Jurisprudence à la loupe

Cass. Soc. 17 mars 2021, n°18-25.597

Harcèlement moral / Enquête / Preuve / Obligation de loyauté / Dénonciation / L.1222-4

L’article L.1222-4 du Code du travail rappel qu’aucune information concernant personnellement un salarié ne peut être collectée par un dispositif qui n'a pas été porté préalablement à sa connaissance. Toutefois, la Cour de cassation rejette ce moyen de défense pour écarter le compte-rendu de l’enquête confiée par l’employeur à un organisme extérieur sur les faits reprochés à la salariée de harcèlement moral. L’enquête ne constitue pas un manquement à l’obligation de loyauté de l’employeur et n’est pas illicite et ne constitue pas une preuve déloyale comme issue d’un procédé clandestin de surveillance de l’activité du salarié. La dénonciation des faits de harcèlement moral n'est pas soumise aux dispositions de l'article L. 1222-4 du Code du travail.

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Cass. Soc., 14 avril 2021, n°19-10.232

Transfert d’entreprise / Co-employeur / Licenciement économique / Immixtion / Gestion économique

Selon la règle, que hors l'existence d'un lien de subordination, une société faisant partie d'un groupe ne peut être considérée comme un coemployeur, à l'égard du personnel employé par une autre, que s'il existe entre elles, au-delà de la nécessaire coordination des actions économiques entre les sociétés appartenant à un même groupe et de l'état de domination économique que cette appartenance peut engendrer, une confusion d'intérêts, d'activités et de direction se manifestant par une immixtion dans la gestion économique et sociale de cette dernière conduisant à la perte totale d'autonomie d'action. Dans cette affaire la haute juridiction rappelle l’importance de caractériser l’immixtion.

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Cass. Soc., 14 avril 2021, n°19-12.180

Rétrogradation / modification du contrat / Contestation / Sanction / Régularité / Avenant

Pour la Cour de cassation, le fait pour le salarié de signer un avenant au contrat de travail soumis à son acceptation et incluant une rétrogradation en mentionnant le nouvel emploi, ne prive pas ce dernier de contester la sanction prévue dont il a fait l’objet. L’acceptation par le salarié de la modification du contrat de travail proposée par l’employeur à titre de sanction n’emporte pas renonciation du droit à contester la régularité et le bien-fondé de la sanction a posteriori. Pour rappel toute sanction portant modification d'un élément substantiel du contrat de travail, exige l’accord exprès, préalable, du salarié. Le Juge reste en droit de contrôler la proportionnalité de la sanction eu égard à la faute commise.

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Cass. Soc., 14 avril 2021, n°19-16.494

Associé égalitaire / Contrat de travail / Relation de travail / Reconnaissance du statut de salarié

Pour la Cour de cassation, le fait d’être salarié à part égal, à savoir à 50%, ne prive en rien la qualification de "salarié", dès lors que l'employeur soutenait notamment dans ses conclusions d’appel que l'intéressé avait été engagé en qualité de salarié. Pour rappel, le contrat de travail ne dépend ni de la volonté exprimée par les parties, ni de la dénomination de leur convention mais des conditions de fait dans lesquelles est exercée la prestation de travail.

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Cass. soc, 8 avril 2021 n°19-21.368

Présomption / Requalification / Ecrit / CDD / Preuve / L.1242-12

La haute juridiction confirme la règle bien établie qu’un écrit spécifique est nécessaire dans le cadre d’un CDD. En l’absence d’écrit, il existe une présomption de CDI. Dans cette affaire, à défaut de pouvoir fournir un contrat CDD, la requalification est de droit. L’employeur ne peut se contenter de soulever le fait que salarié ne justifie pas ne pas avoir reçu l'exemplaire de ses différents contrats de travail ni même d'en avoir sollicité la communication.

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Cass. soc, 8 avril 2021 n°20-10.477

Requalification / Rupture du contrat de travail / CDD / Poursuite du terme / Procédure

Le salarié qui soutient avoir était embauché en CDI devant les Juges du fond ne peut soutenir en cassation la requalification de son CDD quand bien même il fournirait l’ensemble des éléments probants. La requalification est une thèse incompatible avec la thèse développée devant les Juges du fond.

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Cass. soc, 8 avril 2021 n°19-24.003

Travail dissimulé / Lien de subordination / Relation de travail / Commercial / Indépendant / L.8221-5

Un commercial a souhaité voir requalifier la relation de travail afin d’obtenir le paiement d'une indemnité pour travail dissimulé et la requalification de son contrat de travail à durée déterminée en CDI. Le commercial se fondait essentiellement sur l’article L.8221-5 en indiquant que l’employeur s’était de manière intentionnelle soustrait à l'obligation d'effectuer les déclarations sociales et/ou d'établir un bulletin de paye. La Cour de cassation rappelle que l’existence d'une relation de travail ne dépend ni de la volonté exprimée par les parties ni de la dénomination qu'elles ont donnée à leur convention mais des conditions de fait dans lesquelles est exercée l'activité des travailleurs. Le lien de subordination est caractérisé par l'exécution d'un travail sous l'autorité d'un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d'en contrôler l'exécution […] ». Enfin pour la Cour, le lien de subordination n’était pas rapporté au titre de la période écoulée.

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Cass. soc., 31 mars 2021 n°20-12.523

Transfert d’entreprise / Licenciement disciplinaire / Faute grave / L.1224-1

Une société a repris un salarié représentant syndical d’établissement au sein de son ancien employeur après autorisation de l’Inspection du travail, la Cour confirme que l’employeur repreneur est fondé à licencier le salarié pour faute grave qui, par l’opération de transfert a perdu sa protection liée à sa qualité de représentant syndical. La Cour de cassation, ne conditionne pas l’application de l’article L.1224-1 et donc le transfert automatique des contrats à l’accord express du salarié à un tel transfert.

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Cass. soc., 31 mars 2021 n°19-25.003

Représentant syndical / CSE / Élection / Représentativité / L.2143-3 / L.2314-2

La Cour de cassation précise qu’une organisation syndicale représentative dans l'entreprise ne peut désigner un représentant dans chacun des comités des établissements la composant s’il n’a pas obtenu au moins 10% des suffrages exprimés lors des dernières élections professionnelles. Ainsi conformément à l’article L.2314-2, un syndicat représentatif au niveau de l'entreprise ne peut désigner un représentant syndical au comité social et économique d'un établissement dans lequel il n'est pas représentatif. 

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Cass. soc., 31 mars 2021 n°19-60.253

Délégué syndical / Désignation / Usage / Engagement unilatéral / L.2141-10

La haute juridiction apporte des précisions sur la possibilité pour l’employeur de revenir sur la désignation d’un délégué syndical en sus du nombre prévu au regard de la condition d’effectif. Ainsi, ni un usage de l'entreprise ni un engagement unilatéral de l'employeur ne peuvent modifier les dispositions légales relatives au nombre des délégués syndicaux. L'employeur qui décide unilatéralement d'autoriser la désignation de délégués syndicaux alors même que la condition d'effectif n'est pas remplie, peut unilatéralement décider de revenir à l'application des textes légaux qui n'ont cessé d'être applicables, sous réserve de ne pas méconnaître le principe d'égalité entre tous les syndicats concernés et, pour répondre à l'exigence de loyauté qui s'impose en la matière, de les en informer préalablement.

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Cass.soc., 14 avril 2021 n°19-24.079

Discrimination / Contrat de travail / Conditions de travail / Tenue vestimentaire / L.1321-3 / L.1321-5

L’employeur peut prévoir dans le règlement intérieur ou dans une note de service soumise aux mêmes dispositions que le règlement intérieur, en application de l’article L. 1321-5 du Code du travail dans sa rédaction applicable, une clause de neutralité interdisant le port visible de tout signe politique, philosophique ou religieux sur le lieu de travail, dès lors que cette clause générale et indifférenciée n’est appliquée qu’aux salariés se trouvant en contact avec les clients. En l’absence d’une telle clause, un licenciement pour faute grave pour atteinte à l’image de marque de l’employeur n’est pas possible. 

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Cass. soc. 3 février 2021 n°18-20.812

Temps de travail / Cadre dirigeant / Statut / L.3111-2

La Cour de cassation valide le rattrapage de salaire au titre du paiement des heures supplémentaires lorsque les conditions du statut de cadre dirigeant prévues à l’article L.3111-2 du Code du travail ne sont pas respectées. Après avoir examiné les fonctions réellement exercées par la salariée, cette dernière ne jouissait pas d'une réelle autonomie de son emploi du temps, étant tenue d'être présente au siège de l'association aux heures de présence des autres salariés.

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Cass. soc. 17 mars 2021 n°19-25.313

Rupture conventionnelle / PSE / Rupture amiable / Preuve / Vice du consentement

La salarié qui a accepté une rupture conventionnelle de son plein gré le 10 décembre et qui apprend le 18 décembre l’annonce d’un plan de sauvegarde de l’emploi, sans pour autant  exercer sa faculté de rétractation, n’apporte pas la preuve suffisante de l'existence d'un vice du consentement. Le simple fait de soutenir que le plan était envisagé bien avant la signature de la rupture conventionnelle n’est pas suffisant.

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Cass. soc. 17 mars 2021 n°18-16.947

UES / Salarié protégé / Inspection du travail / PSE / Licenciement économique

L’autorisation de l’Inspection du travail du licenciement d’un salarié protégé ne fait pas obstacle à son annulation, si la Cour a souverainement constaté que les licenciements entrepris participaient d'un seul et même projet décidé au niveau de l'UES, de sorte qu’un PSE au niveau de l’UES aurait du être mis en œuvre. il appartient à la juridiction judiciaire d'apprécier l'incidence de la reconnaissance d'une UES quant à la validité des licenciements.

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Cass. soc. 3 mars 2021 n° 19-20.265

Nullité / Transaction / Dol / Licenciement / Indemnité transactionnelle

L’employeur qui connaissait le mandat du salarié ainsi que son statut protecteur attaché à son mandat de conseiller prud'homme au moment du licenciement ne peut par la suite demander la nullité de la transaction.

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Cass. soc. 17 février 2021 n° 19-15.215

Forfait jours / Preuve / Entretien annuel / Santé et sécurité / Rappel de salaire / Travail dissimulé / Heures supplémentaires / Congés payés / L.3121-46

C’est à l’employeur de démontrer qu’il respecte les stipulations de l’accord collectif qu’il a négocié permettant de s’assurer de la protection de la santé et de la sécurité des salariés en forfait jours. A défaut le salarié est en droit de soulever la nullité et donc l’annulation de la convention de forfait jours.

Dans cette affaire, la Cour de cassation confirme la décision de la Cour d’appel de condamner l’employeur a 350.000 euros aux titres des heures supplémentaires et à 35.000 euros au titre des congés payés afférents.

Par ailleurs, la simple référence à l’accord d’entreprise ne vaut pas analyse de la conformité de la convention de forfait.

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Cass. soc. 3 mars 2021 n°19-24.232

Harcèlement moral / Preuve / Prise d’acte / L. 1154-1 / Souffrance au travail

La Cour de cassation considère que le témoignage de plusieurs salariés évoquant des pressions en matière d’objectifs imposés […], aux superviseurs et aux téléconseillers par une organisation très hiérarchisée […] et qui se traduisaient par une surveillance des prestations décrite comme du "flicage" et, d'autre part, d'une analyse de leurs prestations qu'ils ressentaient comme une souffrance au travail […] s’apparente à une forme d’harcèlement moral collectif de nature à justifier une demande de dommages-intérêts au titre du manquement de l'employeur à l'obligation de sécurité.

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Cass. Soc., 27 janvier 2021, nº 19-22.038

Heures supplémentaires / Mandat de représentation / Temps de trajet

Doit être considéré comme du temps de travail effectif susceptible de déclencher les heures supplémentaires, le temps de trajet qui excède la durée habituelle du temps de trajet domicile – travail lorsque ce déplacement est rendu nécessaire pour l’exercice d’un mandat de représentation.

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Cass. Soc. 10 février 2021 n°19-14.315

Faute lourde / Licenciement disciplinaire / Conflit d’intérêts / Intention de nuire

Justifie un licenciement pour faute lourde, le salarié qui conclut des contrats avec des sociétés dont il est actionnaire, sans prévenir en amont son employeur.

Pour la Cour de cassation, la volonté manifeste de dissimuler un conflit d’intérêts caractérise l’intention de nuire du salarié à l’égard de l’entreprise. L’intention de nuire est également démontrée par la mise en avant de son intérêt personnel au détriment de son obligation de loyauté.

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Cass. soc. 17 février 2021 n°19-18.149

Harcèlement sexuel / Obligation de sécurité / Sanction disciplinaire / Proportionnalité

L’employeur doit nécessairement prononcer une sanction proportionnée à la faute commise par le salarié. De la même manière qu’une sanction trop sévère pourra être annulée, l’employeur peut être condamné pour ne pas avoir prononcé une sanction suffisante, notemment au regard de son obligation de sécurité. En l’espèce, l’employeur manque à son obligation de sécurité s’il se contente de sanctionner via un avertissement seulement, un salarié condamné pénalement pour harcèlement sexuel. Dans cette affaire, la Cour de cassation a reconnu la résiliation judiciaire aux torts de l’employeur.

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Cass. Soc., 17 février 2021, n°19-14.812

Entreprise de travail temporaire / Sécurité / Equipement de protection / L.1251-21

Pour la Cour de cassation, l’entreprise de travail temporaire doit être en mesure de justifier qu’elle a prise les mesures nécessaires pour assurer la sécurité du travailleur, notemment en fournissant les équipement de protection que sont les casques et les chaussures de sécurité. L’entreprise utilisatrice n’est pas l’unique responsable des conditions d’exécution du travail  pour ce qui a trait à la santé et à la sécurité au travail.

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Cass. Soc. 3 février 2021, n°18-25-348

Commissions commerciales / Convention collective / Arrêt de travail / Congé maternité

L’employeur doit prendre en compte la moyenne des rémunérations versées au cours des 12 mois précédant chaque arrêt de travail afin de déterminer le montant des commissions commerciales dues à une salariée pendant son arrêt maladie et congé maternité lorsque celles-ci sont calculées en fonction des résultats de la salariée et de la société sur l’année entière – peu important l’évolution de la situation économique de l’entreprise et la rémunération des autres commerciaux pendant les périodes d’absence de la salariée.

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Cass. Soc., 17 février 2021, n°19-20.635

Clause de non-concurrence / Contrepartie financière / Renonciation / Transaction / 2048 du Code civil

Un salarié qui conclut une transaction avec son employeur ne peut plus exiger le paiement de la contrepartie financière sous-jacente à la clause de non concurrence après la signature de la transaction.

Pour la Cour de cassation, le fait que l’employeur n’est pas renoncé à la clause ainsi que l’absence de mention de la clause au sein de la transaction, ne contraint pas l’employeur à s’acquitter de la contrepartie financière une fois la transaction signée. En l’espèce, la transaction a donc fait échec à toute demande ultérieure du salarié et tout litige né ou à naître ayant existé entre les parties. Pour rappel, les transactions se renferment dans leur objet : la renonciation qui y est faite à tous droits, actions et prétentions, ne s'entend que de ce qui est relatif au différend qui y a donné lieu.

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Cass. Soc, 3 février 2021, n°19-19.076

Transaction / Litige / Contentieux / Licenciement économique / Congé de reclassement / 1134 et 2044 du Code civil

La Cour de cassation confirme que la mise en œuvre d'un accord atypique ou d'un engagement unilatéral de l'employeur dont les salariés tiennent leur droit ne peut être subordonnée à la conclusion de contrats individuels de transaction. Ainsi, l’employeur qui prévoit une indemnité transactionnelle par accord collectif doit s’y tenir. La transaction qui ne respecterait pas cet accord se verra donc annulée indifféremment d’une convention individuelle signée ultérieurement avec le salarié. L'exécution de cette transaction par l'une des parties, ne peut avoir pour effet de priver le salarié du bénéfice de l'avantage qu'il tient de l'accord collectif.

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Cass. Soc, 27 janvier 2021, n° 17-31.046

Heures supplémentaires / Preuve / Temps de travail / L.3171-4 / Contrôle / Décompte

La Cour de cassation confirme à nouveau l’importance pour l’employeur d’être en mesure de contrôler le temps de travail effectif des collaborateurs. En l’espèce, la Cour considère que la fourniture d’un décompte imprécis doit pouvoir être complété par l’employeur sans que la charge de la preuve ne repose exclusivement sur le salarié.

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