Conséquences du refus de la modification du contrat par le salarié

Lorsqu’un salarié décide de refuser la modification de son contrat de travail proposée par son employeur, ce dernier dispose de deux options : soit il renonce à son souhait de modification, soit il procède au licenciement du salarié.

 

Le licenciement du salarié

Le motif du licenciement doit s’appuyer sur le motif à l’origine de la modification refusée par le salarié. Un licenciement prononcé en raison du refus du salarié de modifier son contrat de travail pourrait encourir la nullité.

En effet, selon la Cour de cassation « le seul refus d’accepter une modification de son contrat de travail ne constitue pas en soi une cause réelle et sérieuse du licenciement » – (  Cass. Soc., 11 juillet 2018, n°17-12.747).

L’employeur devra donc respecter la procédure de licenciement applicable en fonction du motif.

Pour illustration, si la modification proposée au salarié, à savoir un changement de lieu de travail, était motivée par la fermeture de son site d’origine, alors l’employeur devra procéder à un licenciement pour motif économique.

Le licenciement prononcé par l’employeur emprunte son motif à la modification légitimement refusée par le salarié – (  Cass. Soc., 29 mai 2019, n°17-17.929).

Néanmoins, il demeure une exception lorsque la modification du contrat de travail est consécutive à un transfert d’entreprise tel que prévu par l’article L.1224-1 du Code du travail. Dans ce cas, le refus du salarié de modifier son contrat de travail constitue une cause réelle et sérieuse de licenciement – (  Cass. Soc., 1er juin 2016, n°14-21.143).

 

La jurisprudence en la matière

Lorsque l’employeur tente d’imposer unilatéralement au salarié une modification de son contrat de travail, le salarié peut décider de prendre lui-même l’initiative de la rupture de son contrat de travail. Il pourra ainsi soit prendre acte de la rupture de son contrat de travail aux torts de l’employeur, soit faire une demande de résiliation judiciaire du contrat de travail – (  Cass. Soc., 7 mars 2018, n°15-27.458).

Ces mécanismes de rupture du contrat de travail sont néanmoins à manier avec précaution. En effet, très récemment, dans un arrêt rendu le 25 janvier 2023, la Cour de cassation a retenu que le fait qu’une tâche donnée au salarié soit différente de celle qu’il exécutait habituellement ne caractérise pas une modification de son contrat de travail dans la mesure où elle correspond à sa qualification, que sa position reste inchangée et qu’il ne subit ni rétrogradation, ni déclassification, et conserve sa rémunération. Dans cette affaire, la Cour de cassation a donc considéré que la prise d’acte de la rupture du contrat de travail devait s’analyser en une démission – (  Cass. Soc., 25 janvier 2023, n°21-18.141).

Plus largement, la jurisprudence considère que la clause par laquelle l’employeur se réserve le droit de modifier, en tout ou en partie le contrat de travail, est nulle. Le salarié ne peut renoncer aux droits qu’il tient de la loi – (  Cass. Soc., 27 février 2001, n°99-40.219).

Notons que pour un salarié protégé, son accord est toujours nécessaire, qu’il s’agisse d’une simple modification des conditions de travail ou d’une modification de son contrat de travail. Si le salarié protégé refuse la proposition, soit l’employeur gardera le salarié aux conditions de travail actuelles, soit il engagera une procédure de licenciement, avec nécessairement accord préalable de l’inspecteur du travail.

En la matière, un arrêt récent du Conseil d’Etat est venu préciser que pour apprécier la demande d’autorisation de licenciement d’un salarié protégé fondé sur un refus de modification de son contrat de travail pour un motif économique, l’Administration doit vérifier si la modification était justifiée par un motif économique, et non pas si cette modification du contrat de travail était « strictement nécessaire » à la sauvegarde de la compétitivité – (  CE, 15 novembre 2022, n°449317).

 

 

Me Mélanie Le Corre

par
Avocat au Barreau de Paris
Expert en droit du travail
MLC Avocat

Fascicule mis à jour le 15 mars 2023.

Tous droits réservés.

-

ATTENTION ! Cet article est un extrait.

Abonnez-vous pour accéder à l'intégralité du contenu.

Ces offres peuvent vous intéresser

Maitre Data

Abonnez-vous !

Manuel Social

Trouvez la réponse à toutes vos questions en Droit Social

Offre spéciale
Le Manuel Social
Abonnez-vous !

Actualité

  • Discrimination / Preuve

    La Cour d'appel qui retient que le salarié ne fait mention d'aucune mesure discriminatoire dont il aurait été victime, alors qu'elle avait constaté que le salarié avait écrit à son employeur pour se plaindre de propos racistes à son...

    Jurisprudence29 novembre 2024

  • Délai de prescription / Interruption / Procédure

    La demande en justice, même en référé, interrompt le délai de prescription ainsi que le délai de forclusion. L'interruption est non avenue si le demandeur se désiste de sa demande ou laisse périmer l'instance, ou si sa demande est...

    Jurisprudence29 novembre 2024

  • Journal Officiel27 novembre 2024

    32 Décret n° 2024-1065 du 26 novembre 2024 relatif aux valeurs de référence pour l'évaluation prévue à l'article 5 de la directive (UE) 2022/2041 du Parlement européen et du Conseil du 19 octobre 2022 relative à des salaires minimaux adéquats dans l'Union européenne

  • Attribution de chèque vacances

    Paye24 novembre 2024

  • Expert-comptable / Responsabilité professionnelle / Devoir de conseil

    Une société engage un expert-comptable pour reprendre sa comptabilité et établir les paies de ses salariés. Une salariée, embauchée avant la mission de l’expert, demande la requalification de son contrat de travail à temps partiel en...

    Jurisprudence21 novembre 2024

Recherche

Recevoir la newsletter

Gérer vos Cookies

Nous utilisons les cookies sur notre site.

Ces cookies permettent de mesurer le trafic du site et de personnaliser votre expérience

Accepter Continuer sans accepter

Voir la politique de confidentialité