Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 7 juillet 2021, 19-17.847, Inédit

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Résumé

Apport de la jurisprudence : Retraite complémentaire / Cotisations employeur / Prescription / Paie

Le délai de prescription de l'action fondée sur l'obligation pour l'employeur d'affilier son personnel à un régime de retraite complémentaire et de régler les cotisations qui en découlent ne court qu'à compter de la liquidation par le salarié de ses droits à la retraite, jour où le salarié titulaire de la créance à ce titre a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d'exercer son action.

Cass soc, 7 juillet 2021, 19-17.847, Inédit

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

ZB



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 7 juillet 2021




Rejet


M. HUGLO, conseiller doyen
faisant fonction de président



Arrêt n° 904 F-D

Pourvoi n° S 19-17.847




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 7 JUILLET 2021

La société Safran Aircraft Engines, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° S 19-17.847 contre l'arrêt rendu le 2 avril 2019 par la cour d'appel de Paris (pôle 6, chambre 8), dans le litige l'opposant à M. [F] [X], domicilié [Adresse 2], défendeur à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les quatre moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Le Masne de Chermont, conseiller référendaire, les observations de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de la société Safran Aircraft Engines, de Me Haas, avocat de M. [X], après débats en l'audience publique du 27 mai 2021 où étaient présents M. Huglo, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Le Masne de Chermont, conseiller référendaire rapporteur, Mme Pécaut-Rivolier, conseiller, et Mme Pontonnier, greffier de chambre,
la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 2 avril 2019), M. [X] a été engagé, en qualité d'électroplaste, par la société Safran, le 21 avril 1976.

2. Il a effectué plusieurs missions dans divers États étrangers, dont Taïwan de l'année 2002 à l'année 2014.

3. Il a saisi la juridiction prud'homale, le 23 octobre 2015, afin que soit prononcée la résiliation, aux torts de son employeur, de son contrat de travail et sollicité, en particulier, que les indemnités de fonction, de coût de la vie et d'éloignement perçues soient réintégrées dans les bulletins de salaire lorsqu'elles n'y figurent pas.

4. Il a été licencié par lettre du 3 juillet 2017.

Examen des moyens

Sur le premier moyen, le deuxième moyen, pris en ses première à troisième branches, et le quatrième moyen, ci-après annexés

5. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le deuxième moyen, pris en sa quatrième branche

Enoncé du moyen

6. La société fait grief à l'arrêt de dire que les indemnités de fonction, de coût de la vie et d'éloignement doivent être réintégrées dans les bulletins de salaire lorsqu'elles n'y figurent pas, de lui ordonner de modifier en conséquence ces bulletins de salaire et de procéder auprès des organismes de retraite du régime de base et du régime complémentaire, à la remise des nouveaux bulletins de paye ainsi établis, alors « que l'action en paiement ou en répétition du salaire se prescrit par trois ans à compter du jour où celui qui l'exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer ; que l'éventuelle illégalité d'une pratique reprochée à l'employeur relative aux salaires ne fait pas obstacle à l'application des règles d'ordre public de prescription ; qu'en l'espèce la société Safran Aircraft Engines faisait valoir dans ses conclusions d'appel qu'en admettant qu'elles aient la nature de salaire, les demandes de M. [X] afférentes aux indemnités de coût de la vie et conditions d'éloignement et de fonctions étaient prescrites pour la période précédant le 23 octobre 2012, antérieure de plus de trois ans à la saisine du conseil de prud'hommes par le salarié le 23 octobre 2015 ; qu'en se fondant néanmoins pour écarter la prescription sur le motif impropre selon lequel la prescription ne serait pas opposable au salarié dès lors qu' ''était illégal'' le manquement reproché à l'employeur tiré de l'absence de déclaration des indemnités en cause sur les bulletins de salaire et leur non-assujettissement à cotisations, la cour d'appel a violé l'article L3245-1 du code du travail. »

Réponse de la Cour

7. En application de l'article 2224 du code civil, le délai de prescription de l'action fondée sur l'obligation pour l'employeur d'affilier son personnel à un régime de retraite complémentaire et de régler les cotisations qui en découlent ne court qu'à compter de la liquidation par le salarié de ses droits à la retraite, jour où le salarié titulaire de la créance à ce titre a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d'exercer son action.

8. Par ce motif de pur droit, substitué à ceux critiqués, dans les conditions prévues par les articles 620, alinéa 1er, et 1015 du code de procédure civile, l'arrêt, selon lequel la demande de réintégration dans les bulletins de salaire des indemnités de fonction, de coût de la vie et d'éloignement a été formée alors que le salarié n'avait pas liquidé ses droits à la retraite, se trouve légalement justifié.

Sur le troisième moyen

Enoncé du moyen

9. La société fait grief à l'arrêt de la condamner à payer une certaine somme à titre d'indemnité pour travail dissimulé, alors :

« 1°/ que la cassation entraîne, sans qu'il y ait lieu à une nouvelle décision, l'annulation par voie de conséquence de toute décision qui est la suite, l'application ou l'exécution du jugement cassé ou qui s'y rattache par un lien de dépendance nécessaire ; que par application de l'article 624 du code de procédure civile, la cassation des chefs de dispositif de l'arrêt critiqués dans le deuxième moyen de cassation retenant que les indemnités de fonction, de coût de la vie et d'éloignement devaient être réintégrées dans les bulletins de salaire de M. [X] entraînera, par voie de conséquence, la censure du chef de dispositif qui, pour ce motif, a condamné la société au paiement de dommages et intérêts pour travail dissimulé ;

2°/ que, en vertu de l'article L8221-5 du code du travail, le délit de travail dissimulé n'est caractérisé que lorsque l'employeur s'est soustrait de manière intentionnelle à l'accomplissement des formalités prévues par l'article L3243-2 du code du travail ; qu'en condamnant la société Safran Aircraft Engines pour travail dissimulé au seul regard de l'absence de démonstration par cette dernière du caractère non salarial des indemnités de coût de la vie et conditions d'éloignement et de fonctions accordées au salarié non mentionnées sur les bulletins de salaire de M. [X], sans caractériser une intention de dissimulation d'emploi salarié de sa part, la cour d'appel a violé l'article L8221-5 du code du travail ;

3°/ que le caractère intentionnel ne peut se déduire de la seule erreur de qualification de l'employeur ; qu'en condamnant la société Safran Aircraft Engines pour travail dissimulé au seul regard de l'absence de démonstration par cette dernière du caractère non salarial des indemnités non mentionnées sur les bulletins de salaire du salarié, cependant que l'erreur de qualification des indemnités en cause reprochée à l'exposante ne caractérisait pas en soi l'intention de dissimulation d'emploi, la cour d'appel a violé les articles L. 8221-1 et L8221-5 du code du travail ;

4°/ que c'est au salarié qui réclame le paiement d'une indemnité pour travail dissimulé d'apporter la preuve de l'intention de dissimulation ; qu'en reprochant à la société son ''indigence à rendre compte de son comportement'', la cour d'appel, qui a fait reposer intégralement sur l'employeur la charge de la preuve, a violé l'article 1353 du code civil. »

Réponse de la Cour

10. D'abord, le rejet du deuxième moyen prive de portée le moyen, pris en sa première branche, qui invoque une cassation par voie de conséquence.

11. Ensuite, ayant constaté que les indemnités de fonction, les indemnités de coût de la vie et les indemnités d'éloignement, qui figuraient sur les bulletins de paie du salarié jusqu'en 2000, en ont disparu de cette date au 1er janvier 2013, l'employeur s'abstenant de verser les cotisations sociales correspondantes au cours de cette période, et que la société explique, sans en justifier, avoir ainsi modifié le régime de ces primes pour procéder à une uniformisation du statut de son personnel, provenant d'entreprises différentes, la cour d'appel a retenu, dans l'exercice de son pouvoir souverain d'appréciation et sans inverser la charge de la preuve, le caractère intentionnel de la dissimulation d'emploi salarié.

12. Le moyen n'est donc pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Safran Aircraft Engines aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Safran Aircraft Engines et la condamne à payer à M. [X] la somme de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du sept juillet deux mille vingt et un.








MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat aux Conseils, pour la société Safran Aircraft Engines


PREMIER MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR prononcé la résiliation du contrat de travail de Monsieur [X], d'AVOIR dit que cette résiliation prenait effet à la date du licenciement le 3 juillet 2017 et d'AVOIR condamné la société SAFRAN AIRCRAFT ENGINES à lui payer, avec intérêts au taux légal, les sommes de 150.000 ? de dommages et intérêts au titre de la rupture du contrat de travail et de 5.762,18 ? à titre de dommages et intérêts pour non remboursement des frais de location de logement et de véhicule automobile postérieurs au 1er juillet 2014 ;

AUX MOTIFS QUE « sur la demande de résiliation judiciaire du contrat de travail : Considérant qu'il ressort des conclusions de M. [X] que celui-ci fonde cette demande sur les manquements suivants de son employeur : -inobservation de l'obligation conventionnelle de reclassement, au retour d'une expatriation à l'étranger et modification du contrat de travail ; -inobservation de l'obligation de sécurité à son égard prenant la forme d'un harcèlement moral. Sur la modification des fonctions de M. [X] : Considérant que sont ici en cause les fonctions d' « analyste soutien logistique » à Evry- Corbeil qui ont été attribuées à M. [X] lors de son séjour en France à compter du mois avril 2014 d'abord, à titre temporaire puis à titre de nouvelle affectation à compter du 1er juillet 2014, après l'expiration de sa mission à TAIWAN ; Considérant qu'il n'est pas contesté que jusqu' alors, les fonctions exercées par M. [X] étaient celles de « représentant technique », tant lorsqu' il était en mission à l'étranger, en expatriation, que lorsqu'il était « détaché » en France avant son départ à l'étranger -dans les deux cas, l'activité professionnelle du salarié étant accomplie chez le client de SNECMA ; Considérant que le statut du personnel du groupe SAFRAN énonce au titre du régime des salariés expatriés : « Safran se réserve le droit de rapatrier sans préavis l'expatrié si les conditions opérationnelles, commerciales ou économiques l'imposaient et s'engage à lui retrouver un nouvel emploi correspondant aux fonctions et qualifications exercées avant le départ à l'étranger » ; Considérant qu'il est également acquis que la classification et la rémunération de M. [X] sont demeurées inchangées dans le cadre de l'affectation contestée par l'appelant ; Considérant que la société SAFRAN en conclut que le reclassement opéré comme dit précédemment est conforme aux dispositions conventionnelles ; Considérant toutefois que les fonctions du salarié constituent un élément essentiel de son contrat de travail ; qu'elles sont déterminées par les attributions conférées au salarié et dépendent des compétences, de la formation et de l'expérience de ce dernier ; Or considérant qu'en l'espèce, l'examen des pièces produites permet de constater que les fonctions de « représentant technique » (pièce 122 de M. [X]) qui étaient celles exercées par M. [X] en France avant son expatriation en Chine en 2005, consistent, pour le salarié, à travailler sur des moteurs d'avion, chez le client de SNECMA ou SAFRAN, auquel il apporte son assistance, au titre de la maintenance ou des réparations ; que « l'analyste soutien logistique » (pièces 41 et 49 de la société SAFRAN) intervient, lui, « dans le cadre d'un projet moteur » et « élabore le concept de maintenance, analyse et spécifie les besoins des clients en matière de soutien logistique du moteur » ; qu'il exerce son activité chez l'employeur, dans les locaux de la « direction soutien de la division moteurs » ; que concrètement les travaux confiés à M. [X] par la société SAFRAN, à son retour de TAIWAN en 2014, en sa nouvelle qualité d'analyste soutien logistique avaient pour objet la vérification de la conformité des CD ROM concernant certains moteurs, par rapport à la documentation manuelle existante ; que l'appelant était donc amené à travailler constamment avec l'informatique, au niveau de la conception du moteur, et plus sur des moteurs ; que d'ailleurs l'un de ses responsables reconnaît dans son attestation, produite par la société SAFRAN, qu'il était ainsi demandé à M. [X] de résorber un « arriéré de questions documentaire important », dont la résorption, au demeurant, n'apparaissait pas présenter de caractère indispensable ; Considérant que tant leur nature, appelant des compétences et une expérience différentes, que les modalités leur exercice professionnel, opposent ainsi les fonctions d'analyste soutien logistique et celles de représentant technique ; que la société SAFRAN est mal fondée à soutenir le contraire et M. [X] qui a immédiatement contesté cette affectation -qui n'était pas son « job »- en particulier dès son évaluation de 2015 fait à juste titre valoir que la société SAFRAN a manqué à son obligation conventionnelle de reclassement lors de sa réintégration en France ; Sur le manquement de la société SAFRAN à son obligation de sécurité : Considérant que l'appelant critique de même à bon droit, comme particulièrement fautif et préjudiciable, le comportement manifesté à son égard par la société SAFRAN tant à l'occasion de sa réintégration que dans l'exercice de ses nouvelles fonctions d'analyste soutien logistique ; Considérant que s'agissant de la fin de mission à TAIWAN, il ressort du rappel des faits qui précède que c'est à l'occasion de son séjour en France effectué début avril 2014 -qui avait pour objet à sa demande, de pouvoir discuter avec sa hiérarchie, croyait-il, de son départ en retraite le 31 décembre seulement et de son maintien à TAIWAN jusqu' à cette date- que M. [X] s'est vu notifier, sans motif particulier et sans préavis, une affectation immédiate en France sur le poste d'analyste qui vient d'être évoqué ; que pendant ce séjour la société SAFRAN refusait au salarié la prise en charge de ses frais sur place, alors que d'une part, c'est elle-même qui avait empêché son retour à TAIWAN, précisément pour le convoquer et lui annoncer le 17 avril ce changement professionnel, prenant effet le lendemain, et que, par la suite, M. [X] bénéficiait d'un arrêt de travail ; que le départ à TAIWAN de M. [X] pour son déménagement, s'en trouvant retardé, la société a aussi refusé la prise en charge de ses frais à TAIWAN, de logement et de location de véhicule, à compter du 1er juillet, date de la fin de son expatriation et ce n'est « qu'à titre exceptionnel », après plusieurs réclamations de M. [X] , qu'elle a accordé à celui-ci une mission de 15 jours emportant cette prise en charge pour les frais limités à ceux de restauration et d'hébergement -les siens, et ceux de son épouse ; que rentrant de TAIWAN, après son déménagement, le service comptable de la société SAFRAN a fait subir à l'appelant un questionnement aussi tatillon qu' injustifié concernant le versement d'une caution ainsi que le remboursement de frais professionnels entre 2007 à 2009, cette dernière circonstance démontrant, contrairement aux prétentions de la société SAFRAN, que les contrôles ainsi exercés concernaient des dépenses anciennes et non, récentes ; Considérant que s'agissant de son activité professionnelle à Evry Corbeil, les attestations multiples et convergentes de collègues de travail versées aux débats par M. [X] établissent la situation d'isolement dans laquelle celui-ci était tenu, -interdiction étant faite aux intéressés par leur chef de département commun, d' adresser la parole à M. [X], dénommé entre eux le « pestiféré » et demeuré par ailleurs plusieurs mois sans ordinateur -et toujours sans accès aux bases de données- à exercer des fonctions uniques et nouvelles, comme créées pour lui, jusqu'alors inconnues de ses collègues de bureau ; que la description de ces fonctions, non contestée par la société SAFRAN et faite par l'appelant dans ses conclusions, révèle de surcroît le caractère rébarbatif des tâches de M. [X], consistant à cliquer et ouvrir des dossiers informatiques à longueur de journée ; que, pour l'évaluation de son temps de travail M. [X] était soumis à l'obligation de badger quatre fois par jour alors que l'accord d'entreprise sur le temps de travail dont se prévaut la société SAFRAN ne prévoit pas que ce seul système de contrôle mais également un procédé d'auto déclaration, moins contraignant, dont la société SAFRAN n'explique pas pourquoi elle n'en a pas fait usage ; qu'enfin, en janvier 2015, une publication interne de la société faisait paraître la nouvelle du départ en retraite de M. [X] ; que même si elle procédait d'une erreur et ne concernait pas seulement l'appelant, ainsi que la société le fait plaider sans le prouver, la diffusion de cette information dans le contexte qui vient d'être décrit, démontre qu' à tout le moins le départ de M. [X] était au centre des réflexions de la direction de SAFRAN ; Considérant que l'ensemble des éléments qui viennent d'être énoncés se rapportent à des agissements qui ont eu pour effet, à travers les conditions de travail de l'appelant, de provoquer une déstabilisation de celui-ci par la mise en oeuvre d'un bouleversement brutal et inadapté de sa situation personnelle, engendrant une dévalorisation professionnelle et un traitement vexatoire; que c'est la dignité même de l'appelant qui a été atteinte à travers ces conditions de travail ; Considérant que les divers certificats médicaux et arrêts de travail produits aux débats -même s'ils n'ont pas tous donné lieu à une reconnaissance d'accident du travail- établissent qu' à compter de son retour d'expatriation, M. [X] a présenté un syndrome dépressif important, traité encore en 2017 lors de son licenciement par antidépresseurs et suivi psychothérapeutique ; que leur contenu et leur concomitance avec les événements et les nouvelles conditions de travail, vécus par M. [X], permettent à la cour de conclure que les atteintes subies ont aussi affecté la santé de ce dernier ; Considérant qu'il résulte des énonciations qui précèdent et qu'aucune pièce ni explication de la société SAFRAN ne vient contredire, que l'ensemble des agissements précités imputables à la société SAFRAN caractérisait un véritable harcèlement moral; qu'en tout état de cause, comme l'invoque aussi M. [X], le comportement critiqué de la société SAFRAN constitue un manquement à l'obligation de sécurité de l'employeur -vainement informé de l'état de l'appelant, comme en témoigne l' alerte du CHSCT après qu'elle a été avisée du geste d'automutilation commis 19 juin 2015 par M. [X] ; qu'il traduit enfin une exécution déloyale de ses obligations envers M. [X] puisque la société SAFRAN, non seulement, n'a pas reclassé M. [X] comme elle le devait, mais encore, s'est livrée, de fait, à un véritable « déclassement » professionnel et personnel de celui-ci depuis sa réintégration en France ; Considérant que la cour ne peut pas retenir la violation par la société SAFRAN de l'engagement qu'elle aurait pris, selon M. [X], de le laisser en poste à TAIWAN jusqu'à la date du 31 décembre 2014 où il aurait pris sa retraite ; qu'il n'existe en effet aucune pièce susceptible de contenir pareil engagement , tout au plus, des correspondances de M. [X] à sa hiérarchie laissées sans réponse -participant d'ailleurs à la déloyauté de la société SAFRAN- laissent entendre que certains de ces responsables auraient donné à l'appelant une assurance en ce sens ; que dès lors M. [X] n'est pas fondé à imputer, de ce chef, à la société SAFRAN une inexécution contractuelle ; qu'il a signé le 8 novembre 2013 son dernier avenant d'expatriation à TAIWAN, valable jusqu' au 30 juin 2014 et n'a fait, alors, état, selon les échanges de courriels postérieurs produits -où il parlait de trahison et de manque à la parole donnée- que de souhait de sa part et de projet en cours, sans pouvoir justifier de l'engagement ferme de la société, à son égard, qu'il revendique ; Considérant que les divers manquements retenus ci-dessus à l'encontre de la société SAFRAN correspondent à la méconnaissance d'obligations élémentaires de la société SAFRAN envers son salarié, à l'origine d'une dégradation de la santé de celui-ci ; qu'elles rendaient en conséquence impossible la poursuite du contrat de travail et justifient la résiliation requise ; que M. [X] ayant saisi le conseil de prud'hommes dès le 23 octobre 2015 alors qu'il avait connu de nombreux arrêts de travail depuis son retour de TAIWAN, la société SAFRAN ne saurait donc prétendre, au regard de ce délai, que les manquements reprochés à l'employeur étaient supportables et ne pourraient justifier la résiliation ; Considérant que cette résiliation, ordonnée comme dit ci-après au dispositif, n'est pas dépourvue d'objet en raison du licenciement intervenu le 3 juillet 2017 -comme le conclut à tort la société SAFRAN et produira ses effets au jour du licenciement dont l'examen, lui, devient dès lors sans objet ; Considérant qu'au regard de la très grande ancienneté de M. [X] au sein des sociétés SNECMA puis SAFRAN où s'était déroulée toute son activité professionnelle, mais aussi des conséquences sur la santé et la vie personnelle de M. [X] de la violation de ses obligations par la société SAFRAN , la cour estime devoir évaluer à 150 000 ? le préjudice moral et matériel, lié pour l'appelant à la rupture de son contrat et aux conditions de cette rupture ; que s'agissant de dommages et intérêts, cette somme est soumise à « CSG » et « CRDS », selon les modalités applicables à ces taxes ; que la cour n'a pas le pouvoir de dispenser M. [X] de ses obligations fiscales ; Considérant que M. [X] ayant reçu les indemnités de rupture dans le cadre de son licenciement pour cause réelle et sérieuse, celles-ci non réclamées d'ailleurs, n'ont pas lieu d'être ; qu'en revanche, il convient d'ordonner à la société SAFRAN de remettre, sous astreinte, à M. [X] les documents obligatoires de rupture, conformes au présent arrêt » ;

1/ ALORS QUE seul un manquement de l'employeur de nature à empêcher la poursuite du contrat de travail peut justifier la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de l'employeur ; que le changement de poste qui ne modifie pas la rémunération, la qualification ou le niveau de responsabilité du salarié doit être regardé comme un simple changement des conditions de travail relevant du pouvoir de direction de l'employeur ; que les conditions de reclassement des salariés en France, à l'issue d'une période de détachement ou d'expatriation, peuvent être prévues par contrat ou convention ; que ce reclassement doit s'opérer dans un emploi compatible avec l'importance des précédentes fonctions du salarié en France au sein de son employeur ; que tel qu'indiqué par la société SAFRAN AIRCRAFT ENGINES dans ses écritures, selon le statut du personnel du groupe Safran détaché à l'étranger pour plus de six mois, « Safran se réserve le droit de rapatrier sans préavis le détaché si les conditions opérationnelles, commerciales ou économiques l'imposaient et s'engage à lui trouver un nouvel emploi correspondant aux fonctions et qualifications exercées avant le départ à l'étranger. (?) » » (conclusions p. 43 § 1) ; que le reclassement de Monsieur [X] devait en conséquence être effectué dans un emploi correspondant aux fonctions et qualifications exercées en France avant son départ à Taiwan et non dans un emploi identique ; qu'en l'espèce pour faire droit à la demande de résiliation judiciaire du contrat de travail, la cour d'appel a retenu que la société avait méconnu son obligation de reclassement en proposant au salarié un poste « d'analyste soutien logistique » en France à l'issue de son expatriation à Taiwan, poste qui aurait été distinct du poste de « représentant technique » occupé par ce dernier avant son départ ; qu'en statuant ainsi, sans vérifier si deux emplois en question n'étaient pas équivalents et compatibles en termes de niveau de responsabilité, de type de tâches, de qualification professionnelle et de rémunération, la cour d'appel n'a pas mis la Cour de cassation en mesure d'exercer son contrôle et a privé sa décision de base légale au regard des articles L1221-1 et L1231-5 du code du travail dans leur version applicable au litige, ensemble les articles L1231-1 du code du travail et 1103, 1104, 1193 et 1224 du code civil ;

2/ ALORS, ET EN TOUTE HYPOTHESE, QU'en se bornant à retenir que les anciennes fonctions de Monsieur [X] consistaient « à travailler sur le moteur des avions », alors que les nouvelles fonctions dévolues « avaient pour objet la vérification, des CD ROM concernant certains moteurs, par rapport à la documentation manuelle existante », sans s'expliquer sur les nombreuses pièces produites par la société SAFRAN AIRCRAFT ENGINES - notamment sur sa Fiche d'évolution de carrière - desquelles il ressortait que le salarié occupait jusqu'en mars 2000 les fonctions de « documentation M88 », poste équivalent au poste « d'analyste soutien logistique » confié à son retour en France, la cour d'appel a de plus fort privé sa décision de base légale au regard des articles L1221-1 et L1231-5 du code du travail dans leur version applicable au litige, ensemble les articles L1231-1 du code du travail et 1103, 1104, 1193 et 1224 du code civil ;

3/ ALORS, ENFIN, QU'en retenant l'existence d'une atteinte à l'obligation de sécurité « qu'aucune pièce ni explication de la société SAFRAN ne vient contredire », sans s'expliquer sur les conclusions de la société SAFRAN AIRCRAFT ENGINES sur ce point dans lesquelles elle faisait valoir, justificatifs à l'appui, que l'absence de réintégration du salarié à Taiwan était conforme à l'avis du médecin du travail, qu'aucun propos dévalorisant n'avait été porté contre le salarié, que les tâches qui lui avaient été confiées à son retour d'expatriation étaient conformes à son niveau de qualification professionnelle, que ses frais avaient régulièrement été pris en charge et qu'il lui avait été laissé le temps nécessaire pour organiser son retour en France (conclusions d'appel de l'exposante pp. 54 à 60), de sorte que la société SAFRAN AIRCRAFT ENGINES avait parfaitement respecté ses obligations en termes de santé et de sécurité et que l'ensemble des décisions concernant le salarié se justifiaient de manière objective, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.


DEUXIEME MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR dit que les indemnités de fonction, de coût de la vie et d'éloignement doivent être réintégrées dans les bulletins de salaire de Monsieur [X] lorsqu'elles n'y figurent pas, d'AVOIR ordonné à la société SAFRAN AIRCRAFT ENGINES de modifier les bulletins de salaire, de façon à ce que soient réintégrées les sommes correspondant au paiement des indemnités de fonction, de coût de la vie, et d'éloignement versées à Monsieur [X] et d'AVOIR ordonné à la société SAFRAN AIRCRAFT ENGINES de procéder auprès des organismes de retraite du régime de base et du régime complémentaire, à la remise des nouveaux bulletins de paye ainsi établis ;

AUX MOTIFS QUE « Sur la rectification des bulletins de salaire de M. [X] : Considérant que les demandes formées en la matière par M. [X] ont pour objet les indemnités de fonction, les indemnités « coût de la vie » et indemnités « condition d'éloignement » qui jusqu'en 2000, figuraient sur les bulletins de salaire de l'appelant et qui, en ont disparu à compter de cette date, jusqu'au 1er janvier 2013 -pour ne plus apparaître sur des feuilles distinctes intitulées « indemnités journalières »- entraînant, du même coup, l'absence de versement des cotisations sociales correspondantes ; que depuis le 1er janvier 2013 les indemnités de fonction, à l'exclusion des deux autres, ont été réintégrées dans le bulletin de salaire de M. [X] ; que M. [X] entend voir la cour ordonner à la société SAFRAN de rectifier ses bulletins de salaire ne portant pas ces indemnités qui, n'étant pas soumises aux cotisations sociales, se trouvent exclues des calculs pratiqués pour l'évaluation du montant de sa retraite ; Considérant que cette chronologie des faits invoquée par M. [X] n'est pas contestée par la société SAFRAN qui expose avoir modifié le régime des primes litigieuses, pour procéder à une uniformisation du statut de son personnel, en provenance d'entreprises différentes, ne disposant pas des mêmes rémunérations ; Considérant que s'agissant de l'indemnité de fonction, la société SAFRAN ajoute que (page 75 de ses conclusions) qu' « elle est une somme n'entrant pas dans le salaire brut tant en France qu' à l'étranger ; qu'elle est soumise aux cotisations sociales françaises uniquement lorsque le salarié travaille en France » ; qu'enfin les demandes de M. [X] tendant à voir rectifier ses bulletins de salaire ne sont recevables, du fait de la prescription, qu' à compter du 23 octobre 2012, le conseil de prud'hommes ayant été saisi le 23 octobre 2015 ; Mais considérant, sur les primes de fonction, que la société SAFRAN ne démontre pas que M. [X] aurait dépendu d'un autre régime que du régime français de sécurité sociale alors que l'appelant soutient le contraire et indique avoir été affilié au régime de la sécurité sociale française par l'intermédiaire de la CFE (caisse des français expatriés) -lequel lui permettait de bénéficier dudit régime, au sein de cet organisme ; que de plus, le débat n'est pas ici celui du droit pour le salarié au versement de la prime, mais celui de la nature salariale ou non de celle-ci étant précisé que M. [X] justifie par les bulletins de salaires versés aux débats que, selon les périodes, cette indemnité figurait ou non sur le bulletin de salaire, quelle que soit son affectation en France ou à l'étranger ; qu'enfin, l'indemnité de fonction étant destinée à « compenser un certain nombre de contraintes : mobilité et disponibilité professionnelle « (statut du personnel SAFRAN expatriés, pièce 69 de M. [X]) apparaît liée à l'exercice de ses fonctions par le salarié et revêt en conséquence un caractère salarial ; que la société SAFRAN ne justifie pas la raison pour laquelle cette nature s'est trouvée modifiée, puisque ne figurant plus sur le bulletin de salaire de M. [X] elle perdait sa qualification juridique de salaire et se trouvait soustraite au paiement des cotisations sociales ; Considérant que pour les deux autres types d'indemnités, précitées la société SAFRAN ne conteste pas plus la chronologie ci-dessus rappelée par M. [X] ; qu'elle objecte en vain, comme précédemment, que ces indemnités n'étaient pas dues à des expatriés non soumis au régime de sécurité sociale français et qu'il s'agissait de remboursements de frais liés au séjour du salarié à l'étranger ; Mais considérant que M. [X] répond justement à cette dernière objection que les indemnités litigieuses, dès lors qu'elles étaient forfaitaires et ne correspondaient pas à des dépenses réelles exposées par lui, constituaient bien une rémunération assujettie aux cotisations sociales ; Considérant qu'en vain également la société SAFRAN excipe d'une éventuelle prescription, alors que l'appelant réplique pertinemment qu' aucune prescription ne lui est opposable dès lors que la pratique suivie par SNECMA et SAFRAN, quant à l'absence de déclaration des indemnités sur les bulletins de salaire et leur absence corrélative d'assujettissement aux cotisations, est illégale ; qu'à ce propos, la cour rappelle que la société SAFRAN, non seulement ne fournit aucun élément d'explication sur son comportement en la matière jusqu' en 2013 mais encore ne produit également aucun élément de nature à justifier le changement de sa pratique en 2013, en particulier, aucune pièce sur la nécessaire uniformisation des statuts des personnels alléguée - laquelle, au demeurant n'est pas de nature à justifier que le statut des expatriés, comme M. [X], ait pu être soustrait à l'application des dispositions légales, qui soumettent à cotisation toute rémunérations salariale ; Considérant que, dans ces conditions, la cour ordonnera à la société SAFRAN, comme demandé et dit au dispositif, d'établir des bulletins de salaire rectifiés, mentionnant, lorsque les actuels ne les précisent pas, les trois sortes d'indemnités litigieuses ; Considérant que la remise de ces bulletins permettra à M. [X] de faire valoir ses droits à la retraite ; qu'il n' y a donc pas lieu, en l'état, de condamner la société SAFRAN au paiement des cotisations éludées, étant précisé par surcroît que la qualité de M. [X] pour former une telle demande apparaît contestable ; que la remise ordonnée par la cour ne sera assortie d'aucune mesure d'astreinte, compte tenu du temps et des difficultés possibles liées à la rectification prescrite » ;

1/ ALORS QUE les indemnités visant à compenser le coût plus élevé de la vie et les frais de déplacement d'un salarié expatrié à l'étranger ont la nature de frais professionnels ; que les indemnités versées par l'employeur au salarié pour couvrir de telles charges spéciales inhérentes à l'emploi constituent en conséquence un remboursement de frais professionnels, et non un complément de salaire ; qu'en se fondant néanmoins sur les motifs impropres tirés de la mention « jusqu'en 2000 » sur les bulletins de salaire de Monsieur [X] des indemnités coût de la vie et d'éloignement et sur leur caractère forfaitaire, pour décider que ces indemnités versées à Monsieur [X] pendant ses périodes d'expatriation avaient la nature d'un salaire et non d'un remboursement de frais professionnels, la cour d'appel a violé les articles L. 3221-3 et R3243-1 du code du travail et L. 242-1 du code de la sécurité sociale ;

2/ ALORS QU' en affirmant que les indemnités de coût de la vie et d'éloignement versées à Monsieur [X] pendant ses périodes d'expatriation « ne correspondaient pas à des dépenses réelles exposées par lui » sans préciser sur quels éléments elle s'est fondée pour aboutir à cette affirmation, la cour d'appel a privé sa décision de motifs et a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

3/ ALORS QUE selon les dispositions du statut du personnel SAFRAN détaché à l'étranger depuis plus de six mois, les indemnités « coût de la vie et éloignement » visent à indemniser le surcoût pour le salarié expatrié des dépenses générées par cette expatriation, ce dont il résulte qu'elles correspondent à une indemnisation de frais professionnels ; qu'en requalifiant néanmoins ces deux indemnités en éléments de salaire sans tenir compte de ces dispositions statutaires, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L1221-1 , L. 3221-3 et R3243-1 du code du travail et 1103 du code civil ;

4/ ALORS, A TITRE SUBISIDIAIRE, QUE l'action en paiement ou répétition du salaire se priscrit par trois ans à compter du jour ou celui qui l'exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer ; que l'éventuelle illégalité d'une pratique reprochée à l'employeur relative aux salaires ne fait pas obstacle à l'application des règles d'ordre public de prescription ; qu'en l'espèce la société SAFRAN AIRCRAFT ENGINES faisait valoir dans ses conclusions d'appel qu'en admettant qu'elles aient la nature de salaire, les demandes de Monsieur [X] afférentes aux indemnités de coût de la vie et conditions d'éloignement et de fonctions étaient prescrites pour la période précédant le 23 octobre 2012, antérieure de plus de trois ans à la saisine du conseil de prud'hommes par le salarié le 23 octobre 2015 ; qu'en se fondant néanmoins pour écarter la prescription sur le motif impropre selon lequel la prescription ne serait pas opposable au salarié dès lors qu' « était illégal » le manquement reproché à l'employeur tiré de l'absence de déclaration des indemnités en cause sur les bulletins de salaire et leur non-assujettissement à cotisations (arrêt p. 10 § 2), la cour d'appel a violé l'article L3245-1 du code du travail.


TROISIÈME MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR condamné la société SAFRAN AIRCRAFT ENGINES à payer à Monsieur [X] avec intérêts au taux légal la somme de 27.577 ? à titre d'indemnité pour travail dissimulé ;

AUX MOTIFS QUE « Sur la rectification des bulletins de salaire de M. [X] : Considérant que les demandes formées en la matière par M. [X] ont pour objet les indemnités de fonction, les indemnités « coût de la vie » et indemnités « condition d'éloignement » qui jusqu'en 2000, figuraient sur les bulletins de salaire de l'appelant et qui, en ont disparu à compter de cette date, jusqu'au 1er janvier 2013 -pour ne plus apparaître sur des feuilles distinctes intitulées « indemnités journalières »- entraînant, du même coup, l'absence de versement des cotisations sociales correspondantes ; que depuis le 1er janvier 2013 les indemnités de fonction, à l'exclusion des deux autres, ont été réintégrées dans le bulletin de salaire de M. [X] ; que M. [X] entend voir la cour ordonner à la société SAFRAN de rectifier ses bulletins de salaire ne portant pas ces indemnités qui, n'étant pas soumises aux cotisations sociales, se trouvent exclues des calculs pratiqués pour l'évaluation du montant de sa retraite ; Considérant que cette chronologie des faits invoquée par M. [X] n'est pas contestée par la société SAFRAN qui expose avoir modifié le régime des primes litigieuses, pour procéder à une uniformisation du statut de son personnel, en provenance d'entreprises différentes, ne disposant pas des mêmes rémunérations ; Considérant que s'agissant de l'indemnité de fonction, la société SAFRAN ajoute que (page 75 de ses conclusions) qu' « elle est une somme n'entrant pas dans le salaire brut tant en France qu' à l'étranger ; qu'elle est soumise aux cotisations sociales françaises uniquement lorsque le salarié travaille en France » ; qu'enfin les demandes de M. [X] tendant à voir rectifier ses bulletins de salaire ne sont recevables, du fait de la prescription, qu' à compter du 23 octobre 2012, le conseil de prud'hommes ayant été saisi le 23 octobre 2015 ; Mais considérant, sur les primes de fonction, que la société SAFRAN ne démontre pas que M. [X] aurait dépendu d'un autre régime que du régime français de sécurité sociale alors que l'appelant soutient le contraire et indique avoir été affilié au régime de la sécurité sociale française par l'intermédiaire de la CFE (caisse des français expatriés) -lequel lui permettait de bénéficier dudit régime, au sein de cet organisme ; que de plus, le débat n'est pas ici celui du droit pour le salarié au versement de la prime, mais celui de la nature salariale ou non de celle-ci étant précisé que M. [X] justifie par les bulletins de salaires versés aux débats que, selon les périodes, cette indemnité figurait ou non sur le bulletin de salaire, quelle que soit son affectation en France ou à l'étranger ; qu'enfin, l'indemnité de fonction étant destinée à « compenser un certain nombre de contraintes : mobilité et disponibilité professionnelle « (statut du personnel SAFRAN expatriés, pièce 69 de M. [X]) apparaît liée à l'exercice de ses fonctions par le salarié et revêt en conséquence un caractère salarial ; que la société SAFRAN ne justifie pas la raison pour laquelle cette nature s'est trouvée modifiée, puisque ne figurant plus sur le bulletin de salaire de M. [X] elle perdait sa qualification juridique de salaire et se trouvait soustraite au paiement des cotisations sociales ; Considérant que pour les deux autres types d'indemnités, précitées la société SAFRAN ne conteste pas plus la chronologie ci-dessus rappelée par M. [X] ; qu'elle objecte en vain, comme précédemment, que ces indemnités n'étaient pas dues à des expatriés non soumis au régime de sécurité sociale français et qu'il s'agissait de remboursements de frais liés au séjour du salarié à l'étranger ; Mais considérant que M. [X] répond justement à cette dernière objection que les indemnités litigieuses, dès lors qu'elles étaient forfaitaires et ne correspondaient pas à des dépenses réelles exposées par lui, constituaient bien une rémunération assujettie aux cotisations sociales ; Considérant qu'en vain également la société SAFRAN excipe d'une éventuelle prescription, alors que l'appelant réplique pertinemment qu' aucune prescription ne lui est opposable dès lors que la pratique suivie par SNECMA et SAFRAN, quant à l'absence de déclaration des indemnités sur les bulletins de salaire et leur absence corrélative d'assujettissement aux cotisations, est illégale ; qu'à ce propos, la cour rappelle que la société SAFRAN, non seulement ne fournit aucun élément d'explication sur son comportement en la matière jusqu' en 2013 mais encore ne produit également aucun élément de nature à justifier le changement de sa pratique en 2013, en particulier, aucune pièce sur la nécessaire uniformisation des statuts des personnels alléguée - laquelle, au demeurant n'est pas de nature à justifier que le statut des expatriés, comme M. [X], ait pu être soustrait à l'application des dispositions légales, qui soumettent à cotisation toute rémunérations salariale ; Considérant que, dans ces conditions, la cour ordonnera à la société SAFRAN, comme demandé et dit au dispositif, d'établir des bulletins de salaire rectifiés, mentionnant, lorsque les actuels ne les précisent pas, les trois sortes d'indemnités litigieuses ; Considérant que la remise de ces bulletins permettra à M. [X] de faire valoir ses droits à la retraite ; qu'il n' y a donc pas lieu, en l'état, de condamner la société SAFRAN au paiement des cotisations éludées, étant précisé par surcroît que la qualité de M. [X] pour former une telle demande apparaît contestable ; que la remise ordonnée par la cour ne sera assortie d'aucune mesure d'astreinte, compte tenu du temps et des difficultés possibles liées à la rectification prescrite » ;

ET AUX MOTIFS QU' « il y a lieu de condamner la société SAFRAN à payer à M. [X] la somme qu'il réclame au titre de l'indemnité pour travail dissimulé, faute pour la société de s'expliquer sérieusement sur son comportement et d'apporter la preuve des affirmations qu'elle se borne seulement à faire ; que cette indigence à rendre compte de son comportement caractérise le caractère intentionnel du délit de travail dissimulé » ;

1/ ALORS QUE la cassation entraîne, sans qu'il y ait lieu à une nouvelle décision, l'annulation par voie de conséquence de toute décision qui est la suite, l'application ou l'exécution du jugement cassé ou qui s'y rattache par un lien de dépendance nécessaire ; que par application de l'article 624 du code de procédure civile, la cassation des chefs de dispositif de l'arrêt critiqués dans le deuxième moyen de cassation retenant que les indemnités de fonction, de coût de la vie et d'éloignement devaient être réintégrées dans les bulletins de salaire de Monsieur [X] entraînera, par voie de conséquence, la censure du chef de dispositif qui, pour ce motif, a condamné la société au paiement de dommages et intérêts pour travail dissimulé ;

2/ ALORS QU'en vertu de l'article L.8221-5 du code du travail, le délit de travail dissimulé n'est caractérisé que lorsque l'employeur s'est soustrait de manière intentionnelle à l'accomplissement des formalités prévues par l'article L.3243-2 du code du travail ; qu'en condamnant la société SAFRAN AIRCRAFT ENGINES pour travail dissimulé au seul regard de l'absence de démonstration par cette dernière du caractère non salarial des indemnités de coût de la vie et conditions d'éloignement et de fonctions accordées au salarié non mentionnés sur les bulletins de salaire de Monsieur [X], sans caractériser une intention de dissimulation d'emploi salarié de sa part, la cour d'appel a violé l'article L.8221-5 du code du travail ;

3/ ALORS QUE le caractère intentionnel ne peut se déduire de la seule erreur de qualification de l'employeur ; qu'en condamnant la société SAFRAN AIRCRAFT ENGINES pour travail dissimulé au seul regard de l'absence de démonstration par cette dernière du caractère non salarial des indemnités non mentionnées sur les bulletins de salaire du salarié, cependant que l'erreur de qualification des indemnités en cause reprochée à l'exposante ne caractérisait pas en soi l'intention de dissimulation d'emploi, la cour d'appel a violé les articles L.8221-1 et L8221-5 du code du travail ;

4/ ALORS QUE c'est au salarié qui réclame le paiement d'une indemnité pour travail dissimulé d'apporter la preuve de l'intention de dissimulation ; qu'en reprochant à la société son « indigence à rendre compte de son comportement » (arrêt p. 10 § 6), la cour d'appel, qui a fait reposer intégralement sur l'employeur la charge de la preuve, a violé l'article 1353 du code civil.


QUATRIEME MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR condamné la société SAFRAN AIRCRAFT ENGINES à payer à Monsieur [X], avec intérêts au taux légal à compter de ce jour, qui se capitaliseront lorsqu'ils seront dus pour une année entière, la somme de 5.762,18 ? à titre de dommages et intérêts pour non remboursement des frais de location de logement ;

AUX MOTIFS QUE « SUR LES FRAIS PROFESSIONNELS EXPOSES A TAIWAN : Considérant qu'à ce dernier titre, M. [X] sollicite le paiement de la somme de 5762, 18 ?, l'appelant requérant subsidiairement que cette somme lui soit accordée à titre de dommages et intérêts pour les dépenses qu'il a dû exposer lors de son retour à TAIWAN, entre le 10 juillet et le 2 août 2014, pour effectuer son déménagement (frais de location de son logement et de son véhicule) ; Considérant que la société SAFRAN s'est refusée à prendre en charge ces dépenses au motif qu'elles ne constituaient pas des frais professionnels dès lors que M. [X] n'était plus en mission d'expatriation à TAIWAN à compter du 1er juillet 2014 ; Mais considérant que bien qu'en dehors des dates de la mission d'expatriation de M. [X], la société SAFRAN a cependant accepté de faire bénéficier celui-ci, « à titre exceptionnel », d'une mission de 15 jours calendaires pour son déménagement, tout en limitant la prise en charge aux frais de restauration et d'hôtel ainsi qu'au billet de retour de M. [X] et de son épouse ; Considérant que compte tenu des vicissitudes professionnelles et médicales (deux nouveaux accidents du travail) vécues en France par M. [X] -qui avait quitté TAIWAN début avril 2014 pour quelques jours afin de rencontrer sa hiérarchie et n'y est revenu que trois mois plus tard, avec une nouvelle affectation de poste à Evry Corbeil à effet du 18 avril suivant- le déménagement ne pouvait avoir lieu avant la date du 30 juin 2014, fin de l'expatriation de l'appelant en Chine et la prorogation de sa mission devenait inévitable ; que cette prolongation procédant du maintien du salarié en France par la décision de son employeur puis une succession d'arrêts maladie causés par des accidents du travail n'était pas imputable à M. [X] ; qu'à défaut de pouvoir se rattacher formellement à l'ordre de mission, établi par l'employeur, les dépenses litigieuses exposées par l'appelant -dont le montant n'est pas contesté- apparaissent se rattacher au moins à l'objet de cet ordre de mission ; qu'ainsi, le refus de la société SAFRAN de rembourser la somme litigieuse, comme d'autres comportements fautifs de cette société décrits plus haut, constitue à tout le moins un manquement préjudiciable, contraire à l'esprit de loyauté qui doit animer les parties à un contrat de travail ; que conformément à la demande subsidiaire présentée par M. [X] la somme précitée sera donc mise à la charge de la société SAFRAN, à titre de dommages et intérêts ; Considérant que toutes les sommes allouées par le présent arrêt à M. [X] revêtent un caractère indemnitaire ; qu'elles seront assorties des intérêts au taux légal à compter de ce jour, lesquels se capitaliseront quand ils seront dus pour une année entière » ;

ALORS QU'en condamnant la société au paiement de dommages et intérêts pour non remboursement des frais de location de logement et de véhicule automobile postérieurs au 1er juillet 2014, cependant qu'elle constatait elle-même que les demandes de remboursement de frais professionnels sollicitées par Monsieur [X] n'étaient pas rattachables à l'objet de sa mission, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé les articles 1134, devenu 1103, 1104 et 1193 du code civil, et L1221-1 du code du travail.