Nouveauté : Barème plafonnant les indemnités de licenciement : jugé inconventionnel
Le Conseil de Prud’hommes de Troyes a jugé que le barème plafonnant les indemnités de licenciement sans cause réelle et sérieuse n’était pas conventionnel au regard des normes de l’Organisation Internationale du Travail (OIT).
Plus précisément, les fondements invoqués lors du jugement du 13 décembre 2018 – RG – 18/00036 sont la Charte sociale européenne de 1996 et la convention 158 de l’OIT.
D’après le CPH de Troyes, le barème n’est donc pas conforme au droit international et européen.
Le barème avait été instauré par les ordonnances réformant le droit du travail en 2017 qui sont en vigueur depuis plus d’un an maintenant. Le barème prévoit que les dommages et intérêts d’un licenciement abusif ne peuvent excéder 20 mois. Il prévoit également une série d’indemnités directement fonction de l’ancienneté du salarié au sein la société.
Le Conseil de prud’hommes précise que :
« L’article L.1235-3 du Code du travail en introduisant un plafonnement limitatif des indemnités prud’homales ne permet pas au juge d’apprécier les situations individuelles des salariés injustement licenciés dans leur globalité et de réparer de manière juste le préjudice qu’ils ont subi.
De plus, ces barèmes ne permettent pas d’être dissuasifs pour les employeurs qui souhaiteraient licencier sans cause réelle et sérieuse un salarié.
Ces barèmes sécurisent davantage les fautifs que les victimes et sont donc inéquitables.
En conséquence, le Conseil juge que ce barème viole la charte sociale européenne et la convention n°158 de l’OIT.
Les barèmes prévus à l’article L.1235-3 du Code du travail sont donc inconventionnels ».
L’article 24 de la Charte sociale européenne rappelle qu’en cas de licenciement, les parties et en conséquents les juridictions s’engagent en l’absence de motif valable à verser une indemnité adéquate ou à une répartition appropriée.
Par ailleurs l’article 10 de la convention 158 de l’OIT ratifiée par la France stipule pour sa part que si les tribunaux arrivent à la conclusion que le licenciement est injustifié, et si, compte tenu de la législation et de la pratique nationale, ils n’ont pas le pouvoir ou n’estiment pas possible, dans les circonstances, d’annuler le licenciement et/ou d’ordonner ou de proposer la réintégration du travailleur, ils devront être habilités à ordonner le versement d’une indemnité adéquate ou tout autre forme de réparation considérée comme appropriée.
Dans ce jugement le salarié a obtenu une indemnité correspondant à 9 mois de salaires pour une ancienneté supérieure à 2 ans.
Si la barème avait été appliqué au cas d’espèce, le salarié aurait obtenu une indemnité équivalent à 3.5 mois de salaire.
L’argumentaire plaidé par l’avocat est également celui des syndicats employés qui pour certains (Force Ouvrière) avaient déjà déposé une plainte auprès de l’OIT et auprès du Comité Européen des Droits Sociaux (CEDS).
A noter que les ordonnances travail de 2017 prévoyait déjà plusieurs possibilités d’exonération du barème tel que le harcèlement, pour autant, il s’agit d’une première.
Afin de déterminer si cette décision fera jurisprudence, il conviendra de s’assurer que :
- l’employeur forme un appel de la décision ;
- de s’assurer que la Cour d’appel et surtout la Cour de cassation estime que les fondements de l’OIT et de la Charte sociale européenne sont valables.
Fascicule mis à jour le 20 décembre 2018.
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