Lettre de licenciement : Quels sont les faits qui peuvent être mentionnés ?

Si l’employeur est tenu de convoquer le salarié à un entretien préalable à une éventuelle mesure de licenciement lorsqu’une telle mesure est envisagée,  les griefs évoqués dans le cadre de cet entretien ne lient pas l’employeur quant aux motifs qu’il souhaite retenir pour justifier la rupture du contrat de travail.

 

La Cour de Cassation considère à cet égard que le Juge ne peut écarter sans les examiner les griefs énoncés dans la lettre de licenciement, même lorsqu’ils n’ont pas été évoqués lors de l’entretien préalable. Elle vient de le rappeler dans son arrêt du 21 septembre 2011 – (  Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 21 septembre 2011, 10-14.179), tout en apportant une précision utile.

En effet, la circonstance que des griefs énoncés dans la lettre de licenciement n’aient pas été indiqués au salarié au cours de l’entretien préalable caractérise une irrégularité de forme mais n’empêche pas de décider que ces griefs constituent une cause réelle et sérieuse de licenciement.

Ainsi, a minima, le salarié peut se plaindre que ses droits n’ont pas été respectés et réclamer ainsi des dommages et intérêts pour non-respect de la procédure.

En effet, au cours de l’entretien préalable (ou mise à pied conservatoire) d’un éventuel licenciement, l’employeur doit indiquer les motifs de la décision envisagée afin de recueillir les explications du salarié. Les limites du litige ne sont fixées que par les motifs du licenciement énoncés dans la lettre de licenciement, les Juges n’ayant pas à examiner d’autres griefs allégués par l’employeur que ce soit en cours d’instance, dans la lettre de convocation à l’entretien préalable ou au cours de l’entretien préalable.

Ainsi, les juridictions prud’homales ne peuvent apprécier la légitimité des motifs du licenciement au regard du déroulement de l’entretien préalable ou des griefs qui ont été énoncés par l’employeur à l’occasion de cet entretien, si les griefs sont différents de ceux énoncés dans la lettre de licenciement qui, seule, fixe les limites du litige.

 

Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 21 septembre 2011, 10-14.179 :

« Attendu, ensuite, que la circonstance, qu’à l’exclusion de l’altercation du 18 décembre 2007 au cours de laquelle le salarié a tenté de gifler l’employeur, les autres griefs énoncés par la lettre de licenciement visant son attitude désinvolte et provocatrice sur les chantiers n’aient pas été indiqués au salarié au cours de l’entretien préalable, caractérise une irrégularité de forme dont l’intéressé n’a pas demandé réparation, qui n’empêche pas de décider que ces griefs constituent une cause réelle et sérieuse de licenciement ; »

 

La lettre de licenciement fixe ainsi les limites du litige, c’est-à-dire qu’en cas de contestation du licenciement, l’employeur ne pourra pas invoquer d’autres faits devant le Conseil de prud’hommes.

Cette règle ne s’applique pas au salarié, qui pourra par exemple mettre en lumière le véritable motif de son licenciement.

La lettre de licenciement doit être étayée par des faits précis et matériellement vérifiables, c’est-à-dire qu’elle ne doit pas se limiter à des considérations générales telles que « comportement agressif » ou « mauvaise volonté ». Doivent figurer des illustrations précises et datées.

Le licenciement pour faute et le licenciement pour insuffisance professionnelle sont exclusifs l’un de l’autre : il n’est pas possible de motiver un licenciement pour faute par des faits relevant de l’insuffisance professionnelle, sous peine de voir le licenciement invalidé par un Conseil de prud’hommes.

La preuve de la faute grave et de la faute lourde repose sur l’employeur. Concernant la faute simple, la preuve est davantage partagée.

Devant le Conseil de prud’hommes, le salarié peut verser aux débats tous les éléments dont il a eu connaissance à l’occasion de l’exercice de ses fonctions et dont la production est strictement nécessaire à l’exercice de sa défense. Il peut par exemple transférer vers son adresse e-mail personnelle des documents de l’entreprise nécessaires à la démonstration de la véritable raison de son licenciement – (Par exemple, est irrecevable l’enregistrement d’une conversation téléphonique privée à l’insu de l’auteur des propos invoqués. En revanche, un SMS est parfaitement recevable).

 

Prescription des faits fautifs

Aucun fait ne peut donner lieu à lui seul à sanction au-delà d’un délai de 2 mois. Autrement dit, l’employeur ne peut licencier un salarié pour des faits remontant à plus de 2 mois avant la convocation à l’entretien préalable ou le prononcé d’une mise à pied conservatoire.

En revanche, des faits même prescrits peuvent venir renforcer le motif de licenciement lorsque ce dernier est motivé principalement par de nouveaux faits de même nature non prescrits.

 

Prescription des sanctions

Les mêmes faits ne peuvent être sanctionnés deux fois, c’est-à-dire qu’il n’est pas possible de motiver un licenciement uniquement par des faits ayant déjà été sanctionnés.

En revanche, des faits même déjà sanctionnés peuvent venir renforcer le motif de licenciement lorsque ce dernier est motivé principalement par de nouveaux faits non déjà sanctionnés. Seule réserve : aucune sanction datant de plus de 3 ans ne peut ainsi être invoquée.

 

 

Me Nicolas BECK

par
Avocat au Barreau de Paris
Expert en droit du travail

Fascicule mis à jour le 10 février 2023.

Tous droits réservés.

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