Jurisprudence à la loupe
Cass.soc., 15 février 2023, n°21-22.030
Intérêt à agir / Action en justice / Syndicat / Intérêt collectif
L’action en justice menée par un syndicat afin de protéger « l’intérêt collectif » d’une profession spécifique est recevable compte tenu de l’inexécution des dispositions d’un accord collectif causant ainsi un préjudicie à ladite profession concernée par ledit accord collectif. Le fait que les dispositions de l’accord ne concernaient qu’une partie seulement des salariés, n’est pas de nature à faire échec à la validité de l’action en justice et la défense de l’intérêt collectif.Cass.soc., 25 janvier 2023, n°21-13.699
Période d'essai / Requalification /CDI / Accord du salarié / Renouvellement / Signature
En l’espèce, l’employeur avait proposé le renouvellement de la période d’essai du salarié via une lettre lui proposant le renouvellement de celle-ci et sur laquelle il apposait sa signature. Le salarié considérait que la simple apposition de sa signature ne manifestait pas sa volonté claire et non équivoque de renouveler sa période d’essai, contestant ainsi la rupture de son contrat. Pour rappel, la Cour de cassation considérait que la manifestation de volonté claire et non équivoque ne pouvait être déduite de la seule apposition de la signature du salarié sur un document établi par l’employeur – (Cass. soc 25-11-2009, n°08-43.008). Toutefois, elle a considéré comme étant valable le renouvellement acté par la signature d’un document précédée de la mention « Lu et approuvé » - (Cass. soc. 21-1-2015, n°13-23.018). Dans le cas d’espèce en 2023, la Cour se range du côté de l’employeur, considérant que les emails envoyés par le salarié confirmant que sa période d’essai a été prolongée, permettent d’apprécier sa manifestation de volonté. Dès lors, on pourra considérer que la signature peut être complétée par tout autre élément permettant de démontrer la volonté du salarié.Cass. soc. 15 février 2023 n°21-20.342
Alerte / Délit / Crime / Procédure d’alerte / Discrimination
Il résulte de l'article L.1132-3-3 du Code du travail, dans sa rédaction issue de la loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016, que le salarié qui relate ou témoigne de faits constitutifs d'un délit ou d'un crime dont il aurait eu connaissance dans l'exercice de ses fonctions, ainsi que le prévoit l'alinéa premier de ce texte, n'est pas tenu de signaler l'alerte dans les conditions prévues par l'article 8 de la loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016 organisant une procédure d'alerte graduée, exigée par le deuxième alinéa du même texte.Cass. soc. 15 février 2023 n°21-19.094
Sécurité / Préjudice / Obligation de sécurité / Communication / Action en réparation / Exécution du contrat de travail
L'action par laquelle un salarié sollicite la réparation du préjudice résultant de la remise tardive ou incomplète de l'attestation d'exposition aux agents chimiques dangereux prévue par l'article R. 4412-58 du code du travail, alors applicable, se rattache à l'exécution du contrat de travail. Il en résulte que cette action est soumise à la prescription de deux ans prévue à l'article L. 1471-1, alinéa 1, du Code du travail.Cass. soc. 1er février 2023 n°21-20.526
Arrêt maladie / Obligation de loyauté / Faute grave / Etat de santé / Prolongation
La Cour de cassation, se positionne sur la question du licenciement d’un salarié participant à des compétitions sportives pendant son arrêt maladie. L’employeur mettait en avant un manquement à l’obligation de loyauté du salarié après avoir découvert, que le salarié avait participé à des compétitions de badminton, et ce, tout en s’entraînant pour ces dernières. Le salarié a ainsi été licencié pour faute grave. La Cour donne raison au salarié en confirmant sa position, à savoir : qu’à défaut de démontrer un préjudice direct, l’employeur ne peut reprocher au salarié d’avoir participé auxdites compétitions. Ainsi, dans une certaine mesure, l’employeur ne peut que très rarement se baser sur des éléments de la vie privée du salarié, sauf à démontrer un préjudice direct.Cass. soc. 8 février 2023 n°21-14.444
CDD / Contrat à durée déterminée / Motif / CDD de remplacement / Définition / Requalification
La Cour de cassation considère qu’est réputé être conclu à durée indéterminée - (CDI), tout contrat à durée déterminée – (CDD), dès lors que ce dernier ne préciserait pas son motif avec précision. Pour rappel, seuls les motifs prévus par le législateur peuvent être invoqués – ex : accroissement d’activité, remplacement… A noter que lorsqu’il s’agit d’un CDD de remplacement, il convient également de préciser la qualification et le nom du salarié remplacé au sein du contrat. En l’espèce, la Cour de cassation valide la demande en requalification au motif que le CDD ne précisait pas la qualification du salarié remplacé.Cass. soc. 8 février 2023, n°21-16.258
Inaptitude / Procédure disciplinaire / Procédure de licenciement / Licenciement disciplinaire
Cass. soc.,8 février 2023, n°21-16.824
CDD / Contrat à durée déterminée / Requalification / Effets / Rappel de salaire / CDI / Contrat de travail
Cass. soc.,8 février 2023, n°21-10.270
CDD / Contrat à durée déterminée / Requalification / Effets / Rappel de salaire / CDI / Contrat de travail
Cass. soc. 25-1-2023 n° 21-13.699 F-D
Renouvellement / Période d'essai / Consentement / Procédure / Signature
Cass. soc., 25 janvier 2023, n°21-16.825
Forfait jours / Autonomie / Temps de travail / Planning
Cass. soc., 18 janvier 2023, n° 21-23.796
Harcèlement sexuel / Inaptitude / Obligation de sécurité / Enquête / Mesures
Cass.soc. 1er février 2023 n°21-24271
Lanceur d’alerte / Procédure référés / Harcèlement / Licenciement
La Cour de cassation estime que le salarié qui fait l’objet d’un licenciement après avoir lancé une alerte interne concernant des éventuels faits de corruption et de harcèlement doit pouvoir bénéficier du dispositif de la loi Sapin. Les Juges devaient rechercher si l’employeur rapportait la preuve que sa décision de licencier était justifiée par des éléments objectifs étrangers à la déclaration de l’intéressé.Cass.soc. 25 janvier 2023 n°21-20.912
Forfait jours / Accord d’entreprise / Nullité / Convention de forfait / Annulation de l’accord
La non-validité d’un accord d’entreprise portant sur la mise en place de convention de forfait en jours, entraîne la nullité de la convention de forfait en jours individuelle. Une vigilance toute particulière sera accordée à la mise en place d’un régime suffisant du respect des dispositions légales en matière de repos quotidien et hebdomadaire. Le suivi de la charge de travail doit alors être régulier et effectif. Un simple entretien annuel n’est pas suffisant.CE 7-10-2022 n° 450492
Licenciement disciplinaire / Faute grave / Liberté d’expression / Discrimination / Salarié protégé / Sexisme
Constitue une cause réelle et sérieuse de licenciement disciplinaire, des propos racistes et sexistes d'un salarié protégé visant systématiquement et de manière répétée des subordonnées ayant pour point commun d'être des femmes supposément d'origine maghrébine et de confession musulmane.Cass.soc. 25 janvier 2023 n°21-18.141
Pouvoir de direction / Conditions de travail / Qualification / Modification du contrat / Tâches / Prise d’acte / Démission
Le changement des conditions de travail et de la tâche à accomplir n’entraîne pas modification du contrat de travail dès lors que cela correspond à la qualification du salarié. En l’espèce, la position du salarié était inchangée, il n'avait subi aucune rétrogradation ni déclassification. Il avait conservé sa rémunération, ainsi, ce changement de fonction ne constituait pas une modification de son contrat de travail. La prise d’acte de la rupture a produit les effets d’une démission.Cass.soc. 25 janvier 2023, n°21-16.398
Retour à l’emploi / CUI / Contrat unique d’insertion / Requalification / CDD / Personne morale de droit public
Cass.soc. 25 janvier 2023, n°21-19.996
Transaction / Renonciation / Amiante / Préjudice d’anxiété / Contestations
Cass.soc. 25 janvier 2023, n°21-18.600
Co-emploi / Prise d’acte / Lien de subordination / Filiale / Société mère
Le salarié soutenait l’existence d’un co-emploi économique à l'égard de la filiale et de la société mère. La Cour d’appel le déboute et ne fait pas droit à la demande de licenciement sans cause réelle et sérieuse, indemnité de congés payés, préavis, défaut de visite médicale, indemnité pour travail dissimulé, etc. Pour la Cour de cassation, le salarié avait formulé deux demandes, l’existence non seulement d'un co-emploi économique, mais également d'un lien de subordination à l'égard de la société mère. Or, la Cour d’appel n’avait pas répondu aux conclusions du salarié s’agissant du lien de subordination. La Cour de cassation rapproche de fait, l’immixtion permanente dans la gestion économique et sociale conduisant à la perte totale d'autonomie d'action et l’existence d’un lien de subordination.Cass. soc. 18 janvier 2023 n°21-20.311
Indemnités chômage / Remboursement / Licenciement nul / Droit de grève / L.1235-4
Il résulte des articles L.1235-4, dans sa version issue de la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016, L. 1132-4 et L. 1132-2 du code du travail que les dispositions de l'article L. 1235-4 selon lesquelles le juge ordonne le remboursement par l'employeur fautif aux organismes intéressés de tout ou partie des indemnités de chômage versées au salarié licencié, du jour de son licenciement au jour du jugement prononcé, dans la limite de six mois d'indemnités de chômage par salarié intéressé, sont applicables en cas de nullité du licenciement en raison de l'exercice normal du droit de grève.Cass. soc. 18 janvier 2023 n°21-23.796
Congés payés / Assiette de calcul / Prime annuelle / L.3141-22
La Cour de cassation considère que sont exclues de l'assiette de calcul des indemnités congés payés, les primes annuelles attribuées au salarié sans distinction entre les périodes de travail et celles des congés payés. Pour rappel, l'article L.3141-3 ouvre droit à une indemnité égale au dixième de la rémunération brute totale perçue par le salarié au cours de la période de référence.
Pour la détermination de la rémunération brute totale, il est tenu compte :
- De l'indemnité de congé de l'année précédente ;
- Des indemnités afférentes à la contrepartie obligatoire en repos prévues à l'article L. 3121-11 ;
- Des périodes assimilées à un temps de travail par les articles L. 3141-4 et L. 3141-5 qui sont considérées comme ayant donné lieu à rémunération en fonction de l'horaire de travail de l'établissement.
Lorsque la durée du congé est différente de celle prévue à l'article L.3141-3, l'indemnité est calculée selon les règles fixées ci-dessus et proportionnellement à la durée du congé effectivement dû.
Cass. soc. 18 janvier 2023, n°21-12.782
Prime de départ / Ancienneté / Rémunération / Allocation de fin de carrière / Retraite / R.3243-1
Il est important de délimiter et/ou de préciser l’étendue de la reprise d’ancienneté avec précision au sein du contrat de travail. En l’espèce, la Cour de cassation valide l’interprétation de la Cour d’appel de délimiter la reprise d’ancienneté à la seule rémunération conformément à ce qui était convenu au contrat. En l’espèce, la reprise d’ancienneté n’a pas été appliquée lors de l’allocation de fin de carrière dans la mesure où l’article prévu au contrat ne concernait que la seule rémunération. Dans cette affaire, la clause prévue au contrat de travail fait échec à la présomption d’ancienneté figurant sur le bulletin de paie.Cass. soc. 20 janvier 2023, n°21-23.947 et n°20-23.673
ATMP / Accident du travail / Maladie professionnelle / Amiante / Ayants droit / Indemnisation
La Cour de cassation élargit le périmètre d’indemnisation d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle, en cas de faute inexcusable de l’employeur.
Les victimes, comme leurs ayants droit, seront mieux indemnisées, notamment celles qui ont été exposées à l’amiante.
Les victimes d'ATMP ou leurs ayants droit peuvent prétendre à une indemnité complémentaire distincte de la rente prévue par le Code de la sécurité sociale, qui n’indemnise pas le déficit fonctionnel permanent.
En cas de faute inexcusable, la Cour de cassation reconnaît à la victime une majoration des indemnités versées par la CPAM. La victime peut également demander la réparation des préjudices qui ne sont pas déjà indemnisés par la sécurité sociale.
La Cour considère que désormais que la rente versée par la caisse de sécurité sociale aux victimes d’ATMP n’indemnise pas leur déficit fonctionnel permanent, c’est-à-dire les souffrances qu’elles éprouvent par la suite dans le déroulement de leur vie quotidienne.
La Cour de cassation permet désormais aux victimes ou à leurs ayants droit d’obtenir une réparation complémentaire pour les souffrances physiques et morales endurées après « consolidation ».
Cette réparation peut être obtenue sans que les victimes ou leurs ayants droit n’aient à fournir la preuve que la rente prévue par le code de la sécurité sociale ne couvre pas déjà ces souffrances.