Fin de contrat d’un salarié étranger en situation irrégulière

Selon l’article L.8251-1 du Code du travail, nul ne peut directement ou par personne interposée, engager, conserver à son service ou employer   pour quelque durée que ce soit un étranger non muni de titre l’autorisant à exercer une activité salariée en France.

Conséquences du licenciement d’un étranger employé irrégulièrement

En principe, l’employeur qui a occupé sciemment un étranger démuni de titre de travail ne peut pas invoquer la situation irrégulière de l’étranger pour le licencier, sous peine de réaliser un licenciement nul – (  Cass. soc. 15 mai 2007, no 06-43.205, Sté Clinique La Lauranne c/ Benkhalifa).

Cependant, dans cette hypothèse, la jurisprudence n’applique pas le régime classique de la nullité. Elle considère que l’employeur se trouve soumis aux mêmes obligations que celles résultant d’un contrat valide. La rupture ouvre donc droit pour le travailleur étranger à des dommages et intérêts – (  CA Dijon, 28 avr. 2005, Rehab c/ SAS Eurogard).

On sait que pour s’exonérer des indemnités de rupture, les employeurs ont parfois invoqué l’absence de contrat de travail ou la nullité du contrat lorsqu’ils avaient employé un salarié étranger non muni d’un titre de travail mais, dans les deux cas, la jurisprudence considère que les indemnités sont dues – (L.8251-1 du Code du travail ; Soc. 19 janv. 2000, no 97-45.268, inédit).

Si le licenciement est nul pour l’employeur ayant occupé sciemment un étranger démuni de titre de travail, le défaut d’autorisation de travail non imputable à l’employeur est considéré comme une cause réelle et sérieuse de licenciement. De même, le défaut de renouvellement d’une carte de séjour et de travail n’est pas considéré comme un cas de force majeure mais constitue une cause réelle et sérieuse de licenciement – (  Cass soc. 6 nov. 2001, no 99-42.054).

Calcul des droits

Le Code du travail indique comment calculer les droits acquis par le salarié étranger au titre de la période d’emploi illicite – (L.8252-2 du Code du travail).

Le salarié pourra tout d’abord prétendre à un rappel de salaires chaque fois qu’il n’aura pas été rémunéré – (L.8252-2-1 du Code du travail).

L’étranger employé irrégulièrement a droit, en cas de rupture de la relation de travail, à une indemnité forfaitaire égale à 3 mois de salaire, ainsi qu’au paiement des salaires et accessoires qui lui sont dus – (L.8252-2 du Code du travail).

Cette indemnité ne se cumule pas avec d’autres indemnités qui peuvent conduire à une solution plus favorable, indemnité de préavis ou de licenciement – (L.1234-5 du Code du travail et L.1234-9 du Code du travail) et, dans le cas d’un contrat à durée déterminée, dommages et intérêts pour rupture anticipée de ce dernier ou indemnité de fin de contrat – (L.1243-4 du Code du travail et L.1243-8 du Code du travail).

Cette règle de non-cumul consiste à appliquer la solution (indemnité forfaitaire ou indemnités classiques de rupture du contrat de travail) la plus favorable au salarié – (  Cass. soc., 13 févr. 2013, no 11-23.920).

Le salarié, ou ses ayants droit, bénéficient par ailleurs de la législation sur les accidents du travail et les maladies professionnelles, étant précisé que les organismes sociaux disposent d’une action récursoire contre l’employeur pour se faire rembourser la totalité des dépenses et des sommes liées à cet accident – (L.452-1 du Code de la sécurité sociale).

Contrairement à la première hypothèse où l’employeur commet nécessairement une faute, en cas de non renouvellement d’une carte de séjour, le salarié a droit à l’indemnité de licenciement – (  CA Douai, 23 juin 2004, SARL Astic c/ Ntsakala). En revanche, il ne peut prétendre à l’indemnité de préavis – (  Cass. soc., 14 oct. 1997, no 94-42.604) ni à l’application de l’article L.8252-2 du Code du travail et au versement de l’indemnité forfaitaire de 3 mois – (  Cass. soc., 3 avril 2019, no 17-17.106).

A noter que la force majeure est écartée lorsque la responsabilité de l’employeur peut être mise en cause dans le non-renouvellement de l’autorisation de travail. L’employeur est alors condamné à verser non seulement les indemnités de rupture, mais aussi des dommages-intérêts pour rupture abusive.

 

 

Me Alassane Sy

par
Avocat au Barreau de Paris
Expert en droit du travail

Fascicule mis à jour le 12 novembre 2021.

Tous droits réservés.

-

ATTENTION ! Cet article est un extrait.

Abonnez-vous pour accéder à l'intégralité du contenu.

Ces offres peuvent vous intéresser

Maitre Data

Abonnez-vous !

Manuel Social

Trouvez la réponse à toutes vos questions en Droit Social

Offre spéciale
Le Manuel Social
Abonnez-vous !

Actualité

  • DSN – Temps partiel thérapeutiques en DSN pour le régime général : DSIJ TPT obligatoires en 2024

    Net Entreprise05 décembre 2023

    Afin d’assurer la bonne prise en compte des déclarations des TPT et le versement des indemnités journalières associées, les consignes déclaratives actuelles du TPT resteront applicables durant toute l’année 2024. […]

  • Journal Officiel04 décembre 2023

    5 Arrêté du 16 novembre 2023 habilitant les territoires pour mener l'expérimentation « territoires zéro chômeur de longue durée »

  • Le BOSS comprend désormais une nouvelle rubrique relative à l’exonération applicable aux jeunes entreprises innovantes et aux jeunes entreprises universitaires (JEI-JEU). Les informations apportées portent sur l’application de la législation

    BOSS actualité04 décembre 2023

    Publication de la rubrique relative à l’exonération applicable aux jeunes entreprises innovantes et aux jeunes entreprises universitaires (JEI-JEU) Communiqué du 04/12/2023 La rubrique comporte deux chapitres: Chapitre 1 – Champ d’application (employeurs éligibles, salariés éligibles et règles de non cumul) ; Chapitre 2 – Modalités d’application (nature des cotisations exonérées, calcul de l’exonération, modalités de calcul du nombre d’heures rémunérées pour la détermination du plafond mensuel de l’exonération, plafond annuel de l’exonération, durée d’application de l’exonération, obligation d’être à jour de ses obligations de déclaration et de paiement et avis de l’administration fiscale). Ce contenu fait l’objet d’une consultation publique. La date limite d’envoi des observations formulées dans le cadre de la phase de consultation est fixée le 20janvier 2024, date après laquelle la consultation publique sera close. Une version tenant compte, le cas échéant, de certaines observations pourra être publiée. Le cas échéant, cette version tiendra également compte des évolutions liées à l’examen actuellement en cours du projet de loi de finances pour 2024. Sous cette réserve, le contenu de cette rubrique sera opposable à l’administration à compter le 1er avril 2024. À cette date, les circulaires dont les dispositions sont reprises ou modifiées par le Bulletin officiel de la sécurité sociale seront abrogées. Consulter la rubrique

  • Résumé de la loi de novembre 2023 sur le partage de la valeur au sein de l'entreprise

    Abonnés01 décembre 2023

  • 35 ans d'évolutions des conditions de travail

    DARES Données01 décembre 2023

    Entrées et nombre de bénéficiaires d'un Contrat de sécurisation professionnelle (CSP)

Recherche

Recevoir la newsletter

Gérer vos Cookies

Nous utilisons les cookies sur notre site.

Ces cookies permettent de mesurer le trafic du site et de personnaliser votre expérience

Accepter Continuer sans accepter

Voir la politique de confidentialité