en troisième lieu le fait que, début juillet 2017 alors qu'il faisait toujours partie de la société, son employeur a envoyé à tous les salariés affectés sur le même site de nouvelles consignes sauf à lui ; il ne démontre pas qu'il n'a pas reçu ces consignes et quoi qu'il en soit, dans la mesure où sa période d'essai était rompue depuis le 28 juin 2017 même si le contrat de travail prenait fin le 13 juillet 2017 du fait du délai de prévenance, ce fait pouvait s'expliquer par l'organisation de son départ ; ce fait n'est pas établi ; M. [A] n'établit dès lors pas l'existence de faits pouvant laisser présumer l'existence d'une discrimination à son encontre.

Et AUX MOTIFS QUE M. [A] demande à la cour de [constater] que la demande « avez-vous la reconnaissance de travailleur protégé ou de conseiller extérieur du salarié ? » dans le dossier de recrutement est nulle et illégale ; qu'une telle demande, qui ne vise pas à la reconnaissance d'un droit mais à une simple constatation, ne constitue pas une prétention au sens des articles 4 et 954 du code de procédure civile ; qu'il n'y a pas lieu de statuer ;

ALORS QUE pour rejeter la demande au titre de la discrimination syndicale, la cour a retenu qu'il a été jugé qu'il n'était pas établi que l'employeur avait connaissance du statut de défenseur syndical du salarié ; que dès lors, la cassation à intervenir sur le premier moyen de cassation emportera censure de l'arrêt en ses dispositions relatives à la discrimination et ce, en application de l'article 624 du code de procédure civile ;

ALORS QUE caractérise une discrimination syndicale le fait d'interroger le candidat à l'embauche sur ses activités et mandats syndicaux ; qu'en s'abstenant de rechercher si l'employeur avait illégalement mentionné, dans le dossier de recrutement, la question « avez-vous la reconnaissance de travailleur protégé ou de conseiller extérieur du salarié ? », au motif inopérant que la demande du salarié tendant à voir constater cette illégalité ne constitue pas une prétention, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L1132-1, L1134-1, L2141-5 du code du travail, ensemble de l'alinéa 6 du Préambule de la Constitution du 27 octobre 1946 et de l'article 11 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

ALORS QUE lorsque le salarié présente des éléments de fait constituant selon lui une discrimination directe ou indirecte, il appartient au juge d'apprécier si ces éléments dans leur ensemble laissent supposer l'existence d'une telle discrimination et, dans l'affirmative, il incombe à l'employeur de prouver que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination ; qu'en reprochant au salarié de n'avoir pas rapporté la preuve d'une part d'un lien de causalité entre ses activités syndicales et la rupture, la simple concomitance des dates étant insuffisante à démontrer ce lien, d'autre part, de l'obstruction de l'employeur à son activité syndicale, l'absence de consignes pouvant s'expliquer par l'organisation de son départ, la cour d'appel, qui a fait peser la charge de la preuve de la discrimination sur le salarié, a violé les articles L1134-1 et L2141-5 du code du travail.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION

Le moyen fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'AVOIR débouté le salarié de sa demande de dommages et intérêts au titre de l'exécution déloyale du contrat de travail.

AUX MOTIFS QUE M. [A] invoque le non-paiement des heures de délégation malgré plusieurs réclamations, la régularisation n'étant intervenue qu'après la rupture du contrat de travail ; les heures de délégation, deux fois 10 heures les 30 mai 2017 et 12 juillet 2017, ont en effet été payées suivant bulletin de salaire établi le 14 juillet 2017 ; cette date de paiement apparaît cohérente avec la thèse de l'employeur qui soutient n'avoir eu connaissance des fonctions de défenseur syndical de M. [A] que tardivement ; il ne peut lui être reproché une exécution déloyale du contrat de travail ; il invoque encore le fait que la société lui a retenu dans un premier temps la somme de 150 euros sur son solde de tout compte pour une soi-disant tenue non rendue, sans envoyer la moindre mise en demeure et sans aucune justification, avant de régulariser cette somme après réclamation ; il indique lui-même page 21 de ses conclusions qu'il a laissé sa tenue sur son site d'affectation en en informant le coordinateur alors qu'aux termes de la lettre de rupture du 28 juin 2017 (pièce 7 du salarié), il lui était demandé de remettre l'intégralité de son uniforme nettoyé et repassé ; la retenue, qui quoi qu'il en soit a été régularisée, est justifiée par cette difficulté relative aux conditions de restitution dont le salarié est à l'origine ; il invoque aussi le non-paiement d'une partie du salaire du mois de juillet 2017 ; il existait un désaccord entre les parties sur ce point, aujourd'hui tranché, mais qui exclut une exécution déloyale du contrat de travail ; il invoque surtout le non-respect des délais de prévenance concernant l'envoi des plannings de travail ; il prétend que cette tardiveté lui a causé un préjudice moral et a porté atteinte à sa vie de familiale et privée ; il prétend que le planning de juin 2017 lui a été adressé le 31 mai 2017 à 16 h 18 pour travailler le lendemain 1er juin 2017 et que pour le mois de juillet 2017, il a reçu son planning le 28 juin 2017 pour travailler le 1er juillet 2017 ; concernant le planning de juillet 2017, M. [A] produit un échange de mails avec Mme [O] (pièce 28-1 du salarié), à qui il transmet ses disponibilités pour le mois de juillet par mail du 2 juin 2017 ; cet échange traduit le souci de concertation de l'employeur dans l'élaboration des plannings de sorte que M. [A] est malvenu de venir se plaindre de la tardiveté de la communication, qu'il ne démontre d'ailleurs pas puisque plusieurs projets ont pu être transmis au salarié comme cela a été le cas pour le mois de juin 2017, et quoi qu'il en soit, il ne démontre aucun préjudice familial ; M. [A] sera débouté de sa demande ; le jugement sera confirmé de ce chef de demande ;

ALORS QUE pour débouter le salarié de sa demande, la cour d'appel, tout en constatant que les heures de délégation du mois de mai n'avaient été réglées qu'en juillet, a retenu que cette date de paiement apparaît cohérente avec la thèse de l'employeur qui soutient n'avoir eu connaissance des fonctions de défenseur syndical que tardivement, de sorte qu'il ne peut lui être reproché une exécution déloyale du contrat de travail ; que dès lors, la cassation à intervenir sur le premier moyen de cassation emportera censure de l'arrêt en ses dispositions relatives à l'exécution déloyale du contrat de travail et ce, en application de l'article 624 du code de procédure civile ;

ALORS QUE les sanctions pécuniaires sont interdites ; qu'en s'abstenant de rechercher, comme elle y était invitée, si le fait, pour l'employeur de retenir la somme de 150 euros aux motifs que le salarié n'aurait pas restitué sa tenue de travail nettoyée et repassée, constituait une sanction pécuniaire prohibée caractérisant une exécution déloyale du contrat de travail, la cour a entaché sa décision d'un défaut de base légale au regard des articles L1221-1 et L1331-2 du code du travail ;

ALORS QUE d'une part, les juges ne peuvent statuer sans examiner l'intégralité des pièces qui leur sont soumises et que, d'autre part, ils ne peuvent statuer par des motifs hypothétiques ; que le salarié justifiait que le planning du mois de juin 2017 lui avait été adressé le 31 mai 2017 à 16h18 ; que la cour d'appel a retenu que le salarié est malvenu de venir se plaindre de la tardiveté de la communication, qu'il ne démontre pas puisque plusieurs projets ont pu lui être transmis comme cela a été le cas pour le mois de juin 2017 ; qu'en se déterminant par des motifs hypothétiques, sans rechercher s'il ne résultait pas du planning du mois de juin 2017 que celui-ci avait été adressé au salarié le 31 mai 2017 à 16h18 (pièce communiquée sous le n°33), la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.