Rupture conventionnelle : cas interdits

La rupture conventionnelle individuelle est un outil juridique par le bais duquel l’employeur et le salarié décident, d’un commun accord, de rompre amiablement le contrat de travail moyennant le versement d’une indemnité spécifique de rupture égale, à minima, à l’indemnité légale/conventionnelle de licenciement.

Si la rupture conventionnelle bénéficie d’un champ d’application relativement large, certaines situations ne permettent toutefois pas de recourir au mécanisme de la rupture conventionnelle.

 

Seul le contrat de travail à durée indéterminée peut faire l’objet d’une rupture conventionnelle

La rupture conventionnelle n’est ouverte qu’au seul contrat de travail à durée indéterminée. En effet, le recours à la rupture conventionnelle n’est expressément prévu par le Code du travail que dans le cadre de la résiliation d’un contrat de travail à durée indéterminée – (L.1237-11 du Code du travail).

Il en résulte que le contrat de travail à durée déterminée et le contrat d’apprentissage ne peuvent être rompus par le bais d’une rupture conventionnelle – (  Circ. DGT no 2009-04, 17 mars 2009). Ils peuvent toutefois être rompus d’un commun accord, hors rupture conventionnelle, des Parties(L.1243-1 du Code du travail et L.6222-18 du Code du travail).

 

Pas de rupture conventionnelle pour contourner les règles propres au licenciement économique

S’il n’est pas interdit aux Parties de convenir d’une rupture conventionnelle pendant un contexte de difficultés économiques, il n’est cependant pas permis de recourir à la rupture conventionnelle en vue de contourner les règles de procédure attachées au licenciement économique – (  Instruction DGT n°2010-02 du 23 mars 2010).

Il est notamment interdit de recourir à la rupture conventionnelle en vue d’éviter l’obligation légale de mettre en place un plan de sauvegarde de l’emploi. Pour mémoire un PSE doit être obligatoirement être mise en place dans l’hypothèse où :

  • L’employeur procéderait à 10 licenciements économiques sur une période de 30 jours – (L.1233-61 du Code du travail).
  • L’employeur a procédé pendant 3 mois consécutifs à plus de 10 licenciements au total sans atteindre 10 licenciements dans une même période de 30 jours, tout nouveau licenciement économique envisagé au cours des 3 mois suivants est soumis aux dispositions régissant le licenciement d’au moins 10 salariés sur 30 jours – (L.1233-26 du Code du travail).

Dans un arrêt du 19 janvier 2022, la Chambre sociale de la Cour de Cassation impose de prendre également en compte « les ruptures conventionnelles intervenues dans un contexte de suppression d’emploi dues à des difficultés économiques » lorsqu’elles s’inscrivent dans un « projet global et concerté de réduction des effectifs au sein de l’entreprise » – (  Cass. Soc. Le 19 janvier 2022, n°20-11.962).

Conclure une rupture conventionnelle en vue d’éviter de mettre en place un plan de sauvegarde de l’emploi peut entrainer la nullité de la rupture contractuelle puisque, réellement, le contrat de travail a été rompu pour motif économique sans mise en place d’un PSE. Ainsi, l’employeur pourrait être condamné à des dommages et intérêts pour licenciement nul dont le montant ne peut être inférieur aux salaires des six derniers mois – (L.1235-11 du Code du travail).

 

Pas de rupture conventionnelle en cas de violence morale du fait d’une situation de harcèlement moral

Selon un arrêt de la chambre sociale de la Cour de cassation rendu le 1er décembre 2013, la convention de rupture conventionnelle est nulle, si au moment de sa signature, le salarié se trouvait dans une situation de violence morale du fait du harcèlement moral régulier dont il était victime – (  Cass, soc, le 1er mars 2023, n°21-21345).

Ainsi, en raison de la violence moral résultant des agissements réguliers de harcèlement moral, la rupture conventionnelle peut être annulée, de sorte que la rupture du contrat de travail s’analysera en un licenciement nul ouvrant droit à des dommages et intérêts d’un minimum de 6 mois de salaires.

 

Pour aller plus loin

Au même titre que le licenciement, la rupture conventionnelle d’un salarié bénéficiant d’une protection particulière contre le licenciement (salarié visé par l’article L.1237-15 du Code du travail) est soumise à l’autorisation préalable de l’Inspection du travail.

Sauf exception de fraude ou de vice du consentement, une rupture conventionnelle peut également être régularisée :

  • En cas d’inaptitude d’origine professionnelle constatée par le Médecin du travail – (  Cass. Soc. Le 9 mai 2019, n°17-28767);
  • Pendant la période de grossesse, le congé maternité et les 10 semaines suivantes le retour effectif de la femme enceinte – (  Cass. Soc. Le 25 mars 2015, n°14-10149) ;
  • Pendant la période de suspension du contrat de travail même pour cause d’accident du travail ou de maladie professionnelle – (  Cass. Soc. Le 30 septembre 2014, n°13.16297).

 

 

Me Faissel Ben Osmane

par
Avocat au Barreau de Paris
Expert en droit du travail

Fascicule mis à jour le 24 octobre 2023.

Tous droits réservés.

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