Comment gérer en pratique une enquête pour harcèlement ?
Pour rappel, l’article L.1152-1 du Code du travail prohibe les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail du salarié, susceptible de porter une atteinte à ses droits, à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.
L’obligation de sécurité de l’employeur
Selon l’article L.4121-1 du Code du travail, l’employeur est tenu vis-à-vis de ses salariés d’une obligation de sécurité. Il se doit de protéger la santé physique et mentale de ses salariés. Il s’agit d’une obligation de résultat.
Dans ce cadre, dès lors que l’employeur a connaissance de faits susceptibles de caractériser un harcèlement moral, alors il se doit de réagir.
Les mesures à prendre par l’employeur en cas de signalement d’une situation de harcèlement moral
L’employeur se doit de mener une enquête préalable avant toute prise de décision quant aux faits qui lui sont rapportés.
Le Code du travail ne prévoit pas de procédure spécifique quant au déroulement de cette enquête. Néanmoins, par le biais de cette enquête, il va devoir constater la réalité, la nature et l’ampleur des faits qui sont reprochés.
Cette enquête pourra être menée par l’employeur lui-même ou son représentant.
La situation devra être étudiée de manière approfondie et contradictoire. Cette enquête devra également être exhaustive, impartiale et confidentielle.
En pratique, l’employeur ou son représentant pourra notamment mener les actions suivantes en organisant : une entrevue de la potentielle victime avec la médecine du travail, une audition des collègues de travail, un entretien avec la potentielle victime sur les circonstances des faits dénoncés, une audition de la personne qui est accusée.
Dans le cadre de cette enquête, et pour des questions de preuve, il est conseillé à l’employeur de se constituer un dossier écrit le plus complet possible sur le sujet. Ainsi, il pourra rédiger un rapport d’enquête détaillé avec le plus de pièces justificatives possibles, tels que : des témoignages écrits, des comptes rendus écrits des auditions, des préconisations de la médecine du travail, les éventuels antécédents disciplinaires de la personne accusée, des conclusions et des préconisations.
Le but est de limiter au maximum l’éventuel risque pénal de l’employeur si les faits sont avérés, et le risque de voir sa responsabilité engagée pour manquement à son obligation de sécurité de résultat.
Néanmoins, sur le déroulé de l’enquête interne, la Cour de cassation a apporté des précisions intéressantes en la matière, à savoir qu’au regard du principe du contradictoire et des droits de la défense, l’employeur n’est pas tenu d’entendre le salarié qui est accusé, ou encore de lui donner accès au dossier – ( Cass. Soc., 29 juin 2022, n°20-22.220). Cela est valable dès lors que la décision qui sera potentiellement prise par l’employeur est susceptible d’être discutée ultérieurement devant les juridictions de jugement.
En matière de procédure disciplinaire, le délai de prescription est de 2 mois – (L.1332-4 du Code du travail). L’employeur devra donc s’emparer de ce sujet avec rapidité et efficacité car dès l’instant où il aura connaissance de la faute commise, il ne disposera que d’un délai de deux mois pour convoquer le salarié à un entretien préalable ou lui adresser un avertissement. Si une enquête interne est diligentée, le délai de 2 mois va courir à compter de la date de clôture de l’enquête.
par Me Mélanie Le Corre
Avocat au Barreau de Paris
Expert en droit du travail
MLC Avocat
Fascicule mis à jour le 30 octobre 2023.
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